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« Le SMIG demeure sensiblement élevé au Maroc », selon Bank Al Maghrib

Bank Al-Maghrib (BAM) a publié une étude sur le salaire minimum au Maroc, ses faits stylisants et son impact économique. Les résultats indiquent que le ratio du salaire minimum sur le salaire moyen (indice de Kaitz) demeure sensiblement élevé au Maroc et que la distribution salariale est concentrée autour du SMIG, particulièrement durant les années marquées par une faible croissance.

Le Maroc a adopté la législation sur le salaire minimum aussitôt que 1.936 dans l’objectif de définir des niveaux de rémunération minima pour les salariés dans les milieux urbain et rural. Les décisions de relèvement du SMIG (Salaire minimum interprofessionnel garanti) et du SMAG (Salaire minimum agricole garanti), qui font office de salaires minima dans les secteurs non agricole et agricole, respectivement, ne suivent pas un calendrier préétabli mais découlent des échanges entre les différentes parties prenantes dans le cadre du dialogue social. Depuis le début des années 2000, environ une dizaine de hausses ont été implémentées sur le salaire minimum, toutefois, aucune publication scientifique analysant leurs effets sur l’économie marocaine n’a été effectuée.

Ainsi, l’objectif de l’étude publiée par BAM, est d’examiner l’impact des revalorisations du SMIG sur un ensemble de variables macroéconomiques d’intérêt pour le décideur. L’étude revient sur les critères de fixation du salaire minimum et ses effets macroéconomiques. Puis sur les faits stylisés qui caractérisent le SMIG au Maroc en lien notamment avec la distribution salariale, l’emploi, l’informalité et le chômage des jeunes. L’étude explore également les liens entre SMIG, salaire global et emploi. Enfin, une mise en simulation des effets de la hausse du SMIG sur l’économie marocaine est conduite en se basant sur un modèle plus structurel dérivé du modèle FSGM du FMI.

Les critères de fixation

Concernant les critères de fixation du salaire minimum, le rapport de l’Organisation international du travail (OIT) sur les systèmes de salaire minimum de 2014 a distingué différents critères utilisés dans les pays du monde. Cette distinction repose sur la mention explicite des critères au niveau des textes de loi, puisqu’il est souvent de coutume que la détermination de ces critères fasse l’objet d’articles spéciaux au niveau de la réglementation sur le travail (Code du travail, loi sur les relations professionnelles, …) (voir fig.1).

D’autres pays, par contre, ne mentionnent aucun critère au niveau de leur législation (modèle flexible). A titre d’exemple, le décideur dans des pays comme la Suisse, la Tunisie et le Fidji n’est pas tenu de respecter des contraintes réglementaires spécifiques pour fixer le niveau du salaire minimum. Par conséquent, ces pays sont considérés comme adoptant un modèle flexible dans la mesure où ils n’ont pas de restrictions sur les critères de fixation du salaire minimum.

Au Maroc, le salaire minimum est fixé par les autorités gouvernementales après consulation des partenaires sociaux (représentants des employeurs et employés). Il existe deux types de salaires minima actuellement selon le secteur d’activité : le Salaire minimum agricole garanti (SMAG) pour l’agriculture et le Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) pour le reste des secteurs de l’économie. L’objet de cette section est d’étudier l’incidence des revalorisations de ces salaires sur l’économie marocaine en reposant sur une analyse rétrospective et un benchmark international. Les constats relatifs aux liens entre le salaire minimum et les agrégats macroéconomiques explorés permettent de tirer les premières conclusions sur la période passée, qui seront par la suite confrontées aux approches économétriques et structurelles.

Le taux du SMIG au Maroc 

En 2019, le SMIG et le SMAG ont été respectivement de l’ordre de 2.698 DH et 1.903 DH mensuellement, soit un salaire horaire de 14.13 DH et 9.15 DH. Depuis leur instauration, les deux salaires ont été revalorisés en même temps et avec le même taux. Entre 1999 et 2019, ils ont été revalorisés dix fois à partir d’un niveau initial de 1.659 DH pour le SMIG et de 1.075 DH pour le SMAG mensuellement. Le taux de croissance annuel moyen du salaire minimum mensuel au Maroc sur la période 1999-2015 a été de 2.6% pour le SMIG et de 3.1% pour le SMAG1. Cette évolution a été conjuguée à une croissance annuelle moyenne du salaire moyen non-agricole de l’ordre de 3.6%, contre 5.3% pour le salaire moyen agricole, selon les données de la comptabilité nationale du HCP.

Au Maroc, le niveau du SMIG sur le salaire global peut être qualifié d’élevé. En corrigeant le salaire dans les secteurs non agricoles, l’importance du salaire minimum au Maroc reste un fait marquant (environ 43% du salaire moyen non agricole selon les données du HCP en 2015 et 59% du salaire moyen selon les données de la CNSS en 2014) pouvant indiquer des effets positifs sur les salaires mais néanmoins négatifs sur l’emploi. Ce constat est également appuyé par le benchmark international dévoilant que le salaire minimum au Maroc est relativement élevé à la fois par rapport au salaire moyen et par rapport au niveau du PIB par tête.

Et si le SMIG haussait de 5% ?

Une hausse du SMIG nominal de 5% entraîne, selon l’étude, une augmentation maximale de 0,7% du salaire réel non agricole sur le premier trimestre et une accélération de 2,7% du chômage dans le milieu urbain. La hausse initiale du salaire minimum se diffuse partiellement à la distribution salariale via des mécanismes de renégociation, ce qui explique l’effet persistent, quoique modéré, qui s’étale sur quatre trimestres. En réponse au renchérissement du coût de travail et afin de limiter les pertes d’emploi qui peuvent en résulter, la productivité des travailleurs augmente et affiche à son tour des hausses respectives de 0,53% et 0,48% sur les deux premiers trimestres. En définitive, si les revalorisations du SMIG au Maroc augmentent modérément les revenus salariaux, néanmoins, ceci vient au détriment d’une exacerbation du chômage urbain, limitée en partie par les gains en productivité.

Cette hausse aurait un impact négatif modéré, quoique permanent, sur l’économie marocaine. Néanmoins, les effets limités sur les principales variables macroéconomiques, contrebalancés, par ailleurs, par les implications adverses en matière d’emploi, tiendraient surtout à l’ampleur de la hausse initiale qui a été fixée à 5%. Pour des décisions de relèvement plus importantes, des effets de non linéarité  seraient à prendre en considération. En d’autres termes, la baisse du PIB qui serait induite par une hausse de 10% du SMIG serait plus que deux fois plus élevée que la baisse engendrée par une hausse de 5% de ce salaire.

Le salaire minimum, selon la conclusion de l’étude, devrait être appréhendé comme un instrument économique et social conduit dans le cadre d’une politique publique de redistribution plus globale. A ce titre, l’évaluation de l’optimalité du salaire minimum devrait tenir compte, en sus des indicateurs présentés dans ce travail, d’autres aspects liés notamment aux prestations sociales accordées aux employés, aux incitations fiscales en vigueur et au climat des affaires dont bénéficient les employeurs.

En recourant à des mesures relatives, telles que le salaire minimum sur le salaire moyen, le présent travail tente de capter en partie ces nuances en supposant que la rémunération moyenne reflèterait largement le revenu moyen nécessaire aux travailleurs pour satisfaire leurs besoins économiques et sociaux. Néanmoins, malgré cette approximation, il serait difficile de parvenir à appréhender d’autres aspects relatifs en l’occurrence à la qualité des prestations sociales et au climat des affaires. Des recherches plus approfondies s’avèrent nécessaires pour mieux orienter les actions publiques en la matière.



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