8 Mars. Au nom de la parité !
Ce vœu légitime qu’est la parité s’avère difficile à atteindre dans plusieurs domaines, à commencer par la représentation politique et l’accès à l’emploi. L’amélioration de la condition de la femme reste tributaire non seulement des mesures mises en place en sa faveur, mais aussi de l’amendement du cadre juridique qui demeure lacunaire.
Le chemin vers la parité au Maroc est encore long, en dépit des progrès réalisés au cours des dernières années. Le plafond de verre s’avère difficile à briser dans plusieurs domaines. De grands défis restent à surmonter en matière d’accès équitable des femmes et des hommes aux droits civils et politiques bien que d’importants efforts aient été déployés. Cette Journée internationale de la femme constitue l’occasion de faire le point sur les doléances qui restent encore en suspens. Il s’agit, en premier lieu, de la faible représentativité des femmes en politique et dans les hautes fonctions. Que ce soit au Parlement ou dans les instances élues locales et régionales, les femmes demeurent sous-représentées à cause de plusieurs obstacles aussi bien juridiques que sociaux. Sur le plan économique, en dépit des efforts significatifs déployés et ceux en cours pour la promotion de l’emploi, notamment celui des femmes, l’écart demeure encore important entre les deux sexes. Les femmes peinent, en effet, à accéder au marché du travail et souffrent le plus du chômage.
Il faut rectifier le tir
Sur le volet social, l’enseignement demeure la clé de réussite pour atteindre les objectifs escomptés en matière de promotion de la condition de la femme au sein de la société. Le secteur a connu des avancées notables en matière de parité. Des progrès considérables ont été constatés en matière d’accès des filles aux trois cycles d’enseignement.
En cette année scolaire, la répartition des élèves est presque égale : 52% de garçons et 48% de filles. Néanmoins, les filles, notamment en milieu rural, continuent de souffrir le plus du décrochage scolaire. Le taux d’abandon des filles au secondaire collégial a affiché un accroissement passant de 7,6% en 2012/2013, à 10,4% en 2014/2015. L’amélioration des droits socioéconomiques des femmes passe par la mise en place de mesures spécifiques dans tous les domaines pour réduire les disparités et lutter contre les différentes formes de discrimination, mais surtout par des lois permettant d’atteindre les objectifs escomptés.
À l’heure actuelle, le cadre législatif relatif à la promotion de la condition de la femme au Maroc demeure lacunaire alors que l’instauration d’un environnement juridique favorable au respect des droits des femmes s’impose. La société civile, et même certaines institutions publiques, comme le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et le Conseil national des droits de l’Homme ont émis des recommandations pour rectifier le tir non seulement au niveau des lois en vigueur, mais aussi des projets de loi qui ont suscité une grande polémique. Il s’agit notamment du texte relatif à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination (APALD).
Plusieurs dispositions discriminatoires
Le projet de loi qui a déclenché des débats animés n’a pas encore pu franchir le cap du Parlement. Il a été adopté par la Chambre des représentants, mais il reste encore tout le processus législatif au sein de la Chambre haute. Les associations pointent du doigt les attributions limitées de l’institution qui ne l’autorisent qu’à présenter un avis, des propositions et des recommandations, organiser des formations, sensibiliser et élaborer des études.
Pour sa part, le CESE a identifié plusieurs obstacles potentiels à la prévention des discriminations et à la promotion de l’égalité constatant que la notion de protection n’est pas assez prononcée. L’instance de Nizar Baraka recommande de conférer à l’APALD la personnalité juridique, et le droit d’ester en justice contre les situations, les actes ou les auteurs de discrimination et d’habiliter cette future entité à constater les situations de discrimination, proposer une médiation, estimer le préjudice matériel et moral des actes de discrimination et aider les victimes à obtenir réparation. Un autre projet de la plus haute importance est entre les mains des parlementaires de la Chambre des conseillers : le texte relatif à la lutte contre les violences faites aux femmes. L’espoir est que les nouvelles dispositions juridiques soient mises en œuvre le plus tôt possible, bien que le texte soit jugé lacunaire aussi bien par les acteurs associatifs que les députées qui auraient aimé y introduire plusieurs amendements. Parmi les reproches figure l’absence d’un dispositif de protection des femmes qui portent plainte pour violence.
En effet, la femme violentée ne pourra pas bénéficier immédiatement d’une protection ou d’une prise en charge. Les députées avaient plaidé pour la mise en place de la mesure de l’éloignement du mari avant la fin du procès. Dans son avis sur ce projet de loi, le CNDH souligne la nécessité d’ajouter des mesures de protection qui doivent être prises immédiatement par la police judiciaire ou le ministère public, selon le cas, dans les affaires de violence à l’encontre des femmes. Au niveau des lois en vigueur, plusieurs dispositions sont jugées discriminatoires à l’égard des femmes tant au niveau du Code de la famille que du Code pénal (mariage des mineures, la garde et tutelle, la séparation des biens après le divorce, la polygamie, la hiérarchie des peines de viol…) et nécessitent un amendement. À cela s’ajoute, l’impératif d’une meilleure mise en œuvre des lois, notamment par les juges et les policiers.