La pêche maritime fait face à de nouveaux défis
Plus de dix ans après la mise en œuvre de la stratégie Halieutis, c’est désormais l’occasion de consolider les acquis et de faire face à de nouveaux enjeux. La 5ème édition du Salon Halieutis, qui se tient du 20 au 24 février à Agadir, constitue un véritable baromètre pour mesurer le niveau d’avancement de cette stratégie.
C’est aujourd’hui que le rideau sera levé sur le Salon Halieutis à Agadir. Une 5ème édition qui confirme son statut de vitrine du secteur halieutique et aquacole au Maroc. Ainsi plus de dix ans après le déploiement de la stratégie Halieutis axée sur la durabilité, la performance et la compétitivité, cette feuille de route fait actuellement face à de nouveaux défis. Le travail accompli jusqu’à présent, en particulier sur le plan de la durabilité, c’est à dire l’amont de la filière, a été bénéfique pour les différents segments du secteur de la pêche et en comparaison avec le lancement de la stratégie en 2009, marquée par un passage de résistance au changement de la part des professionnels, les revendications ont changé au même titre que les enjeux imposés par la raréfaction de la ressource, l’augmentation de l’effort de pêche, les changements climatiques ainsi que la valorisation et la commercialisation des produits de la mer.
Durabilité
Aujourd’hui, 96% des captures sont gérées par des plans d’aménagement contre 95% fixés en 2020 alors que le chiffre était à peine de 5% lors du lancement de la stratégie, allusion faite au plan d’aménagement de la pêcherie poulpière dont la biomasse a chuté ces dernières années. Chose qui a poussé le ministère de tutelle à proroger le repos biologique de cette pêcherie, suivie par la décision ministérielle n°11/18 du 28 décembre 2018 fixant les conditions de la reprise de l’activité de la pêche au poulpe au sud de Sidi L’Ghazi pour la saison hivernale 2019. Au cours de cette décennie de mise en œuvre du Plan Halieutis, la priorité a été donnée à la question de la durabilité, notamment via l’instauration des reposes biologiques, le renforcement du rôle de l’INRH à travers le lancement périodique de ses campagnes d’évaluation par chalutage des stocks. À cela s’ajoute l’installation du dispositif «VMS» (Vessel Monitoring System) pour le contrôle satellitaire des navires qui a coûté près de 80 MDH à travers la réalisation du Centre national de surveillance des navires en plus de la certification des captures et la lutte contre la pêche appelée communément «INN» : illicite, non déclarée et non réglementée. Du côté des professionnels, «l’effort qui a été accompli jusqu’à présent en termes de préservation de la ressource à travers la couverture des espèces par des plans d’aménagement doit également inclure les poissons dits nobles afin de consolider les acquis, en l’occurrence la préservation réalisée en amont de la filière», recommande Abderrahmane Sarroud, vice-président au sein de la Confédération nationale de la pêche côtière.
Performance
S’agissant de la performance, la flotte de la pêche marocaine devrait également faire face aux enjeux de demain puisque la plupart des bateaux actuels en exploitation ont été conçus ou construits à une époque où les préoccupations environnementales, économiques et sociales n’étaient pas les mêmes. Compte tenu de cette situation, le renouvellement de l’outil de production qu’est le bateau ou le navire de pêche est une question inévitable dans les années à venir. Cette question revêt une importance particulière dans le cadre de l’initiative «Ceinture bleue» dédiée à la pêche maritime pour minimiser l’impact sur les zones côtières les plus sollicitées économiquement. «Il faut davantage pêcher avec des techniques de pèche sélectives qui ne détruisent pas l’écosystème marin et une meilleure valorisation des débarquements», ajoute Abderrahmane Sarroud. C’est pourquoi l’outil de production devrait consommer en fonction des segments (hauturier, côtier et artisanal) moins d’énergie, réduire ses émissions à effet de gaz et être performant avec une meilleure rentabilité sur le plan de la pêche et la valorisation des débarquements. Aujourd’hui, 60 à 70% des charges globales des bateaux sont consommées par la facture de gasoil d’où la nécessité de s’adapter aux exigences environnementales et s’inscrire dans des solutions de développement durable puisque 40 à 50 bateaux sont réalisés annuellement entre la région d’Agadir et Tan-Tan. Par ailleurs, plusieurs actions ont été accomplies dans le cadre de la stratégie, notamment la généralisation des contenants normalisés pour les débarquements de poissons qui a permis d’abolir le phénomène du vrac à bord des bateaux avec pour conséquence une valorisation de 30% en termes de valeur ajoutée sur le plan du prix mais aussi l’augmentation du PIB du secteur qui génère actuellement une contribution de 2 à 3% au Produit intérieur brut (PIB), soit un chiffre d’affaire de 16,3 MMDH c’est-à-dire plus de 82% de l’objectif tracé à l’horizon 2020 (18 MMDH). En ce qui concerne la question de la commercialisation, des halles nouvelles génération ont été réalisées dans les différents ports du royaume. L’objectif étant d’optimiser les conditions de commercialisation des produits de la pêche ceci sans oublier l’aménagement des points de débarquement pour la pêche artisanale et un réseau régional de marchés de gros de poissons.
Compétitivité
Bien que l’objectif de multiplier le chiffre d’affaires des exportations sera probablement atteint, toutefois le défi pour les prochaines années est le renforcement de la transformation des produits halieutiques à travers des projets d’innovation réalisables et faisables, notamment en aquaculture et bien d’autres d’où la nécessité d’accompagner davantage les professionnels et les industriels en ce qui concerne la valorisation des apports de la pêche, l’ouverture de nouveaux débouchés commerciaux et le financement des produits à forte valeur ajoutée pour augmenter la valeur à l’export. En effet, les débarquements des produits de la pêche côtière et artisanale se sont établis à 1,31 million de tonnes en 2018 soit le même poids enregistré qu’en 2017, selon l’Office national des pêches (ONP). À partir de l’année 2011, le CA des exportations a connu une progression annuelle continue pour atteindre, en 2017, une valeur de 22,09 MMDH.