Contrôle à l’importation : Fini la pagaille
Les bureaux de contrôle au port de Casablanca et de Tanger sont plus modernes et l’accueil amélioré avec des opérations fluides. 85% des dossiers seront traités en moins de 4 heures. Ce qui signifie aussi une réduction des déplacements des opérateurs.
«Le service à Casablanca était un souk… des dossiers par terre… les responsables désertaient les centres d’accueil et de contrôle au port de Casablanca et ailleurs. Des dossiers égarés avec ensuite obligation de les renouveler». C’est en ces termes que, dépités, les importateurs marocains de produits industriels ont qualifié un service devenu trop archaïque. Il fallait attendre 5 à 15 jours, après le dépôt d’un dossier, pour avoir l’avis conforme. Ces retards de traitement des dossiers étaient à l’origine de la hausse de 27% des coûts en 2015, notamment au titre des surestaries, ces frais supplémentaires payés par les importateurs aux armateurs des navires en rade.
Cette situation a provoqué une perte de crédibilité quant au délai de livraison. Pour toutes ces raisons et faute d’un système informatique, c’était tout simplement «la pagaille», terme que Moulay Hafid Elalamy, ministre de l’Industrie, n’a pas hésité à utiliser, tellement le dossier lui tenait à cœur. Pour y mettre fin, le ministre a lui-même mené cette petite réforme à l’impact immense sur la qualité, les délais et la fluidité des importations industrielles. Il a présenté, lundi à Rabat, les détails de la refonte du système de contrôle à l’importation. Plantons le décor. Le ministère est chargé du contrôle à l’importation des produits industriels. Il y a des lois qui encadrent ce contrôle et pas moins de 16 laboratoires de contrôle. Objectifs, protéger le consommateur contre des importations frauduleuses. L’exemple le plus percutant est celui des jouets pour enfants, dont l’importation doit obéir à des règles strictes. Il fallait donc remettre de l’ordre dans une procédure de contrôle devenue contraignante et surtout garantir une concurrence loyale.
Entre 2005 et 2015, le nombre des dossiers traités a augmenté de 250%. C’est Casablanca et Tanger qui accaparent la majorité des dossiers, avec respectivement 71% et 13% des opérations. «Nous avons relevé des dysfonctionnements importants et j’ai entendu la souffrance des opérateurs à tel point que c’est devenu inacceptable», a révélé Elalamy. C’est alors que ce dernier a commandé une enquête à l’IGF qui a montré l’ampleur des dysfonctionnements : Des locaux inappropriés, manque de logistique, absence de système d’information, de traçabilité des opérations, retards et fraudes dans les opérations de contrôle, absence d’archivage… Bref un état des lieux ingérable qui a nécessité une réforme de fond en comble.
Il fallait mettre en place un dispositif moderne pour protéger le consommateur et répondre aux attentes des opérateurs. La dématérialisation des opérations de contrôle à Casablanca et Tanger est aujourd’hui en vigueur. L’idéal serait à l’avenir de dédouaner sa marchandise sans se déplacer au port. La nouvelle stratégie implique le renforcement des ressources humaines via notamment le principe de rotation des équipes de contrôle et une meilleure répartition des tâches. Finalité : améliorer les flux internes pour éviter les pertes de dossiers avec des opérations de contrôle ciblées et moins d’engorgements au port. C’est aussi en cours d’implémentation, le prélèvement et l’acheminement des échantillons qui sera pris en charge par les laboratoires.
Les résultats seront transmis directement aux services de contrôle par voie numérique. Un système de contrôle crédible plus souple et plus efficace. Elalamy n’a pas manqué d’insister sur le respect des normes. «C’est de l’ordre du pénal quand vous rentrez des plaquettes de frein ou des bonbonnes de gaz non-conformes. C’est dangereux pour les Marocains. Je suis prêt à mettre ma vie en jeu pour lutter contre ces phénomènes», a-t-il tonné.
Aujourd’hui, l’objectif est de réduire le temps de traitement des dossiers, grâce notamment à Portnet. Ainsi 85% des dossiers seront traités en moins de 4 heures. Ce qui signifie aussi une réduction des déplacements des opérateurs du même niveau. Selon Jalal Benhayoun, DG de Portnet, il existe aujourd’hui des indicateurs précis qui montrent les insuffisances. L’échange de l’information est aussi important, car ce n’est qu’après 60 heures de l’arrivée du conteneur que l’importateur commence les démarches. Aujourd’hui, il y a 18.000 entreprises qui utilisent Portnet, avec comme ambition de passer au paiement électronique pour décongestionner le port.
Révision des normes
La généralisation de la nouvelle approche de traitement des dossiers d’importation, aux 15% des flux restants, devrait avoir lieu avant fin juin. Parmi les prochaines étapes figurent, également, l’optimisation des relations avec les laboratoires, une tarification des analyses plus transparentes, le choix aléatoire des laboratoires, la révision des normes et surtout la mise en place d’une plateforme de réclamation en ligne, également, vers fin juin. Pour Lahcen Hallou de l’Administration des douanes, il faut une volonté de la part des RH pour améliorer la compétitivité de l’entreprise et garantir la protection du consommateur. «Le chemin est encore long pour la dématérialisation de notre commerce extérieur», a-t-il expliqué. Toutefois, en 2017, la dématérialisation de la déclaration douanière sera complète. Car, comme il l’a souligné, le délai de dédouanement augmente dès que le contrôle est fait par l’ONSSA et les ministères de tutelle, d’où l’importance du guichet unique. Le responsable a espéré que la prochaine étape concernera aussi l’élargissement de la modernisation des procédures au bureau de Nouaceur.