Tala Hadid au pays des Amazighs
Tala Hadid dévoile un documentaire plein d’âme ce lundi soir au Festival national du film de Tanger. «House in the fields» est un film qui suit le parcours de jeunes filles d’un village rural dans la région sud-ouest du Haut Atlas.
«Ces changements concernent le Maroc, pas nous, pas ici» est une phrase qui résonne depuis la bouche d’une enfant marocaine, qui habite dans un village isolée dans la région sud-ouest du Haut Atlas. «L’histoire millénaire du peuple Amazigh a été pour la plupart, racontée, conservée et transmise par des conteurs sous une forme orale parmi les communautés pastorales parlant la langue Tamazight». Un village figé dans le temps et dans les traditions qui ne semble pas être touché par l’évolution socio-politique du pays.
La réalisatrice ose l’intimité avec Fatima et Khadija, deux jeunes filles dont les rêves sont rattrapés par la réalité. L’une se voit avocate, et. l’autre qui a 19 ans, est fiancée depuis 2 ans et «doit» se marier dans quelques mois car c’est «un devoir». On suit la préparation du mariage selon 3 saisons, 9 mois, le temps d’une naissance ou d’une renaissance, celle de vivre à Casablanca avec un mari qu’elle ne connaît pas . «Je souhaite quitter ici, aller à Casablanca, travailler même. Enfin s’il me le permet, je ne sais pas comment il est», avoua Fatima qui a du arrêter ses études et se mariera comme prévu et selon la tradition. La plus jeune, Khadija, est triste de voir sa soeur partir loin d’elle et a l’espoir de ne pas être rattrapée par la réalité de son devoir de femme.
Des témoignages poignants, des phrases chocs, des regards qui en disent longs, des silences qui veulent tout dire, des fous rires qui ne nous laissent pas de marbre. Tala Hadidi ose les plans serrés, sa caméra effleure presque ses actrices pour capter toute leur fraîcheur et leur intensité. La photographie est incroyable mais on n’en attend pas moins de cette capteuse d’images. Tout est à sa place, la caméra capte l’essentiel et nous propose des plans séquences qui ressemblent souvent à un shooting photo. La beauté des paysages nous embarque, le travail sur la lumière est parfait. On rit, on est attendri, on est même oppressé pendant cette scène de mariage forcée qui a des airs de sacrifice. Ce qui peut déranger c’est la limite pas assez claire entre la fiction et le documentaire. Souvent, on a l’impression de ne pas être en face de témoignages mais d’une scène entre deux actrices qui récitent un script. La sincérité finit par convaincre et cette bonté et beauté naturelle qui émanent de tous les personnages font de ce documentaire une des plus beaux rendez-vous de ce festival.