Circulaire des impôts : Le détail des grandes mesures de la DGI
La Direction générale des impôts (DGI) a du pain sur la planche. L’administration fiscale, qui vient de démarrer la réflexion autour de la loi de Finances 2018, a enfin publié sa note circulaire autour des mesures fiscales de celle de 2017. La DGI y détaille les mesures touchant les principaux impôts, ainsi que les innovations de la mouture 2017.
C’est avec beaucoup de retard, imposé par le contexte particulier des élections de 2016 et la tardive adoption de la loi de Finances, que la note circulaire de la DGI relative aux dispositions fiscales de la loi de Finances 2017 vient d’être publiée. Le document (disponible sur le portail de la DGI: tax.gov.ma) détaille l’ensemble des mesures fiscales intégrées au texte de la mouture 2017 ainsi que leurs tenants et aboutissants. Il intervient dans un contexte économique particulier, marqué par une année de reprise de la croissance économique et la volonté d’accélérer la cadence de la croissance non agricole et des exportations. Des priorités déjà clairement fixées dans le cadre de la note de cadrage sur la loi de Finances, que l’on retrouve aujourd’hui dans le paquet de mesures fiscales concoctées par l’administration.
Exonération d’IS pour les industries nouvelles
Dans ce sens, il est prévu une exonération de l’impôt sur les sociétés (IS) visant les sociétés industrielles nouvellement créées pendant cinq ans. L’objectif est de contribuer à l’effort de développement de l’investissement et de mettre en œuvre le Plan d’accélération industrielle. Les activités industrielles éligibles à cet avantage fiscal seront fixées par voie réglementaire. Ces nouvelles dispositions sont applicables aux sociétés industrielles créées à compter de la date de publication de la loi de Finances au BO, soit à compter du 12 juin 2017, au titre des investissements réalisés à compter de cette date. La loi prévoit également d’accorder cet avantage aux sociétés industrielles créées entre le 1er janvier et le 12 juin 2017.
Biens d’investissement Neutralité pour la fiscalité de groupe
Autre mesure phare intégrée dans la loi de Finances 2017, l’institution d’un régime d’incitation fiscale aux opérations de restructuration des groupes de sociétés. Celle-ci s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations des Assises nationales sur la fiscalité de 2013, qui vise à renforcer la compétitivité des entreprises et à faciliter leurs opérations de restructuration et de réallocation des moyens de production. Ainsi, la loi de Finances pour l’année 2017 prévoit que les opérations de transfert de biens d’investissement puissent être réalisées entre les sociétés soumises à l’IS sans incidence sur leur résultat fiscal, si lesdites opérations sont effectuées entre les membres d’un groupe de sociétés éligibles. Encore faut-il, donc, définir le «groupe de sociétés». Selon le Code général des impôts, il s’agit du groupe constitué à l’initiative d’une société, dite «société-mère», qui détient de manière continue, directement ou indirectement, 80% au moins du capital social desdites sociétés. À noter que les OPCI sont exclus du bénéfice de ce nouveau régime. Selon la DGI, la détention directe de 80% du capital d’une société correspond à la possession en pleine propriété d’au moins 80% des droits à dividende et d’au moins 80% des droits de vote. La condition de détention de 80% du capital par la société-mère doit être satisfaite de manière continue durant tout l’exercice. Lorsque ce taux cesse -même provisoirement- d’être atteint, on considère que la filiale concernée a quitté le groupe.
Fusion/scission : le régime transitoire devient permanent
Dans le même ordre d’idées, la circulaire revient sur l’institution d’un régime fiscal particulier permanent au profit des opérations de fusion et de scission de sociétés. Avant l’entrée en vigueur de la loi de Finances pour l’année 2017, le CGI prévoyait un régime particulier permanent pour lequel pouvaient opter les sociétés qui réalisent des opérations de fusion. Parallèlement à ce régime, les sociétés pouvaient également opter pour le régime transitoire de fusion ou de scission qui avait été institué par la loi de Finances 2010, prorogé par la loi de Finances 2013 jusqu’au 31 décembre 2016. Dans le cadre de la continuité de la politique d’encouragement à la restructuration des sociétés, et afin d’améliorer leur compétitivité et de faire face à la concurrence internationale, la loi de Finances pour l’année 2017 a prévu l’application permanente du régime fiscal.
Des mesures en faveur des étudiants
Soucieuse de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes, la Loi de finances a institué, de manière permanente, l’exonération de l’indemnité de stage -auparavant soumise à l’impôt sur le revenu (IR)- tout en simplifiant les conditions d’exonération. L’exonération concerne les indemnités de stage mensuelles brutes plafonnées à 6.000 DH. Ces indemnités concernent toutefois uniquement les stagiaires lauréats de l’enseignement supérieur ou ceux de la formation professionnelle, recrutés par les entreprises du secteur privé. L’indemnité est accordée pour une période de 24 mois, à condition que les stagiaires soient inscrits à l’ANAPEC et que l’employeur s’engage à procéder au recrutement définitif d’au moins 60% desdits stagiaires. Par ailleurs, il est précisé que ces mêmes stagiaires ne peuvent bénéficier deux fois de cette exonération. En plus des stagiaires, la Loi de finances a aussi pris en considération les doctorants dans le but notamment de favoriser la recherche. Dans ce sillage, le législateur a introduit l’exonération (du paiement de l’IR) des rémunérations et indemnités occasionnelles brutes versées par une entreprise à des étudiants inscrits dans le cycle de doctorat. À l’image de l’avantage pour les stagiaires, l’indemnité est plafonnée à 6.000 DH bruts par mois, tandis que l’exonération est accordée pour une période de 24 mois à compter de la date de la conclusion du contrat de recherche. Cependant, l’indemnité est accordée sous conditions que lesdits étudiants soient inscrits dans un établissement qui assure la préparation et la délivrance du diplôme de doctorat et que les rémunérations et indemnités soient accordées dans le cadre d’un contrat de recherche. De plus, le doctorant non plus ne peut bénéficier deux fois de cette exonération. Du côté des employeurs, ceux-ci doivent annexer à la déclaration des traitements et salaires, un état mentionnant pour chaque bénéficiaire : nom, prénom, adresse, numéro de la Carte nationale d’identité et le montant brut des sommes payées au titre desdites rémunérations et indemnités. Cet état doit être accompagné d’une copie du contrat de recherches ainsi que d’une copie certifiée conforme de l’attestation d’inscription au cycle de doctorat.
La vente à réméré précisée
La pratique de la vente à réméré, devenue courante depuis la crise immobilière qui a frappé de plein fouet les promoteurs est désormais plus souple. La Loi de finances de 2017 a permis, en effet, la neutralité fiscale en matière d’IR sur les profits fonciers en faveur des opérations de vente à réméré portant sur des biens immeubles. Il faut dire que l’opération qui consiste en la vente d’un bien immeuble tout en gardant le droit de le racheter ultérieurement dans un délai ne pouvant dépasser trois ans à compter de la date de conclusion de l’acte de vente à réméré est, avant tout, une opération de refinancement. De par son mécanisme, elle s’assimile à deux opérations de vente/achat par le même opérateur à un autre (le plus souvent une banque) induisant à chaque fois une imposition sur les revenus en plus des droits d’enregistrement. Ainsi, dans le but de réduire cette pratique à sa finalité principale qui n’est autre que le refinancement, la Loi de finances de l’année en cours l’a exclue du champ d’application de l’IR au titre des profits fonciers à condition de respecter le délai de rachat, fixé à 3 ans. Cette exclusion dispense, en effet, le contribuable qui rétrocède le bien à son propriétaire initial, du paiement du montant de la cotisation minimale. La neutralité fiscale se matérialise également par la restitution du montant de l’IR/profit foncier versé spontanément par le contribuable lors de la vente à réméré d’un bien immeuble ou d’un droit réel immobilier. La restitution est par ailleurs conditionnée par l’établissement de la vente à réméré et le rachat sous forme d’actes authentiques. De même, le montant du rachat doit être prévu dans l’acte de vente à réméré sans oublier le respect du délai entre vente et rachat qui ne doit pas excéder les 3 ans. Cependant pour pouvoir profiter de la restitution, en plus du respect des trois conditions précédentes, le contribuable doit adresser une demande de restitution au directeur général des impôts ou à la personne désignée par lui à cet effet, dans un délai de 30 jours suivant la date du rachat, accompagnée de l’acte de vente à réméré et de l’acte constatant le retrait de réméré.
Des biens immeubles perso dans les sociétés
Dans le même sillage du bénéfice accordé, en matière d’IS, aux transferts de biens entre sociétés, l’apport réalisé par des personnes physiques n’est pas soumis à l’IR (au titre des profits fonciers), à condition que l’apport ne soit pas au profit d’un OPCI. Pour rappel, avant le 1er janvier 2017, les apports des biens immeubles et/ou des droits réels immobiliers, par des personnes physiques, à l’actif immobilisé d’une société, étaient imposables. La suppression de cette imposition vise avant tout le renforcement de la compétitivité des sociétés marocaines. Ce sursis d’imposition est, cependant, subordonné à la production de la déclaration du profit immobilier. Ce même bénéfice est accordé aux héritiers dans le cas d’apport de l’héritage. En revanche, quand il s’agit d’une donation des titres reçus par le contribuable en rémunération de l’apport, ou en cas d’échange de titres dans le cadre d’une opération de fusion, le sursis d’imposition est levé, et le profit foncier est soumis à l’IR dans les conditions de droit commun au nom de l’apporteur initial, précise la DGI. Par ailleurs, la personne physique qui procède à l’apport doit remettre, contre récépissé à l’inspecteur des impôts de l’arrondissement du bien en question, la déclaration du profit foncier dans les 60 jours qui suivent la date de l’acte par lequel l’apport a été réalisé. La déclaration doit comprendre l’acte (comportant le prix d’acquisition et la valeur des éléments apportés évaluée par un commissaire aux apports) et un état faisant ressortir le lieu de situation de l’immeuble et/ou du droit réel immobilier ainsi que le siège social, le domicile fiscal ou le principal établissement, le numéro d’inscription au Registre du commerce, l’identifiant commun de l’entreprise ainsi que le numéro d’identité fiscale de la société ayant bénéficié dudit apport.
Agences de voyage, base de TVA simplifiée dès 2018
L’horizon 2020 n’étant plus loin alors que la barre des 20 millions de touristes est encore élevée, la loi de Finances de 2017 apporte aux agences de voyages une simplification de taille en ce qui concerne le calcul de la TVA. Ainsi, les agences qui organisent des circuits touristiques, dans le cadre de leur profession sont soumises à la TVA sur «la marge». Ce nouveau concept qui déroge au droit commun consiste en le calcul d’une marge en soustrayant les sommes facturées, TVA comprise, à l’agence par les prestataires du prix total payé par le client pour le circuit proposé (un prix forfaitaire) également avec la TVA comprise. Cette différence TTC dite «marge» est reconvertie en hors taxe et c’est sur ce dernier qu’est calculé la TVA de 20% à la fin de chaque période d’imposition (mois ou trimestre). Par ailleurs, le fait générateur du calcul de la TVA est l’encaissement total du prix du circuit. L’objectif de ce régime dérogatoire est de prendre en considération les dépenses engagées auprès des non assujettis qui ne peuvent être justifiées par des factures faisant apparaître le montant de la TVA ouvrant droit à déduction. Néanmoins cette mesure n’est applicable qu’à partir du 1er janvier 2018.
TVA en zones franches, elles ne sont plus hors champ
Alors que les opérations effectuées à l’intérieur et entre les zones franches d’exportation (ZFE) étaient considérées hors champ d’application de la TVA, le législateur a décidé de changer cette donne. Ces opérations ne sont plus désormais hors champs mais considérées comme opérations exonérées de la TVA avec droit à déduction. Les ZFE considérées comme territoires étrangers, les opérations de ventes et prestations de service effectuées dans les zones ou encore entre ces zones sont assimilées à des exportations. C’est le cas aussi pour les travaux de construction ou de montage dans ces zones. Ces opérations sont ainsi exonérées mais soumises au contrôle de l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII) qui délivre aux fournisseurs des déclarations d’exportation leur permettant de bénéficier du remboursement du crédit de TVA généré par ces ventes exonérées. Cette exonération n’est par ailleurs possible que sous la condition que la facture soit libellée au nom d’une entreprise installée à l’intérieur desdites zones et que le paiement soit effectué en devises, sans oublier les avis d’exportation dûment visés par les services de l’ADII. Par ailleurs, les opérations de vente effectuées sur le territoire assujetti par les entreprises installées dans lesdites zones franches, sont considérées comme des opérations de mise à la consommation à l’intérieur, passibles de la TVA entre les mains de l’Administration des douanes. Les prestations de services réalisées à l’intérieur des zones franches et facturées aux entreprises établies sur le territoire assujetti sont pour leurs parts soumises à la TVA. Les entreprises les effectuant se doivent de se conformer aux obligations fiscales auxquelles sont soumis les contribuables installés sur ce territoire.
Les biens d’investissements exonérés de la TVA
En plus de l’IS, une autre mesure favorable à l’investissement est relevée dans la Loi de finances de 2017. Il s’agit de l’élargissement de l’octroi du bénéfice de l’exonération de la TVA aux entreprises existantes alors qu’il était limité aux entreprises nouvellement constituées. L’exonération concerne par ailleurs la réalisation des investissements ayant fait l’objet de conventions d’investissement et dont le montant est égal ou supérieur à 100 MDH pendant 36 mois à partir soit de la date de signature de la convention d’investissement, soit de la date d’autorisation de construire pour les entreprises qui procèdent à la construction d’unités liées à leurs projets d’investissement. La DGI précise dans sa circulaire que «les entreprises existantes éligibles à cette exonération sont celles qui procèdent soit à l’extension de leur projet, soit à l’aménagement, à l’équipement, à la rénovation ou à la transformation et d’une manière générale à tout investissement additionnel pourvu que les entreprises concernées aient signé des conventions d’investissement dont le montant est égal ou supérieur à 100 MDH. Par ailleurs, la Loi de finances pour l’année 2017 a inséré une mesure prévoyant le décompte du délai de l’exonération de la TVA pour les biens d’investissement importés de 36 mois à partir de la date de la première opération d’importation avec une possibilité de prorogation de 24 mois. De même, la loi a institué un nouveau délai d’exonération de la TVA – en cas de force majeure – supplémentaire de 6 mois, renouvelable une seule fois, accordé aux entreprises qui construisent leurs projets d’investissement ou qui réalisent des projets d’investissement dans le cadre d’une convention conclue avec l’État. Le bénéfice dudit délai supplémentaire est subordonné au dépôt par la société d’une demande de prorogation auprès du service local des impôts avant l’expiration du délai légal de 36 mois. Par ailleurs, le délai obligatoire de conservation des biens d’investissement de 5 ans n’est plus de rigueur suite à l’institution du régime de taxation des biens mobiliers d’occasion. La cession des biens d’investissement, après n’importe quelle durée, est soumise à ce régime. À l’opposé, les biens immeubles pour leurs parts doivent être conservés pendant 10 ans au lieu de la durée de 5 ans fixée précédemment.
Aéronefs, véhicules pour agences de location et microcrédits exonérés aussi
Enfin, la loi a aussi exonéré de la TVA à l’importation l’acquisition des aéronefs utilisés dans le transport commercial international régulier, des véhicules acquis par les agences de location de voitures ainsi que les associations de microcrédit. L’exonération des véhicules acquis par les agences a pour but de lutter contre l’évasion fiscale, tandis que celle des associations de microcrédit a pour but d’encourager leur activité et réduire le coût de financement pour les entrepreneurs.
Export : la DGI élargit ses horizons
Avant la loi de Finances pour l’année 2017, les entreprises exportatrices de produits ou de services qui réalisaient dans l’année un chiffre d’affaires à l’export bénéficiaient, pour le montant de celui-ci, de l’exonération totale de l’IS ou de l’IR pendant les cinq premières années d’exportation et de l’imposition au taux réduit de 17,5% en matière d’IS ou de 20% en matière d’IR au-delà de cette période. Toutefois, l’exonération et les taux spécifiques précités ne s’appliquaient qu’à la dernière vente effectuée et à la dernière prestation de service rendue sur le territoire national, ayant pour effet direct et immédiat de réaliser l’exportation elle-même. Autrement dit, seul l’exportateur final bénéficiait de ces exonérations, ce qui entravait grandement le développement des entreprises qui participent indirectement à l’exportation de produits ou de services et au rapatriement de devises. Afin d’encourager lesdites entreprises, la loi de Finances pour l’année 2017 a étendu les avantages des exportateurs aux exportateurs indirects. Par ailleurs, la mouture 2017 a œuvré pour l’encouragement des opérations d’exportation réalisées par l’intermédiaire des entreprises installées dans les zones franches d’exportation ou en dehors de ces zones. Avant la loi de Finances pour l’année 2017, les entreprises installées sur le territoire national ne pouvaient bénéficier de l’exonération quinquennale et du taux réduit accordés aux exportateurs pour leurs opérations d’exportation réalisées directement vers l’étranger seulement. Les exportations réalisées par l’intermédiaire des entreprises installées dans les zones franches d’exportation (ZFE) n’étaient pas éligibles à ces avantages. De même, les entreprises installées dans une ZFE ne pouvaient bénéficier de l’exonération quinquennale et de l’imposition au taux réduit que pour leurs opérations d’exportation réalisées directement vers l’étranger et pour leurs opérations réalisées, sous certaines conditions, avec des entreprises installées dans la même ZFE ou avec des entreprises installées dans différentes ZFE.