Maroc

Casablanca/kissariat Alsace : Le danger plane toujours

Une commission d’expertise a été diligentée par le Laboratoire public d’essais et d’études (LPEE) pour examiner la situation dans l’immeuble dit «Najat», qui abrite «Kissariat Alsace» au quartier Benjdia où un incendie s’est produit, il y a plus d’un mois et demi, provoquant des dégâts énormes. Les résultats devraient être communiqués d’ici quelques jours.

Les 8 et 11 juillet, une commission d’expertise a été diligentée par le Laboratoire public d’essais et d’études (LPEE) pour s’enquérir de l’ampleur des dégâts dans les 75 appartements endommagés par l’incendie, qui s’est produit, le 28 mai dernier, dans la résidence «Najat», qui abrite la «Kissariat Alsace», dans le quartier de Benjdia. Ce sinistre, notons-le, a provoqué des dégâts matériels énormes, aussi bien chez les commerçants que chez les habitants. L’expertise devrait déterminer les origines de la dégradation   et révéler si l’incendie a eu des effets sur la stabilité des structures des appartements. Le laboratoire n’a pas encore dévoilé les résultats de cette expertise technique. Mais des sources proches du dossier affirment que certains appartements, se trouvant au premier étage de l’immeuble, seraient endommagés à 100% et devraient être totalement refaits. Les occupants de ces appartements, qui ont été évacués envisagent de porter l’affaire devant la justice pour demander réparation. Au lendemain de la catastrophe, rappelons-le, une commission technique préfectorale a été chargée d’examiner la situation après l’incendie.

Irrégularités multiples
Le constat de ses membres est, on ne peut, alarmant. Plusieurs modifications ont été effectuées dans le plan initial :  existence d’une vingtaine de dépôts de stockage et des magasins non autorisés au sous-sol, lequel était au départ destiné à un parking, absence de moyens de secours, condamnation des cages d’escalier de secours, manque d’aération des magasins, présence des sous-pentes non réglementaires avec stockage complet de marchandises, existence d’une charpente métallique non réglementaire au niveau de la cour centrale de la kissariat, présence de produits dangereux et de colle…etc. Bref, autant d’irrégularités qui sont, d’ailleurs, signalées dans le PV établi par ladite commission et dont Les ÉCO détient copie et qui s’est rendu sur place. 

Les traces de la catastrophe étaient, d’ailleurs, toujours là. Ils en disaient long sur l’ampleur de l’incendie qui s’est produit dans ce bâtiment. Selon les habitants,  ce sont ces modifications opérées sur le plan initial qui auraient compliqué les opérations d’intervention des sapeurs-pompiers. «La fermeture de l’une des portes au moment de l’arrivée des sapeurs-pompiers et le retard pour ouvrir cette porte, a contribué à augmenter les dégâts. Cette porte ne figurait pas sur le plan initial», martèle l’un des habitants. Le plan initial de la propriété «Najat», enregistrée sous le titre foncier N° 30978 illustre, en effet, les appartements du premier étage avec le vide où une charpente métallique a été construite. De même, il montre l’entrée du passage avec les magasins. Le document illustre aussi l’existence du portail métallique installé à l’entrée de ce passage. Il y a deux portes des deux côtés du passage. Cependant, à la place des trois portes, ce grand immeuble n’en a aujourd’hui plus qu’une seule.

Ils ont aussi procédé à la mise en place d’une charpente métallique au niveau du couloir. «C’est à cause de ces modifications que les pompiers n’ont pas pu accéder, à temps, à l’intérieur du bâtiment pour venir à bout de l’incendie», répètent les habitants. De leur côté, des sources officieuses de la Préfecture d’Anfa tiennent à rassurer. «Des instructions ont été données aux commerçants pour revenir au plan initial. Le PV de la commission préfectorale est d’ailleurs clair à ce sujet. On doit rendre les lieux tel que autorisé sur le plan initial», est-il indiqué. Les mêmes sources soulignent qu’«une procédure administrative sera entamée, dans ce cadre, à l’encontre des contrevenants, auteurs des infractions et ce, conformément à la loi 12-90 promulguée par le dahir N° 1-92-31 du 17 juillet 1992 relatif à l’urbanisme». Les habitants et les voisins sont-ils pour autant rassurés ? Pas sûr. Ceux-ci n’excluent, d’ailleurs pas, qu’un autre incendie pourrait se reproduire. «Les quelque 42 commerçants s’apprêtent à reprendre les mêmes activités. Cela veut dire que nous ne sommes pas à l’abri d’un autre sinistre.

Et le risque d’un autre incendie continuera de nous guetter, à cause notamment des produits dangereux, des colles et des produits cosmétiques inflammables vendus et stockés dans les dépôts construits de manière clandestines», souligne les habitants. Leurs accusations vont directement aux autorités locales censées contrôler la nature des activités exercées par les commerçants.

Des habitants encore «à la rue»
Dans ce drame, l’ampleur des dégâts ne cesse, en tout cas, de susciter la colère des habitants des immeubles mitoyens, surtout les occupants des appartements, notamment ceux qui avaient quitté leur appartement depuis plusieurs semaines, mais n’ont pas pu y retourner, jusqu’à l’heure du présent article. Dans un premier temps, les 400 habitants de l’immeuble sinistré étaient, tous, interdits de réintégrer leurs appartements de peur que les structures du bâtiment ne se soient effondrées. Ils ont été recueillis par leurs proches en espérant des solutions dans un délai bref. Mais depuis quelques jours, et à l’exception des occupants des appartements se trouvant au premier étage, lesquels étaient très endommagés, ceux des étages supérieurs ont été autorisés à rentrer chez eux, après sept semaines passées chez des proches.

Les ÉCO a visité l’un des appartements au 1er étage très endommagé. Des fissures profondes sont visibles dans différents endroits au niveau des poutres et planchers, dégradation des murs,…etc. Bref, les dégâts sont énormes et la colère des occupants concernés n’en fut que grandissante. «Nous habitions dans nos appartements spacieux, et du jour au lendemain, nous nous trouvons comme des réfugiés vivants, pendant tout le mois de ramadan, chez nos proches. Car nos appartements sont fortement endommagés et il nous est impossible d’y vivre», précise le propriétaire de cet appartemen. L’incident, qui fait toujours parler de lui, remet, de nouveau, sous les projecteurs, les nombreuses activités dangereuses qui sont exercées dans les zones d’habitation. Ces activités, qui prospèrent à Casablanca, secouent, en tout cas, les membres de certaines instances professionnelles, en l’occurrence l’Union générale des entreprises et des professions (UGEP).

Selon des membres de cette instance, aucune kissariat n’est à l’abri d’un sinistre similaire à celui de Kissariat Alsace, à cause de produits cosmétiques et autres produits dangereux qui y sont stockés et commercialisés. «L’absence de contrôle est à l’origine de ces activités qui prospèrent dans ces kissariats, lesquelles sont situées à Derb Omar, Benjdia et Garage Allal», précise Mohamed Dahbi, SG de l’ UGEP. Comment expliquer que de telles activités aient été autorisées dans des résidences destinées à l’habitation ? Comment est-ce que les commerçants d’Alsace, pour ne citer que cette kissariat, ont-ils pu avoir les autorisations pour stocker et vendre des produits dangereux ? À qui incombe la responsabilité de cet incendie qui aurait pu coûter la vie aux familles résidentes dans cet immeuble ? Les questions sont nombreuses.

Des sources à l’Ordre des architectes soutiennent que cette instance ne cesse, d’ailleurs, d’interpeller les autorités locales sur des immeubles dont les plans initiaux ne sont pas respectés. «C’ela entraîne des accidents dans les bâtiments concernés par ces modifications», affirme un architecte. Plus, il accuse directement les autorités locales de ne pas procéder à des contrôles, notamment dans ces kissariats où des produits inflammables sont stockés et où toute modification pourrait conduire à des conséquences désastreuses lors d’un incendie, par exemple. 



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