Déficit budgétaire : le retournement de conjoncture aura un impact neutre
Les hypothèses de construction du Budget 2022 n’ont pas tenu longtemps face à la sécheresse et aux conséquences économiques de la guerre en Ukraine. Le contexte va alourdir les dépenses de 16 MMDH. Dans le même temps, les recettes fiscales sont bien meilleures qu’anticipé grâce à l’IS et la TVA à l’importation. Le déficit budgétaire devrait rester proche des prévisions. Reste à savoir si cela suffira à calmer les tensions haussières sur les taux obligataires.
Alors qu’il avait budgétisé 5 MMDH au titre des recettes de privatisation, l’Exécutif a finalement décidé d’y renoncer. Il semble privilégier les financements innovants grâce auxquels il a déjà mobilisé 10 MMDH sur une enveloppe de 12 MMDH. L’abandon des cessions de participations de l’État, cette année, entrainera une baisse de 4,8 MMDH des montants budgétisés au titre des recettes non fiscales. Aucun changement majeur n’est donc attendu sur les autres rubriques, notamment sur les dividendes versés par les entreprises et établissements publics ainsi que sur les participations financières de l’État.
Hors charge de compensation, les autres dépenses sous contrôle
À 203,2 MMDH, les charges de personnel et les dépenses de matériels et divers restent inchangés par rapport aux anticipations. Face aux critiques régulières sur le train de vie de l’État, l’exécutif s’engage sur la rationalisation des dépenses de fonctionnement. En attendant des résultats concrets à ce niveau, il espère un retour à la normale de la charge de compensation après l’explosion de la facture cette année. Face à l’envolée des prix à l’international, 16 MMDH ont été rajoutés à l’enveloppe initiale (17 MMDH) pour assurer l’approvisionnement en blé et pour stabiliser les prix du pain, du sucre, du gaz butane et du blé. Le soutien aux prix hissera les dépenses globales du budget à 287,2 MMDH contre 271,2 MMDH anticipés.
Financement extérieure : le trésor maintien ses plans inchangés
Alors que les hausses de taux s’accélèrent à l’étranger, la BCE ayant relevé, le 8 septembre, son principal taux directeur de 75 points de base, le Trésor maintient son programme de financement extérieur inchangé. Après actualisation, il prévoit toujours la mobilisation de 40 MMDH à l’extérieur sur l’ensemble de l’année. À fin juillet, les tirages se sont limités à 6,5 MMDH.
La maîtrise du déficit budgétaire et l’équilibre entre le financement interne et externe seront nécessaires pour éviter un emballement des taux obligataires qui servent, par ailleurs, de référence au calcul des taux débiteurs. Malgré un déficit budgétaire sous contrôle et un taux directeur toujours à 1,5%, les taux obligataires ont entamé leur remontée depuis le début de l’année, rompant avec la tendance baissière depuis 2012. Les pressions haussières sur les courbes obligataires primaires et secondaires persisteraient d’ici la fin de l’année, prévoient les analystes.
Le scénario d’une hausse durable de l’inflation et la probabilité d’un tour de vis monétaire ressortent à un niveau élevé pour les analystes d’AGR qui prévoient, dans ce cas, une hausse systématique de la courbe des taux sur un horizon court terme. Par ailleurs, la capacité du Trésor à boucler les emprunts et les financements extérieurs, tout en mobilisant les recettes de privatisation, influencera aussi la courbe des taux.
Franck Fagnon / Les Inspirations ÉCO