Outsourcing. L’innovation, seul gage de pérennité, estime Chraibi
Comment se porte le métier de l’offshoring au Maroc ?
Ce métier était inexistant il y a 20 ans. Il s’agit aujourd’hui du 6e secteur le plus important au Maroc en termes de revenus à l’export avec 11 MDH l’année dernière, nous plaçant après l’aéronautique. Notre secteur est le 2e plus gros pourvoyeur d’emplois ces 4 dernières années juste après le secteur automobile. Cela est d’autant plus remarquable qu’il s’agit d’emplois dans les services ne nécessitant aucun intrant, générant ainsi une très forte valeur ajoutée et ayant fait entrer notre pays dans la carte mondiale de l’économie du savoir.
Dans le cadre du PAI, le secteur s’est fixé des objectifs ambitieux d’ici 2020. Seront-ils atteints ?
Ils ne seront probablement pas atteints mais nous devrions nous en approcher sachant que nous pourrions atteindre les 14 MMDH dès 2019 si le rythme de croissance du premier semestre se confirme. Ce chiffre est déjà très honorable. Le secteur des centres d’appels poursuit une forte croissance bien que mature, il en est de même pour l’IT. En revanche le BPO (Back Office) stagne en raison de notre moindre compétitivité sur les coûts et les 2 autres écosystèmes ESO (Ingénierie) et KPO (Knowledge Process Outsourcing) ont mis plus de temps que prévu à décoller.
Quelles sont les différences entre les marchés national et africain, notamment en termes de ressources humaines ?
Il y a des différences majeures au niveau du bassin de l’emploi. Les salaires sont 3 fois inférieurs à Madagascar. Néanmoins, nous continuons à accroître notre activité au Maroc étant donné que nous servons des besoins différents. Ainsi le développement de notre offre en Afrique ne se fait pas au détriment de notre activité au Maroc de la même façon que l’émergence de ce métier au Maroc n’a pas fait disparaître les centres d’appels en France où nous continuons nous-mêmes à investir. La présence dans les trois zones nous permet d’orienter les prestations vers les différentes destinations en fonction du niveau de complexité, des spécificités et du modèle économique de nos clients. Ainsi par exemple, les opérations nécessitant des aptitudes commerciales importantes sont beaucoup mieux gérées au Maroc qu’à Madagascar. Les opérations de back office (BPO) généralement relativement peu complexes sont quant à elles très bien adaptées à Madagascar. Enfin, les opérations les plus complexes à destination des clients les plus exigeants continuent souvent à être gérées en France. On va ainsi vers un partage harmonieux de la chaîne de valeur entre l’onshore (France), le nearshore (Maroc) et l’offhore (Madagascar).
Quels sont les défis à relever pour le secteur ?
Le principal défi est d’ordre RH. Nous créons environ 5.000 emplois nets chaque année. Ce chiffre pourrait être au moins 3 fois plus important si nous avions pu bénéficier d’un système d’éducation plus adapté. Nous continuons à recruter moins de 5% des candidats qui se présentent compte tenu du niveau général chaotique des diplômes en termes de langues et de soft skills. Le niveau de turnover est lui aussi très handicapant car nous sommes devenus un laboratoire de formation où tous les secteurs viennent puiser. Heureusement, nous restons une destination qualitative avec un véritable savoir-faire qui continue à faire la différence auprès de nos donneurs d’ordre. Notre seule issue résidera donc dans notre capacité à innover et à continuer à nous réinventer en permanence afin de s’adapter au mieux aux évolutions de nos clients.