INDH III. Le grand tournant ?

Après le recadrage royal, l’INDH entame un nouveau virage en quête de plus d’efficacité et d’efficience. Dé-sormais, la nouvelle stratégie sera axée sur le ciblage des populations les plus démunies.
Quand le roi Mohammed VI a exprimé sa colère à propos de l’Initiative nationale du développement humain (INDH), on savait que la déception était à la hauteur des ambitions et des attentes. Aujourd’hui, les dérives de l’INDH ne sont un secret pour personne. Cela fait quelques années que la presse évoque des égarements des objectifs initiaux, et qu’agents d’autorité et hommes politiques en ont fait une rente qui vide l’Initiative de la noblesse de sa cause.
Du hard au software
Dans la phase I puis II, il était question de construire des infrastructures (écoles, routes, dispensaires, etc.). Cela ne sera plus le cas dans la configuration remodelée, et la phase III reposera sur un concept nouveau, à savoir la qualité de service. En quoi cela consiste-t-il? De source proche du dossier, il ne sera plus question de se substituer aux ministères. Dans ce contexte, il semble que le mot d’ordre donné est d’éviter de réitérer les erreurs du passé, notamment l’absence de ciblage et la dispersion des efforts. «Si les phases I et II ont enregistré des résultats positifs, elles auraient en revanche pu faire beaucoup mieux et optimiser la conception des projets parrainés», nous explique notre source. Deux objectifs majeurs serviront de base aux actions de l’INDH : mieux cibler les bénéficiaires afin d’optimiser le déploiement du budget de 18 MMDH. Il s’agit auss de faire des jeunes une «machine productive». «On sera loin de la politique des triporteurs», indique notre interlocuteur. Concrètement, un travail préalable sera fait, à savoir le recensement, l’identification et la quantification des besoins des jeunes. Interviendra ensuite la mise en œuvre d’un plan de sensibilisation à destination des jeunes désireux de se prendre en charge, et même de créer de la valeur pour d’autres.
Main tendue à tous
Le nouveau mode opératoire reposera sur des relais cohérents, intégrés et totalement investis dans la cause sociale. Exit donc le monopole de gestion, de réflexion et de mise en œuvre, comme c’était le cas auparavant. Le déploiement de la phase III s’appuiera ainsi sur un triangle (public-société civile-privé). Le public sera représenté par l’INDH, les ministères, l’OFPPT, l’ANAPEC… La société civile comptera, elle, des structures qui ont fait leur preuves comme Injaz Al-Maghrib, Réseau Entreprendre, en plus du monde associatif. Par privé, on entend le partenariat avec la CGEM, à travers le label RSE et le mécénat de compétences, valable également pour l’OCP à travers son réseau Skills. Plusieurs cadres du privé se mettent à la disposition de l’INDH, pendant un ou deux mois par an, dans le cadre d’un volontariat socialement responsable. «Ce capital immatériel sera un renfort précieux au capital technique et aux moyens financiers mobilisés pour cette cause qu’il va falloir gérer en bon père de famille», martèle notre source, qui insiste sur la politique de main tendue vers la société (public, privé, société civile) puisque l’initiative concerne le pays et non des personnes ou des agendas politiques. La consigne est claire. On ne peut se permettre de se tromper deux fois de cible. La phase III (2019-2023) est donc un test de survie. L’erreur n’est pas permise.
Espoir, confiance et nouveaux standards
La feuille de route tracée en haut lieu vise, au-delà des objectifs intermédiaires, à redonner espoir et et à restaurer la confiance. Car, dans un climat de défiance générale, seules les décisions concrètes peuvent calmer les tensions et redonner goût à la citoyenneté, notamment aux jeunes. Et c’est justement auprès de cette frange de la société que l’INDH III testera la solidité de ses fondements. D’ailleurs, ce s’effectuera conformément au nouvel index IDH de la Banque mondiale, qui reconfigure ses critères en les indexant au capital humain. Le nombre d’années de scolarisation, la qualité de l’éducation dispensée, l’état de santé à l’âge de 18 ans et l’aptitude à produire à ce même âge… Ces critères, qui seront désormais pris en compte dans le nouvel index, serviront de toile de fond à l’INDH III. Cependant, le plus grand défi de cette cruciale phase sera le niveau de mise en œuvre et la qualité de la gouvernance. Car c’est là que l’on pourrait gagner en efficacité. La nouvelle équipe de gestion de l’INDH paraît motivée, croit en les qualités de ses 450 agents déployés pour la supervision de la mise en œuvre. Il faut juste -peut-être- former et sensibiliser les agents d’autorité, important maillon du déploiement, au fait que la méthodologie d’approche a changé. En effet, ils devront traduire la nouvelle feuille de route sur le terrain. Cela promet. Wait and see, donc.