Maroc-USA : Le partenariat commercial en zone de turbulence

Pas ou peu d’évolutions ont marqué les échanges commerciaux entre le Maroc et les États-Unis ces dernières années. La nouvelle politique commerciale de l’administration Trump laisse planer quelques doutes quant à l’avenir du partenariat. Un comité conjoint s’est réuni cette semaine à Washington pour discuter des moyens de relancer la machine.
Y a-t-il encore quelque chose à sauver de l’Accord de libre-échange (ALE) Maroc-États-Unis? Annoncé à sa signature comme un accord pionnier dans le réseau de libre-échange marocain, l’ALE avec les USA a finalement déçu. Les échanges dépassent à peine les 33 MMDH et demeurent largement dominés par les exportations américaines (26 MMDH en 2016). Le commerce n’a que trop faiblement évolué durant cette période. Les exportations marocaines vers le marché américain devaient atteindre 3 milliards de dollars (28 MMDH) à l’horizon 2016. À ce jour, elles dépassent à peine 900 millions de dollars (8 MMDH). Un constat d’échec pour l’export marocain vers cette destination. Il faut dire que les obstacles au commerce sont légion sur le marché de l’oncle Sam. Les exportateurs marocains doivent composer avec des règles draconiennes en matière de règles sanitaires et phytosanitaires, l’absence de ligne maritime directe et des difficultés sur les règles d’origine de plus en plus prononcées. Ces questions ont été soulevées à l’occasion de la tenue de la 5e session du Comité conjoint chargé du suivi de l’accord de libre-échange mercredi dernier à Washington. Un comité qui ne s’est pas réuni depuis 2015 et qui n’a pu se réunir que 5 fois en 11 ans alors qu’il est censé tenir des réunions annuelles.
La rencontre s’est tenue sous la co-présidence de la secrétaire d’État auprès du ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Mounia Boucetta, de la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Industrie, de l’investissement, du commerce et de l’économie numérique, chargée du Commerce extérieur, Rakiya Eddarhem, et du représentant adjoint des États-Unis pour le Commerce en Europe et au Moyen-Orient, Daniel Mullaney. Lors de cette réunion, marquée par la présence de l’ambassadrice du Maroc à Washington, Lalla Joumala Alaoui, les deux délégations ont passé en revue plusieurs questions économiques d’intérêt commun ainsi que les moyens à mettre en œuvre afin de développer davantage les relations commerciales particulières entre les deux pays et de donner plus de contenu et de dynamisme à l’accord en question, notamment au niveau des secteurs de l’agriculture, du textile, de l’investissement et des PME.
Cette réunion intervient dans le contexte particulier d’une politique commerciale de l’administration Trump qui se veut plus protectionniste et moins engagée sur le chemin du libre-échange. La volonté affichée par l’administration Trump étant clairement de réviser tous ses accords commerciaux afin de les rendre compatibles avec cette vision moins libre-échangiste. La 4e session du «Joint Committee» tenue en février 2015 avait permis de noter un progrès significatif dans un nombre important de secteurs couverts par l’ALE. Ceci inclut les questions de facilitation du commerce, des questions liées à l’agriculture, aux normes sanitaires et phytosanitaires, aux normes du travail et des questions de l’environnement relié au commerce. La 3e session du comité mixte s’était tenue en décembre 2012 et avait permis une avancée notable dans le partenariat grâce à la mise en place de 3 grandes initiatives, à savoir un accord sur la facilitation des échanges, des déclarations sur les principes conjoints pour l’investissement international et pour les technologies de l’information et de la communication.
Le Maroc s’était également engagé à ratifier le très décrié «Anti-Counterfeiting Trade Agreement (ACTA)». Les sous-comités sur l’agriculture et les normes sanitaires et phytosanitaires s’étaient également tenus en septembre 2012. L’ensemble des accords de libre-échange signés par le Maroc prévoient la mise en place d’un organe de suivi à caractère politique réunissant souvent les hauts responsables gouvernementaux afin d’examiner l’état d’avancement du partenariat et de prendre les décisions à même de faire fructifier la collaboration entre les membres de l’accord. L’ALE Maroc-USA prévoit, pour sa part, l’établissement d’un comité mixte dans son article 19.2. Il s’agit de l’équivalent de l’organe mis en place dans le cadre de l’accord d’association. Selon le texte de l’accord, le comité mixte a pour mission de superviser la mise en œuvre de l’accord de libre-échange et de passer en revue les relations commerciales entre les parties à l’accord. La présidence de ce comité est accordée aux représentants du Bureau du représentant des États-Unis pour le commerce (USTR), mandaté par le Congrès américain pour les négociations, et du ministère des Affaires étrangères et de la coopération du Royaume du Maroc. Concrètement, le comité mixte est chargé de plusieurs missions. Il devra notamment examiner le fonctionnement général de l’ALE. Il peut aller jusqu’à examiner et étudier les questions spécifiques ayant trait au fonctionnement et à la mise en œuvre de l’accord à la lumière de ses objectifs. Il dispose aussi d’un rôle de prévention quant au règlement des conflits survenant dans le cadre de l’application de l’ALE, y compris à travers des consultations.