Éco-Business

TIC sur les boissons sucrées. Les industriels en rangs serrés

Ils font pression pour faire fléchir les conseillers afin qu’ils rejettent la hausse de 50% de la TIC sur les boissons sucrées et l’instauration d’une TVA de 7%.

Le lobby des boissons sucrées monte au créneau. Des négociateurs représentant les grandes entreprises du secteur ont pris contacts avec plusieurs groupes de la Chambre des conseillers, principalement celui de la CGEM, dans l’espoir de les gagner à leur cause. Objectif, les convaincre de rejeter l’amendement apporté à l’article 5 du PLF 2019 et adopté par les groupes de la majorité au sein de la première Chambre. Lequel amendement consiste à augmenter la TIC (Taxe intérieure sur la consommation) sur les boissons sucrées (limonades, jus, etc) de 50% et la mise en place d’une TVA de 7% à l’image de ce qui est en vigueur pour les boissons alcoolisées.

Les négociateurs des sociétés de boissons sucrées s’activent aujourd’hui pour préserver un privilège presque unique au monde. Celui de profiter de la subvention du sucre qui se chiffre en centaines de millions de dirhams, sans pour autant être obligé de payer une taxe compensatoire qui reste des moins chères dans le monde. En France, sur la base d’une étude menée par le sénat, la TIC sur les boissons sucrées est passée de 7 à 20 euros par hectolitres. Ce qui est considérable. Il s’agit de taxes comportementales censées avoir un impact direct sur les habitudes des consommateurs dans le sens d’une meilleure santé et une bonne hygiène de vie. En comparaison l’amendement des députés porte sur la revalorisation de la TIC de 30 à 45 DH/hectolitre (100 litres). Il est à noter que cette taxe est appliquée dès que le seuil du sucre dans la boisson dépasse les 5 g/100 ml. Les boissons énergisantes ne sont pas en reste, leur TIC devrait également passer de 500 à 600 DH/ hectolitre. En effet, après discussion, députés et gouvernement sont arrivés à un terrain d’entente au sujet des boissons énergisantes car la hausse initiale revendiquée par les premiers devait être de 250 DH.

Il faut rappeler que le lobby des boissons a mené la même opération auprès des parlementaires lors de la discussion du PLF 2018. L’ex-ministre des Finances, dans une tentative de débloquer la situation, avait alors promis de mener une étude pour mesurer l’impact de la revalorisation de la TIC sur le secteur. Laquelle étude n’a pas vu le jour. Aujourd’hui encore, les lobbyistes revendiquent une étude avant que toute décision ne soit prise. Ils comptent beaucoup sur les conseillers pour le caractère sectoriel de leur action, mais aussi sur les syndicats. Ils n’ont pas hésité d’ailleurs à brandir la menace de licenciements pour contrecarrer l’adoption d’une mesure fiscale qui grignoterait leur marge. Quant à la répercussion sur le prix d’achat, elle devrait varier entre 40 et 75 centimes si l’on compte une éventuelle application de la TVA en plus de la hausse de la TIC. Cette hausse des prix aura-t-elle un impact sur le comportement des consommateurs, comme l’aurait espéré Mostafa Brahimi, député PJD et parmi les initiateurs de l’amendement ? Difficile à trancher en l’absence d’enquête sur le sujet.  Toutefois, comme l’explique Brahimi, il y a au Maroc 2,5 millions de diabétiques dont 750.000 sont pris en charge par l’État. Par ailleurs, les maladies chroniques liées notamment à une consommation excessive de sucre, indique Brahimi, représentent 3% des cas pris en charge par la CNSS et la CNOPS mais sollicitent 50% de leurs budgets.

Plus encore, une étude du cabinet McKinsey publiée en 2014 a montré que le coût de l’obésité au Maroc est de 24 MMDH par an alors que le budget de la santé varie entre 12 et 14 MMDH. Il y a aussi un phénomène qui n’a pas échappé à la vigilance des députés dont certains pointent du doigt la subvention du sucre qui profite injustement aux industriels des boissons. D’aucuns ont fait entendre leur voix à propos de l’exportation de ces boissons produites au Maroc et subventionnées. Aujourd’hui, si les industriels arrivent à convaincre les conseillers à faire barrage à l’amendement de l’article 5, pourront-ils faire de même auprès des députés lors de la deuxième lecture du PLF 2019 ? Fort improbable, mais rien n’est jamais sûr. 



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