Ventes de voitures neuves : Une croissance faible, mais réelle
Signe d’une dynamique enclenchée dans la durée, le marché du neuf s’est clôturé sur un volume record pour la troisième année consécutive. Si certaines marques ont su canaliser la demande, d’autres ont vu la leur régresser. Analyse…
S’il n’a pas connu de croissance phénoménale, ni même à deux chiffres, le marché national de la voiture neuve s’est tout de même très bien comporté en 2017 puisqu’il a atteint, une année de plus, un seuil record. Ainsi et à la lecture des statistiques de ventes collectées et communiquées par l’Association des importateurs de véhicules automobiles au Maroc (AIVAM), ce sont précisément 168.593 véhicules neufs (tous segments confondus) qui ont été immatriculés l’an dernier, ce qui correspond à un petit sursaut de 3,3% par rapport à l’année 2016. Le marché a même subi un repli de 2% en décembre et cela pour de multiples raisons comme nous l’explique le président de l’AIVAM dans la colonne ci-contre. Malgré cela et en jouant avec une calculette, ce volume fait qu’il s’est vendu un peu plus de 19 véhicules neufs par heure en 2017, soit un niveau historique dans le royaume.
Le VUL en haut de forme
Constituant toujours la colonne vertébrale du marché avec 155.213 unités vendues, soit une part de 92%, les voitures particulières (VP) ont quasiment stagné, avec tout juste +1,9% par rapport à 2016. Un frémissement qui contraste avec le boom des véhicules utilitaires légers (VUL) dont la demande a bondi de 24% à 13.380 unités. Dans le détail des chiffres, on constate que le segment utilitaire n’est plus la chasse gardée des grandes marques asiatiques qui, à l’exception de Nissan et Mahindra, y ont toutes enregistré une variation négative par rapport à 2016. Tout l’inverse pour les labels Ford, Renault, Fiat et Dacia qui arrivent en tête dans les ventes de VUL et y enregistrent tous une hausse à deux chiffres. L’explication est claire : les petits fourgons et vans utilitaires européens ont pris le dessus sur les pick-up japonais comme nous l’expliquons dans un article suivant (lire page 23). On notera au passage qu’après Casablanca et Rabat, c’est la ville d’Agadir qui constitue le troisième plus gros débouché commercial pour les utilitaires.
Dacia-Renault, le duo à 42% de parts de marché
Fort de ses 70.540 véhicules livrés sur les douze derniers mois (!), le groupe Renault Commerce Maroc (marques Renault et Dacia) enregistre une part de marché (PDM) de quasiment 42% (41,84% précisément), soit un gain de 4 point par rapport à 2016. RCM tire ainsi vers le haut tout le marché par rapport auquel il a enregistré une croissance 4 fois supérieure en 2017 avec une hausse de 14,3% de ses ventes. Si la marque roumaine reste leader du marché avec près de 47.000 ventes l’an dernier (+7,9%) et une PDM de 27,8%, le label Renault se maintient à la deuxième place, totalisant près de 23.700 ventes et signant une croissance à deux chiffres (+29,3%). Sept produits des deux marques du groupe Renault dominent le Top-10 et certains d’entre eux leurs segments respectifs. C’est le cas de la Clio qui s’est écoulée à 11.441 unités, se permettant ainsi le grand luxe de détrôner la Dacia Sandero (10.960). La Mégane arrive aussi en tête des ventes parmi les compactes (5 portes), avec 1.947 unités, soit une centaine de plus que sa rivale et challenger Ford Focus (5p). De son côté, le Duster est toujours le modèle le plus vendu de sa catégorie (SUV) à l’instar des Dacia Logan, Lodgy et Dokker. Au-delà de ses bons produits, la filiale commerciale du losange tire ses bons résultats de la stratégie mise en place par son directeur général, Éric Basset. Depuis son arrivée à la tête de RCM en septembre 2016, cet homme qui compte 26 ans de carrière chez Renault n’a eu de cesse de booster sa filiale en mettant l’accent sur le travail sérieux des collaborateurs, la satisfaction du client et l’engagement du réseau. Sur ce dernier registre, RCM peut se targuer de plusieurs indicateurs positifs tirant profit de sa couverture territoriale et récoltant le fruit de ses actions menées avec les concessionnaires disons, sérieux et «engagés». Ainsi et à l’exception de quelques villes comme Kénitra où RCM a décidé, à juste titre, de résilier son contrat avec son concessionnaire, la force de frappe commerciale du losange est déployée aux quatre coins du royaume. Si bien que même dans de petites villes comme Errachidia et Safi, ses ventes cumulées (Dacia+Renault) ont atteint respectivement 431 et 637 véhicules !
Ford, un repli inévitable
Toujours troisième au classement général, l’importateur de Ford a clôturé l’année 2017 sur une baisse de 12% à environ 14.500 unités vendues. Les raisons de ce repli sont à chercher du côté des VP et plus particulièrement la gamme Fiesta. Une citadine bourrée de qualités, certes, mais arrivée en fin de cycle de vie et opérant dans un segment ultra-disputé par une concurrence active (Renault Clio, Dacia Sandero, Peugeot 208, Toyota Yaris, Nissan Micra, Seat Ibiza, Volkswagen Polo, Citroën C3, Fiat Punto…). D’où des ventes conséquentes (plus de 7.400 unités), mais inférieures de 7% à celles de 2016. Si sa PDM s’est légèrement écorchée (-1,5% à 8,58%), la marque à l’Ovale bleu a su tout de même préserver quelques acquis comme son leadership du côté des VUL où la marque a progressé de 25% grâce à une gamme Transit diversifiée et ayant littéralement assis sa suprématie.
Volkswagen, une nouvelle année record
À elles seules, les trois premières marques du pays détiennent 50,4% du marché national dans lequel la marque Volkswagen, quatrième au classement général est l’une des grandes gagnantes au terme de l’année 2017. Après avoir explosé son compteur en décembre, l’importateur du premier constructeur européen a franchi pour la première fois au Maroc la barre des 12.000 véhicules vendus et badgés du logo VW. Un volume en hausse à deux chiffres (+12,44%) par rapport à 2016 et autorisant à la marque une PDM de 7,16%. Entre autres performances réalisées, les équipes de la CAC ont pu livrer pour la première fois plus de 5.000 Volkswagen neuves à Casablanca. Du coup et dans la capitale économique, la marque allemande a terminé l’année à la 3e place derrière le duo Dacia-Renault et devant Ford. Mieux encore, Volkswagen est la deuxième marque la plus prisée à Tanger et ses modèles performent dans leurs segments respectifs. C’est le cas de la Passat qui s’est adjugée le leadership dans la catégorie des berlines moyennes. Du côté des compactes, la Golf a réussi à intégrer le podium à la 3e place, tandis que la Jetta ferme le top-5. À leurs tours, les Tiguan et Touareg arrivent respectivement 4e et 8e parmi les SUV, quand la Polo maintient sa présence dans le top-10 des citadines polyvalentes.
Hyundai, 1er label asiatique au Maroc
Fermant le Top-5, Hyundai termine l’année dans le vert (+5,2%) à un peu plus de 11.000 véhicules vendus, ce qui lui autorise une PDM de 6,5%. S’agissant des best-sellers du premier label automobile coréen, il est bien loin le temps où la i10 constituait le gros des ventes de la marque. Aujourd’hui, c’est le Tucson qui est le modèle le plus vendu chez Hyundai Maroc, avec 3.342 immatriculations l’an dernier, ce qui en fait aussi le troisième dans son segment. L’Accent s’est également bien comportée, totalisant 2.300 ventes en 2017 et se plaçant à la 2e place de son segment (citadine Sedan) derrière la Dacia Logan et devant la Peugeot 301. Du côté des VUL, Hyundai peut aussi se flatter d’un volume respectable (1.065 unités) et plus encore pour ce qui est de sa PDM (8%).
Fiat plonge, Nissan performe
Sixième au classement, la marque Peugeot a réussi à maintenir un volume supérieur à 10.000 unités, mais ne clôture cependant pas son bilan commercial dans le vert (-1,7%). La variation est encore plus négative pour Fiat (-18,4%), 7e marque au classement et qui, malgré un bon mois de décembre, n’atteint guère les 8.500 livraisons annuelles. Unique marque à réaliser une variation positive dans la seconde moitié du Top-10, Nissan achève l’année à près de 7.000 ventes, après un mois de décembre historique et non loin des 1.000 livraisons ! Outre une PDM supérieure à 4%, l’autre grande marque du groupe Auto Hall a non seulement réussi à maintenir le Qashqai au 2e rang des SUV les plus vendus au Maroc (derrière le Duster), mais aussi à installer la Micra parmi les 5 citadines importées les plus vendues au Maroc. En neuvième place, Citroën achève l’année en légère baisse, à un peu plus de 6.500 unités dont quelques 900 portent le nom de C3. Il faut d’ailleurs y voir une performance dans la mesure où, hormis cette citadine, la gamme de la marque aux chevrons est, globalement, vieillissante. Fermant le Top-10, Toyota du Maroc a frôlé les 4.900 immatriculations l’an dernier, soit un volume en baisse annuelle de 6,8%. L’importateur du géant nippon a notamment capitalisé sur ses best-sellers à savoir, les Rav4, Prado et C-HR pour ce qui est des SUV, ainsi que les Corolla et Yaris du côté des berlines. Cette dernière est d’ailleurs 5e de son segment et pour la première fois chez Toyota du Maroc, le modèle le plus vendu de la gamme, conséquence de tout un travail de fond opéré sur le plan marketing. Enfin, dans le reste du marché, signalons les contreperformances de certains labels comme Jaguar (-41,8%), Kia (-33,2%), Jeep (-29,98%), Land Rover (-29,88%), Mini (-26,4%) ou BMW (-6,4%) ainsi que les bons chiffres de quelques autres tels que Skoda (+20,3%), Audi (+19,18%), Seat (11,54%) et surtout Mercedes (+25,61%) qui signe une nouvelle année record avec près de 4.000 ventes, ce qui la place en tête des marques premium.
Adil Bennani
Président de l’AIVAM
Les Inspirations ÉCO: À votre avis, pourquoi les ventes ont-elles baissé en décembre?
Adil Bennani: En fait, c’est sur tout le dernier quadrimestre que l’on remarque une baisse de l’activité, et cela est dû à plusieurs facteurs. Il y a d’abord un léger ralentissement de la demande sur plusieurs segments. Il y a ensuite l’arrêt de la subvention sur les taxis qui est intervenu vers mi-octobre, ce qui a impacté les ventes de novembre et décembre. Le dernier facteur concerne la création des nouvelles sociétés de location automobile qui n’ont désormais plus le droit à des exonérations. Or, il y a un nombre non négligeable de ventes faites par de petits loueurs en fin d’année et qui n’ont pas eu lieu l’an dernier.
Où en êtes-vous dans le processus de dématérialisation des immatriculations?
La dématérialisation a déjà démarré en phase pilote. Des formations ont eu lieu chez certains opérateurs, tandis que d’autres sont en train de suivre la démarche en y adhérant petit à petit. Maintenant, nous allons attendre la fin de cette phase pilote qui devrait s’achever à la fin du premier trimestre 2018 pour voir où on en est vraiment. Et pour le moment, cela fonctionne bien; il faut juste que la majorité des opérateurs y souscrive, ce qui se fera progressivement.
Croyez-vous que la dynamique du marché s’étendra au-delà du salon, qui se tiendra plus tôt cette année?
Je pense que cette dynamique sera maintenue pour la simple raison que nous sommes dans un marché qui est toujours dans sa phase d’équipement. Le Maroc est encore très faible en taux de motorisation et l’on voit aujourd’hui que le marché est en train de croître par le bas et essentiellement par la citadine, sous l’effet des prix accessibles pour une nouvelle classe sociale éprouvant un besoin de mobilité.