Financement : les fonds souverains africains veulent accroître leur force de frappe
À l’initiative d’Ithmar Capital, une dizaine de fonds souverains africains ont créé la plateforme «ASIF» destinée à la mutualisation des efforts et au partage des savoir-faire pour plus d’efficacité, notamment dans la mobilisation de capitaux privés et internationaux pour financer les besoins du continent. Les enjeux sont immenses.
L’actualité de ces derniers mois a remis au premier plan la question de la souveraineté (sanitaire, alimentaire, financière, énergétique…) dans la plupart des pays africains. Pour ne plus dépendre du blé ukrainien ou russe par exemple, les économies doivent accélérer leur transformation.
«Il nous appartient à nous tous, pays africains, de nous saisir de notre destinée et d’œuvrer, individuellement et de concert, à transformer nos ressources et nos potentialités en réalisations prometteuses pour nos citoyens et nos générations futures», conseille le Souverain dans un message (lu par Faouzi Lakjaa, ministre délégué chargé du Budget) adressé aux investisseurs souverains lors du lancement du Forum africain des investisseurs souverains.
Réunissant une dizaine de fonds souverains du continent, cette plateforme créée à l’initiative d’Ithmar Capital (fonds souverain d’investissement stratégique marocain) vise principalement à la mutualisation des efforts et au partage des savoir-faire pour plus d’efficacité, notamment dans la mobilisation de capitaux privés et internationaux pour financer les besoins du continent.
La BAD estime entre 600 et 700 MM$ par an le coût du financement des besoins en développement du continent. Et l’Afrique ne peut plus se reposer longtemps sur les banques et agences de développement pour se financer. Elle a aussi besoin d’une véritable industrie de l’investissement qui lui soit propre. Les fonds souverains et stratégiques ont, à cet effet, un rôle crucial à jouer pour une meilleure allocation des capitaux vers les secteurs créateurs de valeur et à fort impact social.
«Les fonds souverains sont des instruments de levier pour maximiser les ressources. Il est fondamental de trouver les moyens et les occasions de faire levier», relève Lionel Zinsou, banquier, économiste et ancien premier ministre du Bénin.
Plus globalement, il y a un besoin d’instaurer une régulation de qualité et de trouver les mécanismes permettant de mieux orienter l’épargne africaine vers le financement des grands projets. «Nous devons transformer les poches d’épargne qui existent en un capital qui se mobilise pour le développement de l’Afrique», exhorte l’ex-premier ministre du béninois.
“Les populations réclament une vie décente et la sécurité sinon, il risque d’y avoir des agitations”
“Nous avons besoin de la crédibilité de tout un chacun pour convaincre que le continent est rentable et qu’il est la perception hystérisée d’un risque qui n’existe pas»… «On ne peut pas faire des fonds souverains la béquille de toutes les entreprises malades… Ils sont sur la ligne de front de la transformation qualitative de nos économies. Ce rôle d’entrainement est absolument essentiel»”
“Je crois fermement que l’ASIF relèvera un certain nombre de défis auxquels les investisseurs internationaux sont confrontés lorsqu’ils envisagent d’investir en Afrique et ouvrira, à coup sûr, des opportunités pour un impact positif sur le continent et ses aspirations à un avenir meilleur. Je salue l’intérêt et le soutien de l’ADIA, de l’ADQ et de KIA envers l’ASIF, et j’ai hâte de renforcer cette relation et de construire un partenariat mutuellement bénéfique et de longue date.”
Appui des fonds souverains du Golfe
La plateforme multilatérale dédiée à l’accélération des investissements sur le continent va bénéficier d’un soutien de poids. Une déclaration conjointe a été signée avec trois fonds souverains du Golfe. Il s’agit d’Abu Dhabi Investment Authority (ADIA), l’ADQ des Émirats Arabe Unis et le fonds souverain du Koweit (KIA). Le lancement de l’ASIF a été aussi marqué par la signature d’une lettre d’intention tripartite entre AfDB, Africa 50 et ASIF pour la coopération, l’identification et la préparation de projets; la mobilisation de capitaux pour la préparation et la réalisation des projets ; et enfin la coopération pour le développement des compétences et expertises.
Franck Fagnon / Les Inspirations ÉCO