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Plaidoyer pour améliorer les voies de recours

Il faut compter 19 mois pour qu’une décision soit rendue à propos d’un litige opposant le contribuable à l’administration fiscale. Un projet de loi en préparation pour améliorer les moyens et consacrer l’indépendance de la commission nationale du recours fiscal.

Le contrôle fiscal n’est jamais vécu par l’entreprise comme une épreuve facile. C’est avant tout un sujet d’inquiétude dans la mesure où les voies de recours sont rédhibitoires, lentes et source de stress pour les patrons; raison pour laquelle, 90% des litiges qui opposent l’entreprise à l’administration fiscale se soldent par un accord à l’amiable. Pour Abdelkader Boukhriss, président de la commission fiscale de la CGEM, c’est un constat d’échec qui montre que l’entreprise n’a pas confiance dans les voies de recours. Le responsable intervenait à l’occasion d’une journée d’étude organisée à Bouznika par Artemis, avec la participation de la commission nationale de recours fiscal (CNRF), la direction générale des impôts (DGI) et l’Ordre des experts comptables au Maroc (ORC). En effet, selon Mohamed Namiri, président de la CNRF, il faut compter 19 mois avant qu’une décision définitive soit bouclée; ce qui donne du fil à retordre aux chefs d’entreprises qui préfèrent plutôt se concentrer sur leur business que perdre du temps et de l’effort à suivre l’évolution d’un litige fiscal. La CNRF, sorte de tribunal, qui émet des décisions administratives en matière de litiges fiscaux, constitue, en fait, un contrepoids de l’administration fiscale. En effet, ces décisions peuvent annuler ou rectifier des décisions de redressement émanant du fisc, mais souffrent de plusieurs anomalies, et une perception qui fait douter de son indépendance. Il faut savoir que ses membres sont des fonctionnaires détachés du ministère des Finances. Pour Namiri, il est temps de mettre fin à cette ambiguïté par la force de la loi, afin d’ériger clairement et en toute transparence, le caractère indépendant de cette institution. À ce propos, un projet de loi est en train d’être finalisé par la commission. Il devrait préciser les prérogatives de la commission, la doter de plus de moyens en augmentant le nombre des commissions locales, des membres et des juges, présidents lesdites commissions. La commission a besoin d’être requinquée lorsqu’on apprend qu’elle a émis pas moins de 987 décisions en 2017 et tenu 189 réunions ; à raison de 5,2 réunions pour statuer dans un seul recours. Le besoin de plus de logistique et de moyens humains s’avère dès lors nécessaire pour ne pas dire urgent. Le responsable a mis également en exergue ce qu’il a qualifié de vice de forme lorsque l’administration fiscale saisit la justice pour faire recours contre les décisions de la commission sans citer celle-ci comme partie. Pour que la justice suive son cours normal et puisse statuer sur tous les éléments du dossier, la présence d’un représentant de la CNRF devient obligatoire. Pour sa part, Abdelmajid Faïz, président de la commission fiscale de l’Ordre national des experts comptables, a souligné qu’il est aujourd’hui nécessaire de faire une évaluation de la procédure de recours pour une relation équilibrée entre le contribuable et l’administration fiscale.

Revoir la composition des CLT
Il faut reconnaître que depuis l’avènement d’Omar Faraj à la tête de la direction générale des impôts (DGI), plusieurs chantiers ont été lancés en matière de simplification des procédures, d’amélioration de l’accueil et de digitalisation des services. Toutefois, certains aspects techniques liés à la compétence et à la responsabilité des agents fiscaux en matière d’évaluation des montants de redressement fiscaux, méritent réflexion. À plus forte raison, ces montants n’ont souvent rien à voir en termes de valeur avec des montants nettement moins importants décidés à l’issue d’un accord à l’amiable. Faïz propose aussi de revoir la composition des commissions locales de taxations (CLT) dont les décisions sont exigibles. Il recommande dans ce sens de les transformer en commissions régionales avec des moyens susceptibles de rendre leurs travaux et décisions acceptés par les contribuables. Pour Boukhriss, les CLT manquent de professionnalisme; à telle enseigne qu’il devient difficile de faire accepter un redressement fiscal dans ce contexte. Pour lui, la complexité du code des impôts, «truffé d’articles mal rédigés» joue aussi en faveur de cette relation de méfiance vis à vis de l’administration fiscale. S’y ajoute l’instabilité législative consacrée par des décisions fiscales qui changent à chaque Loi de Finance ou par le biais de circulaires parfois inopinées.


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