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BREXIT : Vers un ALE avec l’Angleterre ?

L’impact économique du Brexit sur le Maroc est double, à la fois commercial et monétaire. Le royaume est appelé à revoir sa relation commerciale pour préserver son accès au marché anglais.

À la veille du référendum remporté par le «Brexit» à 51,9%, Abdellatif Jouahri se voulait rassurant. Pour Bank Al-Maghrib (BAM), le risque de la sortie britannique de l’Union européenne devrait être «limité» et impacterait la croissance du PIB du Maroc de seulement «0,1%». En revanche, la sortie future de la Grande-Bretagne, 12e client et fournisseur du Maroc, de l’UE devrait reconfigurer la relation commerciale entre nos deux pays, avec notamment la négociation d’un Accord de libre-échange (ALE) entre le Maroc et l’Angleterre.

Un ALE dans deux ans ?
26 MMDH, tel est le montant des échanges bilatéraux de biens et services entre le Maroc et la Grande-Bretagne. Les secteurs plus dynamiques en termes d’IDE en provenance de ce pays sont le commerce, l’industrie et l’immobilier. Ces investissements ne représentent que 1% des IDE britanniques vers le monde. Le solde commercial entre les deux pays est négatif en faveur du Maroc de plus de 1,1 MMDH. À juin 2015, la valeur des exportations marocaines était de 3,2 MMDH contre des importations de 4,3 MMDH. Dans l’immédiat, il n’y aura pas d’impact sur les relations commerciales entre les deux pays, puisque le processus de sortie de la Grande-Bretagne prendra deux ans de négociations.

À la fin de ce délai, les exportations marocaines vers la Grande-Bretagne devront être soumises à des droits de douane à l’entrée, et le même traitement douanier sera réservé aux importations. «Vu que le Maroc ne dispose pas d’accord commercial bilatéral avec ce pays, nous n’aurons plus d’accès au marché britannique sous les mêmes conditions que celles sous l’UE», explique Hakim Marrakchi, président de la Commission CGEM-International. Le certificat UER 1 ne sera plus valable à l’import et à l’export. «Cette situation doit pouvoir nous pousser à négocier un Accord de libre-échange avec ce pays», propose Marrakchi. Ilham Bennis, DG de la Chambre de commerce britannique au Maroc, plaide pour la même voie, sans préciser la forme de cet accord commercial. «À mon sens, il faudra réfléchir à développer et à renforcer davantage les accords bilatéraux avec le Maroc», déclare-t-elle aux Inspirations ÉCO.

Il reste qu’il faut préciser les contours de cet accord. Il est trop tôt pour savoir avec quels pays il faut négocier. La sortie de l’Angleterre ou de l’Écosse ne se confirmera qu’à l’issue du processus de négociation. «Pour le moment, nous ne savons pas encore qui va sortir et qui va rester. En revanche, un ALE est à signer avec l’Angleterre à terme. Le délai de négociation est celui de la date de la sortie officielle de l’Angleterre de l’UE», recommande Marrakchi de la CGEM.

Quelles conséquences sur le Maroc ?
En lien avec les échanges commerciaux, la dépréciation de la livre sterling devrait nuire à la compétitivité des exportations marocaines. «Nos exportations/importations vont subir la variation de la valeur de cette monnaie. De facto, nous risquons de perdre en compétitivité dans nos exportations», explique Mehdi El Fakir, consultant en stratégie et risk management.

D’ailleurs, dans la journée du 24 juin, la livre sterling était à son plus bas niveau depuis 1985. La livre a perdu 6,62% par rapport à l’euro en une demi-journée. Sur le plan financier, l’instabilité des marchés européens devrait peser sur la conjoncture au Maroc. Si pour le moment, la Bourse de Casablanca n’a pas réagi négativement à cette sortie, l’impact sur le marché financier est à mesurer sur le moyen terme. Pour l’heure, les Bourses européennes plongent. Le vendredi 24 juin était une séance noire pour la Bourse de Londres. Faute d’acheteurs, la moitié des valeurs du Footsie 100 n’ont pu être cotées à l’ouverture à la Bourse de Londres. Les valeurs financières ont chuté : Aviva a plongé de 18% après avoir cédé 34%, la Royal Bank of Scotland 17% et Barclays 17%.

Le grand risque pour le Maroc viendra de la zone euro, premier partenaire économique du Maroc. «Si l’UE sombre sur le plan de la croissance, c’est une demande en moins pour le Maroc», prévient Jouahri, wali de BAM. Mehdi El Fakir, lui, prévoit l’entrée de l’économie marocaine dans une zone de turbulences : «Nos partenaires économiques traditionnels devraient subir cette crise de plein fouet; un effet domino est à craindre sur l’économie nationale». Et Marrakchi de conclure : «Certes, il est trop tôt pour mesurer avec précision tous ces effets, mais on plonge dans l’inconnu», conclue-t-il. 

Ilham Bennis,
DG de la Chambre de commerce britannique au Maroc.

Le Maroc est considéré depuis 2012 comme pays prioritaire à fort potentiel économique par le gouvernement britannique. Pour cette raison, le Maroc pourra faire du Brexit une véritable opportunité pour confirmer ce statut. Quant à nos relations diplomatiques, n’oublions pas que le Maroc entretient avec le Royaume-Uni une histoire longue de plus de 800 ans et que Chrifa Lalla Joumala a développé un véritable caractère intuitu personae entre les deux royaumes. Sur le plan des investissements, le Maroc de par sa stabilité, son rang de hub africain et ses atouts économiques, restera une destination propice pour les investisseurs britanniques souhaitant se développer dans la région.

De même, les échanges entre les deux royaumes se basent sur des secteurs solides à fort potentiel et où la Grande-Bretagne apporte une grande expertise comme les services financiers, l’énergie et les mines, les énergies renouvelables, l’éducation, l’aéronautique, sans oublier le tourisme, le Maroc restant la destination privilégiée des Britanniques dans la région. Il y aura bien évidement une période de transition qu’il faudra gérer. À mon sens, il faudra réfléchir à développer et à renforcer davantage les accords bilatéraux avec le Maroc».


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