Éco-Business

Les industriels passeront à la caisse en 2018

Le ministre des Finances a promis la suppression, en février ou mars prochain, de la subvention du sucre utilisé dans les boissons sucrées (limonades, jus et autres). 10,3 millions de Marocains adultes, dont 63,1% de femmes, sont en situation d’obésité ou de pré-obésité à cause, notamment, d’une surconsommation de sucre.

C’est l’un des sujets tabous que les gouvernements successifs se passaient telle une patate chaude. La subvention du sucre est restée intouchable non pour ménager l’indigent, mais pour s’éviter les foudres du fort lobby des boissons sucrées (gazeuses, jus de fruits et autres). Jusqu’à aujourd’hui, aucun gouvernement n’a pu donner la ventilation de cette subvention conséquente entre consommateurs et industriels. Et selon le dernier chiffre communiqué par le ministère des Affaires économiques et générales, la subvention du sucre a atteint 3,55 MMDH à fin octobre 2017. Ce montant dépassera facilement les 4 MMDH à la fin de l’année. Un vrai pactole, inespéré sous d’autres cieux, qui profite à des multinationales de boissons ainsi qu’à d’autres industriels.

Consensus autour de la suppression de la subvention
Mais aujourd’hui, la donne semble avoir changé. Les pouvoirs publics sont plus enclins à bousculer les choses, comme ils l’ont fait pour les hydrocarbures. L’initiative émane des groupes parlementaires de la majorité (PJD, RNI-UC, Mouvement Populaire, USFP et le PPS ) ainsi que l’Istiqlal, parti de l’opposition, revêtant la forme d’une proposition d’amendement du projet de loi de Finances 2018. En d’autres termes, hormis le PAM, il y a un consensus autour de la levée de la subvention de cette denrée pour les industriels du sucre. Que contient cette proposition d’amendement, qui donnera certainement de l’urticaire aux industriels des boissons sucrées? Telle que présentée devant le ministre des Finances en commission parlementaire, elle comprend quatre volets. Primo, supprimer ce qui reste de la subvention dont bénéficient les sociétés de boissons sucrées dans le cadre de la Caisse de compensation. En effet, il y a eu auparavant une levée partielle de la subvention qui, à l’époque, n’a pas trop dérangé les industriels. Dans son plaidoyer en commission des Finances comme en plénière, le député PJD Mostafa Brahimi a vociféré contre ces derniers qui n’éprouvent aucune gêne à exporter leurs boissons produites au Maroc et subventionnées. Secundo, augmenter la taxe intérieure sur la consommation (TIC) de 30 à 40 DH/hectolitre. Rappelons dans ce sens que cette TIC a connu une première hausse de 10 DH en 2008 suite à une proposition d’amendement émanant du groupe socialiste. Contacté par Les Inspirations ÉCO, Brahimi a expliqué que cette taxe est appliquée dès que le seuil du sucre dans la boisson dépasse les 5 g/100 ml. Et d’ajouter qu’il y a aujourd’hui une propension à ne pas tenir compte de ce seuil. Dès qu’il y a une trace de sucre dans la boisson, la TIC serait applicable. L’exemple de la France est assez éloquent à ce niveau. Dans son PLF 2018, il y a eu proposition de passer de 7,53 à 20 euros de TIC par hectolitre. Cette tendance mondiale à surtaxer les boissons sucrées n’est pas le fruit du hasard ou un acharnement contre les producteurs qui n’hésiteront pas à répercuter. Il s’agit de remédier à une menace réelle pour la santé publique, menace qui place sur le Maroc.

Le principe de précaution de la TVA comportementale
En pleine discussion du PLF 2018, un groupe d’épidémiologistes et de chercheurs ayant pris contact sous la coupole avec tous les groupes parlementaires parlent d’un fléau de l’obésité au Maroc. Ils leur ont expliqué que 10,3 millions de Marocains adultes -dont 63,1% de femmes- sont en situation d’obésité ou de pré-obésité, sur la base d’une étude réalisée en 2011 par le HCP. La troisième composante de la proposition d’amendement porte sur la mise en place d’une TVA spécifique de 70 DH/hectolitre, comme c’est en vigueur pour l’alcool. C’est une TVA que l’on qualifie de comportementale. Son objectif est d’agir sur une attitude consumériste nocive à la santé publique. Mais dans ce cas-là, c’est le consommateur qui subit le coût, d’où la difficulté économique et politique de la mettre en place. Enfin, le quatrième volet de la proposition vise à barrer la route à l’importation des boissons sucrées en augmentant les droits de douane. Car si les entreprises locales voient leurs coûts de production augmenter (levée de la subvention et hausse de la TIC), elles seront davantage tentées d’importer. Toutefois, parmi ces quatre volets, le ministre des Finances, Mohamed Boussaid, n’a promis d’en adopter que le premier, afin que les boissons sucrées ne subissent pas de très importantes hausses de prix. Ainsi, la suppression totale de la subvention du sucre utilisé dans lesdites boissons pourrait être appliquée vers février ou mars 2018 par décision ministérielle comme ce fut le cas pour les hydrocarbures. Quant aux autres TIC et TVA, qui nécessitent des projets de loi devant être adoptés par le gouvernement, le chemin à parcourir reste encore long. 


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