Le Maroc se positionne sur le continent africain
L’industrie pharmaceutique marocaine mise sur l’Afrique subsaharienne pour palier la stagnation des ventes de médicaments au Maroc. Quatre projets sont développés au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Rwanda par Pharma 5, Cooper Pharma et Sothema.
Les chiffres sont parlants : le continent africain ne produit que 3 % de sa production de médicaments, alors que 95 % des médicaments consommés en Afrique sont importés. L’essentiel de cette production se fait en Afrique du Sud et au Maroc, pays qualifiés de «véritables pharmerging» par l’agence française Proparco, filiale de l’Agence française de développement (AFD). Certains pays d’Afrique centrale continuent d’importer 99 % de leurs médicaments. L’industrie pharmaceutique marocaine se positionne sur ce marché émergent, promis à une belle croissance. «L’Afrique affiche un taux de croissance annuel moyen estimé de l’ordre de 10% entre 2010 et 2020», souligne Proparco.
Pour Ali Sedrati, président de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP), ce virage africain s’explique par une vision royale. «Le plus haut niveau politique du royaume encourage des partenariats de co-développement avec les pays de l’Afrique subsaharienne», rappelle-t-il. Le Maroc n’est pas le seul à viser un développement sur le continent. «L’Afrique ne représente qu’une faible part des ventes pharmaceutiques mondiales, son fort potentiel de croissance a conduit, depuis quelques années, les big pharma (multinationales pharmaceutiques) et les génériqueurs asiatiques à investir ce marché au côté des producteurs locaux», observe Proparco.
Le laboratoire Sothema était le premier à se lancer à la conquête du marché ouest-africain. Un projet d’unité industrielle est pensé en 2004 à Dakar au Sénégal pour un investissement de 65 millions de DH. En mars 2013, l’entreprise fondée par la famille Tazi, lance sa filiale West Africa Pharma (WAPH) à Dakar au Sénégal, en présence du roi Mohammed VI. En 2016, Sothema augmente le capital de sa filiale et porter sa participation à 92,82% du capital, soit 27,6 MDH. Ce premier projet ouvre l’appétit aux industriels nationaux qui se lancent à leur tour dans des projets en Côte d’Ivoire et au Rwanda.
Des projets pour 2019
«L’investissement dans des unités de fabrication en Afrique permet de développer un tissu industriel sur le continent, ainsi qu’une meilleure accessibilité des médicaments et un transfert de technologie», indique le président de l’AMIP. Ces projets font l’objet d’un suivi de la part du ministère des Affaires étrangères et de la coopération. En juillet 2018, le site du projet de Pharma 5 à Abidjan a été visité par la secrétaire d’État aux Affaires étrangères, Mounia Bouceta. «Une visite qui s’inscrit dans le cadre du suivi des projets demandés par Sa Majesté. Les travaux de l’usine avancent bien et sera opérationnelle en 2019», précise le laboratoire. La construction de ce site industriel a démarré en décembre 2017. L’investissement initial est de 100 MDH alloué aux infrastructures et équipements. Cet investissement permettra la création de 200 emplois directs (dont 20% de cadres) et 2 000 emplois indirects. Dans un premier temps, cette unité industrielle produira des médicaments dans 5 classes thérapeutiques : l’infectiologie, la virologie, la gynécologie, l’antalgie et l’antibiothérapie. «Dans un second temps, la nouvelle unité ambitionne de développer l’exportation de ses médicaments vers les pays de la sous-région en jouant le rôle de hub régional», prévoit Pharma 5.
Pour sa part, Cooper Pharma poursuit le développement de deux projets industriels, le premier au Rwanda et le deuxième en Côte d’Ivoire. Le premier fait suite un mémorandum d’entente signé entre les deux pays lors de la visite royale à ce pays de l’Afrique de l’Est. Sa livraison est annoncée pour 2019, Le deuxième projet concerne le marché de l’Afrique de l’Ouest avec l’unité de la Côte d’Ivoire, également prévu pour 2019. Le groupe prévoit la réalisation dans sa phase 1 d’une unité pharmaceutique spécialisée dans la fabrication de formes liquides (sirops), puis dans sa phase 2 de formes solides. À noter que les travaux pour ce site avaient démarré en 2016. Ces deux projets cadrent avec la volonté d’externalisation du laboratoire marocain qui souhaite atteindre 15% de son chiffre d’affaires de produit fabriqués à l’export.