Omar Kettani : “La sortie du marasme économique se fait lente”

Omar Kettani
Professeur d’économie à l’Université Mohammed V de Rabat
Avec un encours global de 1.166,4 MMDH à fin juillet, le crédit bancaire enregistre une hausse de 4,9% en glissement annuel. Une dynamique principalement portée par la hausse des crédits à l’équipement et à la promotion immobilière, contrebalancée par le repli des facilités de trésorerie.
Comment analysez-vous la dynamique actuelle du crédit bancaire au Maroc ?
La hausse des encours de crédits n’a rien d’étonnant en période de ralentissement du processus de la crise. Lorsque entreprises et ménages ne parviennent pas à couvrir leurs besoins avec leurs seuls revenus, ils se tournent vers l’endettement.
La dette devient alors une alternative, plus ou moins forcée. Le contraire aurait signalé un véritable marasme économique. Pour les entreprises, cette évolution peut être lue comme un signe positif. Elles mobilisent des financements pour maintenir leur fonds de roulement ou investir dans de nouveaux projets, ce qui traduit une volonté de poursuivre leurs activités malgré un contexte incertain.
Pour les ménages, en revanche, la situation est plus préoccupante. Le recours accru au crédit traduit moins un choix qu’une nécessité, notamment pour la classe moyenne qui cherche à préserver son niveau de vie. Cette dépendance à l’endettement révèle un affaiblissement structurel de leur pouvoir d’achat.
Ces évolutions traduisent-elles une véritable sortie de crise économique ?
Pas encore. L’année 2025 reste avant tout marquée par un ralentissement. Les indicateurs actuels, aussi positifs puissent-ils paraître, sont étroitement liés à la baisse du taux directeur décidée ces derniers trimestres. Cela a facilité l’accès au financement et soutenu la demande, mais il serait hasardeux d’y voir déjà une sortie de crise.
Plus les entreprises s’endettent, plus l’on peut parler d’une dynamique économique en cours. Mais pour les ménages, cette tendance est un signal d’alerte. Elle reflète un effritement de la classe moyenne.
Dans ces conditions, une nouvelle baisse du taux directeur ne me paraît pas recommandée. Certes, la pression inflationniste recule, mais il est préférable d’attendre encore, de se donner un temps de latence, avant d’envisager une nouvelle détente monétaire.
Maryem Ouazzani / Les Inspirations ÉCO