«Timitar, un incubateur de PME culturelles»
Selon le directeur du festival Timitar (qui se tient du 13 au 16 juillet à Agadir), cette manifestation culturelle permet aux artistes de faire leur promotion. En chiffres aussi, Timitar distribue 60% des cachets en volume et 40% en valeur aux artistes locaux.
Les ÉCO : Timitar draine chaque année plus de 400.000 spectateurs. Concrètement, quelles sont les retombées économiques de ce festival ?
Khalid Bazid : Les chiffres varient d’une édition à l’autre. Ils tournent durant quatre jours autour de 700.000 spectateurs en incluant les trois scènes du festival. S’agissant des retombées, elles concernent l’industrie du spectacle en général et les artistes amazighes en particulier. Aujourd’hui, grâce à Timitar, il existe un véritable marché que je qualifierais de marché de substitution depuis le déclin de celui des cassettes et des CD. En effet, peu d’artistes au Maroc tirent leurs épingles du jeu grâce à Youtube puisque l’investissement en termes de technologie et de visibilité sont décourageants. Donc, seuls les festivals et les fêtes privées compensent ce manque à gagner. En chiffres, Timitar distribue 60% des cachets en volume et 40% en valeur aux artistes locaux. Aussi, il produit chaque année un nouvel album. Cette année, on a produit celui du groupe «Inouraz». Par esprit d’équité, le festival offre également l’opportunité à aux artistes amazighophone de se produire sur scène. Le festival est également une sorte d’incubateur de petites entreprises de spectacles.
Qu’en est-il des autres secteurs ?
Pour le tourisme ainsi que la mobilité urbaine, l’apport est indéniable puisque tous les hôtels affichent complet pendant cette période estivale où l’animation de la destination est indispensable. Le constat est le même pour les restaurants, les cafés ainsi les transporteurs qui travaillent à plein régime.
Est ce que vous prenez en compte l’aspect économique dans la conception de la communication ou la programmation artistique du festival ?
Bien sûr, que ce soit les spots radio ou télé ainsi que l’affichage et la communication sur les réseaux sociaux sont réalisés pour attirer une cible plus large pour le festival. C’est pourquoi, on vise aussi les catégories socioprofessionnelles A et B. S’agissant de la programmation des artistes sur scènes, le timing est conçu pour maximiser la fréquentation adaptée à la zone de chalandise de chacune de ces scènes. En effet, Al Amal tout en étant une place publique est plutôt fréquentée par «la ménagère» de moins de 50 ans. Les familles préfèrent également cette place parce qu’elles viennent ensemble, dînent autour de la place et surtout logent, pour ceux qui ne sont pas d’Agadir, dans les hôtels à vocation familiale. Quant à la place Bijawane, elle est plutôt fréquentée par les jeunes tandis que le théâtre de verdure est un peu plus élitiste pour les mélomanes. Cependant, il est toujours difficile de tenir un langage d’analyse économiquement fiable sans chiffres à l’appui. Pour cela il faut mettre à contribution tous les opérateurs dont ceux qui exercent dans l’informel.
Une enquête de satisfaction a été réalisée, il y a deux ans. Quelles sont ses principales conclusions ?
L’enquête a démontré que le taux de satisfaction dépasse les 85%. Des points à améliorer ont été identifiés et on les a corrigés, notamment la communication en amont au sujet des dates et les artistes programmés. Mais globalement, le segment du festival, pour employer des termes plus marketing, est excellent en matière de choix puisque son déplacement est motivé par la culture amazighe et l’ouverture sur d’autres cultures.
Quel est l’apport financier injecté pour appuyer la scène artistique amazighe et la jeune création ?
Le Timitar off a toujours été très efficace sur le plan financier ou d’exposition pour la culture amazighe. La production d’albums en partenariat avec un sponsor national ainsi que la production de débats et colloques soit sur des questions de monuments historiques comme Igoudar, ou la mise en application de l’officialisation de la langue amazighe ou l’exposition des artistes peintres sont prises en charge totalement par le festival. Voilà quelques exemples qui montrent à quel point la contribution de Timitar est devenue essentielle dans la promotion de la culture amazighe qu’elle soit artistique ou autres.
Est-ce que le budget actuel du festival est suffisant par rapport aux autres manifestations du genre ?
Nous faisons en sorte que le budget puisse nous permettre d’avoir le maximum de spectacles avec des artistes d’horizons différents, d’avoir le maximum d’échanges marchandise avec les partenaires pour toucher au minimum au numéraire du budget sponsoring etc. Le budget n’est jamais suffisant mais on se doit de s’y adapter et maintenir la qualité qui nous a permis d’être classé parmi les 25 premiers festivals dans le monde par le classement Songlines.