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Banques : une résilience qui ouvre la voie à une nouvelle phase de croissance

Fitch Ratings souligne la solidité retrouvée des grands établissements bancaires du Royaume, portée par une rentabilité en hausse, un renforcement des fonds propres et une structure de financement saine. Ce repositionnement stratégique ouvre des perspectives majeures, à l’échelle nationale comme continentale, à condition que certaines réformes clés, notamment la création d’un marché secondaire des créances douteuses, soient mises en œuvre.

Portées par une rentabilité en nette amélioration, des fonds propres renforcés et une liquidité jugée saine, les grandes banques marocaines abordent 2025 dans une position stratégique favorable.

Dans une note récemment publiée par l’agence de notation Fitch Ratings dresse un tableau optimiste du secteur, mettant en avant la solidité de ses fondamentaux et la perspective de saisir d’importantes opportunités de croissance, tant au niveau national qu’africain. Un virage important pour des établissements longtemps bridés par la faiblesse de leurs coussins de capital.

Une rentabilité en rebond, malgré les risques
Après plusieurs exercices marqués par la prudence et des tensions liées au coût du risque, les résultats 2024 des sept plus grandes banques du pays traduisent un retour de la performance.

Selon Fitch Ratings, le résultat net agrégé a progressé de 22 % sur l’année, en dépit d’une augmentation des charges de dépréciation sur les prêts.

Ce rebond s’explique par une combinaison vertueuse : des revenus de trading solides sur les titres obligataires, une progression du produit net bancaire grâce à une hausse des marges d’intérêt, et une stricte discipline sur les coûts.

Ce regain de rentabilité offre au secteur une respiration bienvenue. Car si les banques marocaines ont toujours fait preuve d’une grande résilience, notamment lors de la crise sanitaire, leur capacité à investir et à croître restait contrainte par des marges limitées sur les fonds propres.

Capitalisation renforcée et marge de manœuvre accrue
C’est sur ce terrain que l’évolution est la plus notable. Historiquement, les banques ont fonctionné avec des niveaux de capitalisation proches des seuils réglementaires, ce qui limitait leurs capacités de déploiement à l’international ou sur de nouveaux segments de marché.

Fitch souligne que les émissions récentes de dettes subordonnées, combinées à une rentabilité améliorée, ont permis de renforcer les fonds propres, offrant désormais un “headroom” confortable pour accompagner une nouvelle phase de croissance. Ce regain de solidité financière pourrait s’avérer déterminant.

D’ici à 2030, plus de 100 milliards de dollars de financements pourraient être nécessaires pour accompagner les projets d’infrastructure du Royaume, soit l’équivalent de 61 % du PIB de 2024, estime Fitch Rating. Une manne que les banques les mieux positionnées – notamment celles ayant une forte exposition au secteur corporate – pourraient capter, en contribuant activement au financement de la transformation économique du pays.

Des perspectives africaines en toile de fond
Au-delà des frontières nationales, les groupes bancaires poursuivent leur stratégie de développement continental.

Dans plusieurs marchés d’Afrique de l’Ouest et centrale, où ils opèrent à travers des filiales, l’environnement opérationnel s’améliore. Cela pourrait entraîner une hausse des recouvrements et des reprises de provisions dans les comptes consolidés, ce qui viendrait encore améliorer la rentabilité globale du secteur.

Fitch estime ainsi que 2025 et 2026 pourraient marquer une période de transition vers un cycle de croissance plus robuste, à la fois soutenu par la demande locale et par l’accélération de l’intégration régionale. Une dynamique à surveiller de près alors que le Maroc s’impose de plus en plus comme un hub financier pour l’Afrique.

Un socle de financement solide
Autre atout de taille, le profil de financement du secteur reste sain. Les banques marocaines sont principalement adossées à une base de dépôts clients stable et peu coûteuse, consolidée par les mesures d’amnistie fiscale mises en place en 2024.

Ces dernières ont permis de réintégrer d’importants volumes de liquidités auparavant informelles dans le circuit bancaire. Résultat, une amélioration des ratios de liquidité, sans pression sur les coûts de financement.

Cette stabilité structurelle constitue un avantage comparatif à l’heure d’engager de nouveaux cycles de crédit. D’autant que la baisse du taux directeur engagée par Bank Al-Maghrib devrait soutenir la demande sans pour autant fragiliser les marges, ces dernières s’étant historiquement révélées stables dans le contexte marocain.

Une réforme structurelle attendue, le marché secondaire des créances douteuses
Fitch explique que pour autant, certaines réformes restent décisives pour libérer pleinement le potentiel du secteur. Parmi elles, l’éventuelle création d’un marché secondaire des créances douteuses (NPLs) est particulièrement attendue. Si elle se concrétise, cette mesure permettrait de transférer une partie du risque hors des bilans bancaires, et donc de libérer du capital réglementaire. Autrement dit, un levier supplémentaire pour accompagner la croissance sans alourdir les bilans.

Le constat de Fitch Ratings confirme un changement d’échelle pour les banques marocaines. Plus solides, plus rentables et mieux capitalisées, elles disposent désormais des ressources nécessaires pour se projeter dans l’avenir.

À condition toutefois que les réformes structurelles suivent, et que le climat économique demeure favorable sur les marchés domestique et africain. Le potentiel est là. Reste à le transformer.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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