Création de la richesse : La diversification de l’économie s’impose
Le Maroc n’a pas su utiliser de manière optimale l’aubaine démographique. En effet, la baisse des taux d’emploi tire vers le bas la croissance des niveaux de vie de la population qui demeure modérée ne dépassant pas 3,2% au cours de la période 2001/2015. C’est l’un des principaux constats de deux études du HCP sur les sources de création de la richesse au Maroc et sa répartition.
Le Maroc est appelé à diversifier son économie pour accroître la productivité, promouvoir l’emploi et améliorer ainsi le niveau de vie de la population. Cette diversification devra concerner aussi bien les secteurs non agricoles que l’agriculture et les services. En parallèle, le marché de l’emploi devra être souple et flexible. Un objectif tributaire de la mise en œuvre de réformes structurelles. C’est en tout cas ce que recommande le Haut-commissaire au plan Ahmed Lahlimi lors de sa présentation des grandes lignes de deux études sur les sources de création de la richesse au Maroc et sa répartition. Les résultats de ces études devront interpeller les pouvoirs publics d’autant plus que la réflexion est en cours sur la révision du modèle de développement au Maroc. Aujourd’hui plus que jamais, il s’avère on ne peut plus nécessaire de saisir toutes les opportunités pour pouvoir atteindre l’émergence économique tant souhaitée par le royaume. Or, le Maroc n’a pas su tirer profit de l’aubaine démographique. Des disparités existent entre les secteurs ainsi que les milieux rural et urbain. Dans les secteurs qui enregistrent une productivité élevée, le taux d’emploi demeure faible (agriculture, industrie) alors que dans ceux dont la productivité est faible comme les services et le BTP, le taux d’emploi est élevé. Les conclusions des experts du Haut-commissariat au plan se sont basées sur l’étude des déterminants structurels de l’évolution du PIB par habitant en vue de déterminer la contribution de ces facteurs à la croissance de la valeur ajoutée par habitant, notamment l’effet démographique, l’effet emploi et l’effet productivité du travail. Il en ressort une forte contribution de la productivité du travail à la création de la richesse. Le PIB par habitant s’est accru de 3,2% par an entre 2001 et 2015 en raison de l’augmentation de la productivité du travail puis de l’effet démographique alors que le taux d’emploi a connu une baisse continue durant cette période comme en témoignent les chiffres ayant trait à la contribution de chaque facteur : 92,5% pour la productivité du travail, 19,8% seulement pour celle de l’effet démographique tandis que la contribution de l’effet emploi a été négative de 12,2%. Alors que la productivité du travail s’est accrue durant cette période de 2,9% par an en moyenne et le ratio de la population en âge d’activité à la population totale a augmenté de 0,4 point en moyenne annuelle, le taux d’emploi a été marqué par une baisse de 0,2 point en moyenne par an.
Baisse des taux d’emploi
La croissance du PIB par habitant a connu un ralentissement entre les périodes 2001/2008 (avant la crise) et 2008-2015, passant respectivement de 3,6% par an à 2,7% à cause de la régression du taux d’emploi dans certains secteurs. Dans l’agriculture, forêt et pêche, le taux d’emploi a baissé de 20,1% en 2001 à 16,7% en 2015. Au niveau de l’industrie, ce taux est passé de 5,8% à 4,8%. Par contre, le secteur des services et celui du BTP ont échappé à cette tendance baissière, enregistrant des améliorations des taux d’emploi de 16,2% et 3% en 2001 à 17,3% et 4% en 2015. Aussi est-il nécessaire d’ériger la promotion de l’emploi au cœur des préoccupations, notamment dans les secteurs qui connaissent des baisses continues du taux d’emploi impactant ainsi négativement le niveau de vie de la population. Durant la période de l’étude, les baisses des taux d’emploi dans le secteur de l’agriculture, la forêt et la pêche et dans l’industrie se sont répercutées négativement sur le niveau de vie de la population avec respectivement -20% et -5,2%. C’est l’amélioration de la productivité du travail qui a permis d’absorber cet effet de baisse du taux d’emploi. En effet, le secteur agricole a contribué pour 25% à l’amélioration du PIB par habitant et l’industrie pour 20,4% tandis que le reste des secteurs d’activité (BTP et services) ont contribué pour 15,8%. Paradoxalement, l’accroissement de la productivité dans l’agriculture et l’industrie durant 2008/2015 a été favorisé par les pertes d’emploi qu’ont connues ces secteurs.
Lente transformation du tissu productif
L’étude pointe du doigt la lente transformation du tissu productif national. Il faut dire que la croissance de la productivité du travail de l’économie nationale est restée modérée avec une moyenne de 3% par an. La mobilité de l’emploi intersectorielle s’est faite globalement entre les activités de faibles productivités. Par ailleurs, malgré l’amélioration significative de l’intensité capitalistique, les structures économiques n’ont pas encore été marquées par de profondes mutations. Aussi, le niveau de leurs productivités reste-t-il faible limitant, de ce fait, les avantages qu’aurait procurés la mobilité de l’emploi d’un secteur à un autre.
Surplus de productivité
Le HCP a mis aussi l’accent sur le partage de la valeur ajoutée et du surplus de productivité entre les facteurs de production. Dans le secteur agricole, le surplus de productivité est majoritairement redistribué aux détenteurs des facteurs de production et en particulier aux détenteurs du capital. S’agissant des secteurs non agricoles, le surplus de productivité ne joue qu’un rôle marginal dans la croissance de la valeur ajoutée car la répartition de ce surplus montre que le facteur travail salarié en est la base. Au niveau de l’économie nationale dans son ensemble, le surplus de productivité a été faible ne dépassant pas 1,2% en moyenne annuelle durant 2000/2014. C’est plutôt le travail salarié qui a connu une amélioration de son surplus de 1,1% par an, suivi du travail non salarié (0,6%) alors que le surplus de productivité du facteur capital s’est inscrit dans une trajectoire négative avec -0,4% durant la période 2000/2014. L’amélioration du surplus de productivité du travail plus que celui de la productivité de l’économie nationale a contribué à la hausse de la part de la rémunération du travail dans la valeur ajoutée nationale par 0,7 point en moyenne annuelle.