Boulemane : Récit hollywoodien d’un projet qui a viré au cauchemar
Alors que le directeur de la société Or Limites, Hicham El Menzhi, ambitionnait d’investir dans le projet novateur « La Ville fermière », pour un montant de prés de 112 MDH sur un terrain de 1700 hectares, il découvre une vaste escroquerie et fait l’objet d’une agression d’une violence inouï.
Hicham El Menzhi ne savait pas que le beau projet qu’il allait présenter à la COP22 se muera en cauchemar. Ce jeune entrepreneur et directeur de Or Limites, une société de production de marques, sise à Harhoura, près de Rabat, avait imaginé un concept comme il sait en faire, La Ville fermière dans la province de Boulemane sur une superficie de 1700 hectares et un investissement de presque 112 MDH. Un espace de vie, loin des tracasseries de la ville, pour des personnes qui cherchent le calme sans pour autant renoncer aux loisirs. Car la Ville fermière propose des activités comme le Karting, le motocross, un zoo, le canoé, l’accrobranche, la tyrolienne, parcours d’endurance…, de quoi intéresser les potentiels acquéreurs.
Tout allait bien, jusqu’à la rencontre avec des intermédiaires qui lui ont proposé des terrains appartenant à un promoteur immobilier, homme discret, qui n’aime pas trop marchander, selon leur descriptif. En 2016, la prospection du foncier a débouché sur l’acquisition d’un premier lot de 100 hectares, auprès de ce promoteur, au prix alléchant de 8000 DH/ha. La négociation a porté ensuite sur 600 hectares supplémentaires pour le prix bradé de 4000 DH/ha, pour finir au total avec 1700 hectares pour le montant de 6,35 MDH. Une aubaine pour El Menzhi qui n’en espérait pas mieux.
Un plan machiavélique
L’arnaque allait se savoir durant la procédure de mise en œuvre du projet à la phase de demande des certificats administratifs nécessaires au niveau de la province de Boulemane. Les autorités locales lui ont alors expliqué qu’il était au moins la dixième personne à se faire « rouler dans la farine » par une même individu. Preuve à l’appui, les 1700 hectares appartiennent bel et bien aux terres des Soulaliyates. La question qui vient naturellement à l’esprit, c’est comment les autorités locales n’avaient pas lancé une enquête au sujet de ce promoteur pour le mettre hors d’état de nuire ? Une autre question s’impose aussi : pourquoi l’acheteur n’a pas jugé bon de s’informer auprès de la conservation foncière pour connaître le vrai propriétaire des terrains ?
Pour tenter de limiter les dégâts, une rencontre avec le soi-disant propriétaire en septembre 2016 pour trouver un terrain d’entente fut un échec. La société Or Limites, via son gérant, a tenté une opposition au niveau de la banque pour empêcher le vendeur présumé de tirer un dernier chèque de 1,05 MDH, soit le reste à payer sur les 6,35 MDH. La demande a été rejetée. Mais le gérant a eu l’imprudence de retirer l’argent du compte de l’entreprise en banque, jugeant légitime d’empêcher une ultime perte. Deuxième épisode noir dans l’affaire, le gérant a été emprisonné au mois d’août 2016 et condamné à un an de prison ferme pour insuffisance de provisionnement et dol.
Hors d’état de nuire
Il a fallu attendre janvier 2017 pour que le procureur du roi près du tribunal de première instance de Témara ordonne une enquête à propos des terrains litigieux. Sur les lieux à Boulemane, apercevant la gendarmerie, les populations concernées sont sorties pour défendre leurs terrains face à ces étrangers qui ne sont autres que le vendeur et les responsables de Or Limites. Nul doute, les 1700 hectares sont des terres collectives. Le vendeur a profité du cafouillage, selon les explications d’El Menzhi, pour fuir en catimini. Un mandat d’arrêt sera alors lancé à son encontre.
À la veille du mois de ramadan, El Menzhi sortait de son bureau à Harhoura pour faire des achats et qu’elle ne fut pas sa surprise lorsqu’il a aperçu le promoteur en cavale. Il a vite pris son téléphone pour contacter la gendarmerie, mais il n’a pas pu finir l’appel que sa voiture a été violemment percutée par derrière. Un autre choc lui arrive cette fois-ci du côté gauche. Mais la voiture de l’assaillant s’est coincée dans le rond-point. Il s’est alors saisi d’une barre en fer et frappé El Menzhi sur le crâne. Ce sont les passants qui vont alors intervenir pour mettre le fou furieux hors d’état de nuire. El Mezhi s’en est sorti avec quelques points de suture, mais la vie sauve et surtout une amère satisfaction de voir le fossoyeur de son beau projet derrière les barreaux à la prison de Salé. Durant l’instruction de cette affaire, il s’est avéré qu’un ancien juge fut aussi victime de la même personne pour un terrain de 220 hectares toujours à Boulemane.