Nawal El Moutawakel : Une championne parmi les hommes

Wafasalaf lance un nouveau cycle de conférences dédiées à la mixité en tant que facteur de développement dans l’entreprise. Pour le premier rendez-vous, c’est Nawal El Moutawakel qui a prêté son image au combat féministe.
Wafasalaf arbore les couleurs du féminisme. Son édition 2016 du désormais traditionnel cycle des conférences, dont la première a été tenue le 7 mars au siège de la filiale d’Attijariwafa bank, est dédié cette année à la promotion de la mixité, facteur de développement dans l’entreprise. Et de toutes les figures du combat féministe que Wafasalaf a convié et programmé sur l’ensemble du mois de mars, c’est Nawal El Moutawakel qui a été choisie pour inaugurer l’événement militant. Accueillie par un tonnerre d’applaudissements, l’héroïne nationale a «sprinté» vers l’estrade, signant une entrée aussi originale que nostalgique pour ceux parmi l’audience qui s’en rappellent encore.
C’était en 1984, lors des Jeux Olympiques à Los Angeles, aux États-Unis. La Casablancaise de 52 ans en avait alors 22 lorsqu’elle y a remporté la médaille d’or du premier 400 mètres haies féminin de l’histoire. Personne n’y croyait, selon l’athlète, à l’exception de ses entraîneurs et du roi Hassan II, qui avait décelé son potentiel et remis une décoration à son retour d’Helsinki, à l’issue de sa participation, une année plus tôt, à la première édition des Mondiaux organisée dans la capitale finlandaise. De «Rookie», Nawal El Moutawakel était devenue une icône du sport féminin mondial en moins de 2 ans. Une ascension fulgurante, certes, mais non sans embuches : elle était la seule femme de sa délégation. Une situation incongrue avec laquelle l’athlète marocaine devait composer. L’hégémonie masculine était si prégnante qu’aucune disposition n’avait été prise pour l’accompagner dans son aventure.
Pas même une tenue sportive adéquate. La championne évoque cet épisode avec une pointe d’humour, comparant son accoutrement sportif à celui de Badou Zaki. Pire encore, pour le rassemblement des athlètes participant à cet événement historique, la Fédération n’a rien trouvé d’autre à mettre à sa disposition qu’un costume et une cravate. Cela dit, et même si l’on peut s’en indigner, c’est également grâce à cela que Nawal El Moutawakel a forgé son caractère de battante qui ne recule devant aucune adversité et qui conditionne son corps et son esprit pour faire de ses ambitions une réalité. Et ce caractère n’a pas pris une ride. La première femme arabe, africaine et musulmane à avoir remporté une médaille d’or olympique s’est frayé un chemin entre les hommes vers les commandes du Comité international olympique. Elle en est la vice-présidente, et membre du bureau exécutif.
Elle était également derrière l’ouverture (forcée) d’un pays comme le Qatar sur le sport féminin, condition imposée par ses soins pour autoriser sa participation. Nommée présidente de la commission de coordination des Jeux olympiques de Rio 2016, Nawal El Moutawakel ne néglige pas son ancrage national dans la vie associative, et même politique. Militante engagée et acharnée, elle était ministre de la Jeunesse et des Sports sous Abbas El Fassi (du 15 octobre 2007 au 29 juillet 2009), et avant cela secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires sociales, chargée de la Jeunesse et des Sports sous Abdellatif Filali (du 13 août 1997 au 13 mars 1998). Elle a rejoint les rangs du Rassemblement national des indépendants (RNI), sous la bannière duquel elle souhaite servir davantage son pays.