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Adamou Labo Noma : “Il faudrait harmoniser la réglementation financière et les dispositions fiscales dans l’espace OHADA”

Adamou Labo Noma

La réglementation financière en Afrique n’est pas homogène. Elle évolue en fonction des pays et des communautés économiques régionales. Même au sein de la très réputée Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA), le domaine financier n’a pas encore fait l’objet d’un Acte uniforme. Un pas qui doit désormais être franchi, selon l’avis de l’expert-comptable nigérien, Adamou Labo Noma, Managing Partner du cabinet Kainuwa Audit & Consulting. 

Pensez-vous que la réglementation financière dans l’espace OHADA est au niveau des standards internationaux ?
Au préalable, il me semble utile de rappeler que l’OHADA a pour mission et objectif d’«harmoniser le droit des affaires en Afrique afin de garantir, au niveau de ses États membres, une sécurité juridique et judiciaire pour les investisseurs et les entreprises et, ainsi, propulser le développement économique tout en créant un vaste marché intégré afin de faire de l’Afrique un pôle de développement».

Au stade actuel de la législation commune applicable dans les 17 pays membres de l’OHADA, le domaine financier n’a pas encore fait l’objet d’un Acte uniforme. Il convient toutefois de préciser que les deux principales zones, qui comprennent la majorité des pays membres de l’OHADA, disposent chacune de sa propre réglementation financière.

Il s’agit de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC) qui comptent, respectivement, huit et six États membres, soit un total de 14 pays sur les 17 pays membres de l’OHADA.

Dans ces deux zones, la réglementation financière est à l’image des standards internationaux avec la présence des banques centrales, des commissions bancaires, et d’un marché boursier régional.

Qu’en est -il de la lutte contre la criminalité financière ?
Avec le développement de la criminalité transfrontalière (blanchiment de capitaux, terrorisme…), des institutions telles que la Cellule nationale du traitement des informations financières (CENTIF) en zone UEMOA et l’Agence nationale d’investigation financière (ANIF) en zone CEMAC ont été créées en vue de recevoir les déclarations de suspicion de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, voire d’engager des poursuites.

Ainsi, il existe une réglementation financière qui s’approche des standards internationaux dans l’espace OHADA mais elle ne relève pas, pour l’instant, de la législation commune de cette Organisation. Cependant, cette dernière a actualisé, en 2017, l’Acte uniforme relatif au système comptable en vigueur dans cet espace qui devient, désormais, Acte uniforme relatif au droit comptable et à l’information financière.

Parmi les nouveautés introduites dans le cadre de cette révision du système comptable, on peut citer l’obligation faite aux entités inscrites à une bourse des valeurs ou faisant appel public à l’épargne de produire, en sus de leurs états financiers individuels établis suivant le référentiel SYSCOHADA, ou selon le référentiel comptable spécifique à leurs activités, des états financiers aux normes internationales d’information financière (IFRS), afin de garantir la qualité et la comparabilité des données produites.

Peut-on parler d’une réglementation financière uniforme dans l’espace OHADA ?
Comme précisé ci-dessus, la réglementation financière dans les pays membres de l’espace OHADA se trouve écartelée entre les deux espaces sous-régionaux, UEMOA et CEMAC. Ces derniers utilisent la même monnaie, le franc CFA, qui n’est pas interchangeable entre les deux zones.

Ainsi, à ce jour, le domaine financier n’est pas encore couvert de manière spécifique par le dispositif normatif de l’OHADA. Cependant, une dizaine d’Actes uniformes, édictant des règles de droit unifiées dans plusieurs domaines de la vie des affaires, sont actuellement applicables dans les 17 États-membres de l’OHADA : droit commercial général, droit des sûretés, droit des sociétés commerciales et de groupements d’intérêt économique, procédures simplifiées de recouvrement et de voies d’exécution, procédures collectives d’apurement du passif, droit comptable et information financière, transport de marchandises par route, droit des sociétés coopératives, droit de l’arbitrage et médiation.

Est-ce que cette réglementation favorise l’investissement et les affaires dans les pays membres de l’OHADA ?
Bien que la réglementation OHADA n’ait pas encore couvert le domaine financier de manière spécifique, il est incontestable que cette réglementation favorise l’investissement et les affaires dans les différents pays membres. Cela constitue, d’ailleurs, l’un des objectifs de création de cette organisation.

Comme le précise le Juge Kéba M’baye, «l’OHADA est un outil juridique imaginé et réalisé par l’Afrique pour servir l’intégration économique et la croissance». Ainsi, l’harmonisation du droit des affaires au sein de ses États membres a permis de restreindre les barrières entre eux. Le problème de confrontation de textes ne se pose plus entre lesdits États. En effet, les divergences entre leurs textes décourageaient les investisseurs à franchir le pas de peur de faire face à deux législations différentes.

Les textes et les hautes juridictions étant les mêmes dans les pays membres, cela accentuera la célérité qui est un principe prôné dans le cadre des affaires. Cette volonté est couronnée par la création de la Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) qui a son siège à Abidjan, en Côte d’Ivoire.

Cette Cour siège en dernier et en cassation, et a le monopole de l’interprétation et de l’application du droit OHADA, en lieu et place des Cours suprêmes nationales. En outre, elle abrite un centre d’arbitrage institutionnel.

Ainsi, l’harmonisation du droit des affaires dans l’espace OHADA constitue une réponse à l’insécurité juridique et à l’insécurité judiciaire qui, jadis, entravaient l’essor des investissements dans les pays membres.

Quelles sont les améliorations à porter à cette réglementation ?
La mise en place d’une réglementation financière commune dans l’espace OHADA serait de nature à compléter le dispositif normatif actuel. Cela permettrait de disposer d’un espace juridique complet favorable à l’investissement et au développement des entreprises.

Pour ce faire, à notre avis, il serait nécessaire d’envisager d’harmoniser, à l’instar des autres domaines, la réglementation financière et les dispositions fiscales dans l’espace OHADA.

Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO



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