«Le Maroc est une force qui sait où elle va»

Présent au Forum d’Euromed Capital à Casablanca, Jean Pierre Raffarin a salué l’ouverture économique du Maroc sur l’Europe et sur l’Afrique. Pour le président de la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées au Sénat français «les investisseurs étrangers ont confiance en le royaume».
Les ÉCO : Il a beaucoup été question des PME lors des échanges dans le cadre du Forum. Selon-vous comment leur donner un coup de pouce ?
Jean-Pierre Raffarin : Il faut aider les toutes petites entreprises, ce que nous appelons en France les auto-entrepreneurs. Il faut les aider à travers l’allègement des charges sociales. Aussi, les startups doivent être soutenues à l’innovation. Et sur ce point, elles ont plus besoin de fonds propres car l’innovation coûte cher en termes d’investissements. Il y a une sorte de palette en fonction de l’intérêt des entreprises. D’une manière générale, la politique fiscale est le moyen d’orienter les aides vers les priorités. On peut alléger les impôts en recrutant, en faisant de l’innovation ou de la recherche, etc. L’outil fiscal peut inciter et dispose en même temps d’avantages. Avec une déduction fiscale, on peut satisfaire un intérêt public comme l’innovation, l’emploi et l’aménagement du territoire.
Vous avez souligné la nécessité du partage des investissements, de l’innovation, etc. Comment cela peut-il se concrétiser ?
Le partage se fait en deux étapes. D’une part, il faut aider à la création de la richesse, pour ensuite faire en sorte que tous les acteurs puissent avoir un résultat «gagnant-gagnant». Cela exige une certaine forme de justice et que chacun puisse y tirer son intérêt. L’économie moderne doit rechercher l’équilibre à la manière de la mondialisation. Quant je parle de partage de l’influence politique, je fais référence à l’ONU. Pour l’économie, je pense à l’OMC et aux traités de partenariats entre différents pays et espaces régionaux. C’est l’avenir du co-développement qui nous concerne tous.
Quel regard portez-vous sur l’évolution économique du Maroc ?
Le Maroc est une force qui va de l’avant et qui sait où elle va. C’est un point très important. C’est pourquoi les investisseurs étrangers ont confiance en le royaume. Il y a une stratégie qui est en place et qui est une stratégie d’ouverture. Le Maroc dispose à la fois de bonnes relations avec l’Europe et avec l’Afrique subsaharienne. Cette logique de partenariats, de relations avec les entreprises et de projets communs est à saluer. Quant vous voyez que le stock des investissements directs français au Maroc est à 12 milliards d’euros, cela montre une réelle volonté de coopération. Le Maroc fait de même avec l’Afrique et cela est perceptible à travers le nombre de ses entreprises qui s’installent sur le continent. Cette dynamique est soutenue par le roi, à travers ses différentes tournées africaines. À mon sens, c’est cela la bonne stratégie au XXIe siècle.
Que vous inspire la stratégie d’investissement du Maroc en Afrique ?
La stratégie marocaine est clairvoyante. Depuis longtemps, elle travaille au développement de la co-localisation et au co-développement avec l’Afrique subsaharienne. L’Afrique sera le continent du XXIe siècle. Il y a encore des difficultés en Afrique, mais il y a aussi de la croissance, de l’intelligence et de l’énergie humaine. Les banques marocaines ont beaucoup investi dans ces pays. Je pense que la qualité de la stratégie marocaine, c’est d’appartenir à la fois à l’ouest, au nord et au sud. Le Maroc ne s’enferme pas, mais joue plutôt la carte des alliances. À mon avis, c’est cela la stratégie du XXIe siècle.
Selon vous, comment peut-on réussir un partenariat triangulaire France-Maroc-Afrique ?
L’Afrique compte plusieurs pays et dans chaque pays il faut aussi faire la différence entre les espaces et les villes. Tout dépend de l’ambition des entreprises. Des villes comme Dakar, par exemple, offrent une opportunité de développement aux TPE, PME, notamment pour des prestations dans des sujets extrêmement locaux. Il est clair qu’en Afrique de l’Ouest, il y a un potentiel très fort. Au sud également, on voit un potentiel particulièrement élevé, mais je crois que c’est la stabilité et les progrès que font ces pays dans la gouvernance qui garantiront l’avenir de la croissance africaine. Aujourd’hui, plusieurs pays sont en situation de stabilisation politique et économique et c’est plutôt une bonne nouvelle.
Après la COP21 à Paris, quelles peuvent être les opportunités de la COP22 à Marrakech ?
Je pense qu’il y a beaucoup d’atouts dans ce pays, en dehors du solaire. L’attitude des autorités marocaines pour la réussite de la COP21 a beaucoup été appréciée par la France. La COP22 peut être l’occasion d’afficher le Maroc comme une vitrine du développement responsable. Il y a donc de bonnes opportunités. Après le succès de la COP21, la COP22 est l’occasion pour le Maroc de s’affirmer comme étant un pays qui a choisi le développement humain, celui du XXIe siècle.