Éco-Business

La compétitivité d’abord !

L’intérêt économique des entreprises pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique est de plus en plus intégré dans les logiques d’affaires. Cependant, une multitude d’obstacles persistent, avec parfois des solutions simples à mettre en pratique. Dans l’immobilier, contrairement aux chiffres de la profession, le surcoût de la nouvelle réglementation thermique dans le bâtiment de dépasserait pas les 3%.

«Comme le montre l’expérience indienne en la matière, il est très difficile de convaincre et d’impliquer les entreprises quant aux aspects de l’efficacité énergétique. La seule chose qui les a convaincues, ce sont les gains en compétitivité, lorsqu’elles ont senti la menace des concurrents étrangers plus compétitifs». Cet avis d’expert résume l’état d’esprit qui dicte l’implication du secteur privé dans le chantier fondamental des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique. Il a été livré par Philippe Simonis, conseiller technique principal de GIZ Maroc, lors de la conférence organisée hier à Casablanca par la Banque Populaire autour de la thématique «Efficacité énergétique et énergies renouvelables, leviers de compétitivité des entreprises». Comme l’ont rappelé plusieurs intervenants, dont Mohamed Benchaaboun, président du Groupe Banque Populaire, «cette question est dans l’air du temps, alors que la COP 22 s’annonce pour bientôt». Mais au-delà des impératifs de l’actualité, ces questions ne se limitent plus à l’effet de mode, comme cela a effectivement été le cas pendant longtemps.

Efficacité administrative
En effet, énergies renouvelables et efficacité énergétiques se dressent aujourd’hui comme des gisements incontournables de compétitivité pour les entreprises, au moment où le Maroc est en train de mettre les bouchées doubles pour positionner son industrie sur l’échiquier concurrentiel mondial. Toujours est-il qu’en dépit de la multiplication récente des mesures abondant dans ce sens, la théorie peine encore à se concrétiser à grande échelle. Les raisons de ce blocage chez les entreprises marocaines ont été très bien résumées par les témoignages recueillis auprès des chefs d’entreprises. Doutes sur la durabilité des investissements et des technologies, difficulté de financement des investissements, incompréhension des solutions, carences qualitatives et quantitatives de la recherche universitaire et privée, ou encore absence de prestataires locaux, qualifiés et sérieux, sont autant de barrières relevées par un panel de chefs d’entreprises pourtant très sensibilisés à l’importance de l’efficacité énergétique. «Cela fait quasiment deux ans que notre entreprise attend le versement de la subvention publique dans le cadre d’un projet d’efficacité énergétique. Pour réellement motiver tout le monde autour de l’efficacité énergétique, il faut d’abord une efficacité administrative», déplore un chef d’entreprise notamment spécialisée dans l’équipement électrique à basse consommation.

Les promoteurs immobiliers montrés du doigt
Si dans l’industrie, les économies d’énergie rendues possibles par les mécanismes d’efficacité énergétique sont directement palpables, avec quelques fois des retours sur investissements très rapides, il en va autrement pour le secteur de l’immobilier. «Dans l’immobilier, celui qui construit n’est pas celui qui consomme. Du coup, les promoteurs immobiliers ne voient pas d’intérêt pour leur business puisque ce sont les acquéreurs qui payent les factures d’électricité dans des logements mal isolés», regrette le patron d’un cabinet d’études.

Il faut en effet dire que les promoteurs immobiliers sont particulièrement réticents à l’application de la nouvelle réglementation sur l’isolation thermique dans le bâtiment, entrée en vigueur en 2015. Pourtant, le surcoût est relativement modeste, et même très modeste comparé aux marges dégagées sur certaines unités immobilières. «Les surcoûts avancés par les promoteurs pour l’application de la nouvelle réglementation sont très exagérés. Pour les logements économiques et sociaux, qui représentent la plus grande part du secteur, le surcoût ne dépasse pas les 3%, quelle que soit la zone climatique où se situent les logements», met en évidence Sonia Mezzour, secrétaire générale de l’ADEREE. Compétitivité oui, mais contrainte réglementaire aussi !

Mamoun Bouhdoud,
Ministre délégué chargé des petites entreprises et de l’intégration du secteur informel

«L’aspect efficacité énergétique a été pris en compte dans la structuration des différentes filières en écosystèmes. Aujourd’hui, pour être compétitif, il faut être efficace énergétiquement. C’est notamment le cas dans l’industrie, qui absorbe 30% de l’énergie consommée au Maroc. L’efficacité énergétique est un aspect essentiel dans la maîtrise des coûts d’exploitation»

Miriem Bensalah-Chaqroun,
Présidente de la CGEM

«Aujourd’hui, quand l’entreprise n’atteint pas une taille critique, elle peine à bénéficier des mécanismes pour investir dans l’efficacité énergétique. Il faut mettre au point des offres cohérentes, simples et faciles pour qu’elles puissent bénéficier au plus grand nombre d’entreprises.»



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