Éducation islamique : Les nouveaux manuels ne seront pas prêts pour la rentrée
5 millions d’exemplaires à imprimer en 20 jours ! La tâche s’annonce ardue pour les éditeurs et imprimeurs des livres scolaires. La refonte des manuels d’éducation religieuse présage de nombreux cafouillages à l’approche de la rentrée scolaire. Les éditeurs avancent fin septembre comme date butoir.
La tension est à son comble chez les libraires à l’approche de la rentrée scolaire. Alors que la période des achats des fournitures scolaires bat son plein, les grossistes et librairies du royaume ne disposent toujours pas de visibilité concernant la disponibilité des manuels d’éducation religieuse. La révision des programmes et manuels d’enseignements en la matière semble avoir pris du retard. Contactés par Les Inspirations ÉCO, de nombreux revendeurs affirment ne disposer d’aucune information concernant la disponibilité de ces manuels. «Lorsque nous avons démarré nos achats en juillet, nous n’avions aucune information concernant la disponibilité de ces manuels. Depuis, nous attendons toujours le retour de nos fournisseurs», indique Amina Mesnaoui, gérante de la librairie Porte d’Anfa à Casablanca. La plupart des librairies promettent à titre indicatif une disponibilité pour fin septembre, soit une vingtaine de jours après la date de rentrée officielle fixée par le ministère de l’Éducation nationale.
Pas avant fin septembre
«34 manuels sont concernés par cette réforme qui touchera pratiquement 11 niveaux de scolarité allant du primaire au baccalauréat. Le nombre total de tirages est estimé à environ 5 millions d’exemplaires», précise Ahmed Filali Anssari, président de l’Association marocaine des éditeurs (AME). Un volume qui donne des sueurs froides aux éditeurs de manuels qui devront accélérer la phase d’impression pour limiter les dégâts. À en croire l’Association des éditeurs, ces manuels viennent à peine d’être déposés auprès du Conseil supérieur des oulémas qui devra statuer sur leur contenu dans les jours qui suivent. «Nous ne savons pas combien de temps cette phase de délibération pourra durer. Nous estimons toutefois que les premiers «bons à tirer» seront remis aux alentours du 10 septembre», présage Anssari. Le délai accordé aux éditeurs en vue de concevoir les nouveaux manuels a manifestement été insuffisant. La décision de confier la conception des nouveaux manuels aux éditeurs n’a été actée qu’à fin juin. Le retard aura un effet domino qui devrait d’abord affecter les imprimeurs. «Cela se traduira sans doute par une baisse de la qualité d’impression et nous serons acculé à s’adresser à des imprimeurs étrangers pour combler la demande dans les temps», ajoute la même source. Il est à noter que le délai réglementaire fixé pour l’opération d’impression est normalement fixé à 18 mois.
6 MDH de pertes
La réforme des manuels d’éducation islamique devrait se traduire par un manque à gagner important chez les éditeurs, libraires et revendeurs qui n’ont pas encore écoulé leur stock des années précédentes. Les professionnels estiment les pertes à environ 6 MDH. «Aucune mesure de compensation n’est prévue», regrette Anssari. Toutefois, le manque à gagner pour les 10 éditeurs concernés par cette refonte devrait être compensé par les achats massifs du ministère de l’Éducation nationale dans le cadre de l’opération «1 million de cartables». «Comme il s’agit d’une refonte globale de tous ces manuels, le renouvellement ne portera pas seulement sur 30% des manuels comme pour les années précédentes mais couvrira 100% de ces fournitures», explique le président de l’association des éditeurs. Ceci permettra de combler un tant soit peu les pertes accusées par ces derniers, mais ne répondra vraisemblablement pas au manque à gagner supposé par les libraires et revendeurs.
40% d’impayés pour «1 million de cartables»
De surcroît, les librairies doivent faire face aux risques d’impayés de l’administration. «Nous traînons encore des impayés de la rentrée 2015 estimés entre 30 et 40% selon les régions», précise Anssari. L’opération «1 million de cartables» a été confiée pour la rentrée 2016 au département de l’intérieur, officiellement en vue d’éviter toute récupération politique à la veille du scrutin du 7 octobre prochain. Tout nouveau retard devrait être fatal pour les imprimeurs locaux. «En cas de défaut de paiement de la part de l’administration, un effet de ricochet touchant l’ensemble de la chaîne est activé, ce qui affecte en premier lieu les imprimeurs locaux», souligne le président de l’AME qui affirme qu’ «en cas de recours aux imprimeurs étrangers, ces derniers sont payés à l’avance ce qui suppose encore plus de retard pour les imprimeurs nationaux». Seule assurance pour les professionnels, le budget de l’opération pour la rentrée 2016 ne devrait pas être assuré (en partie) par des partenaires institutionnels (souvent source de retard dans le déblocage des budgets) mais par l’Initiative nationale de développement humain (INDH). Le département de Hassad aurait par ailleurs promis des délais de paiement situés entre 30 et 60 jours.
Jusqu’à 800 MDH de chiffre d’affaires
Selon l’Association marocaine des éditeurs (AME), le secteur des livres scolaires (y inclus les manuels pour écoles privés) représenterait aujourd’hui entre 700 et 800 MDH de chiffre d’affaires. L’opération « 1 million de cartables » n’y représenterait que 350 MDH : l’écart étant justifié par les prix importants des manuels du secteur privé. En tout et pour tout, il s’agit de 400 titres homologués couvrant tous les niveaux de scolarité, du primaire au baccalauréat.