Samia Akariou : ACTRICE À LA CLASSE INNÉE
Elle est l’un des visages les plus connus du grand et du petit écrans marocains. C’est une actrice au talent naturel. Elle est aussi scénariste et metteur en scène. Samia Akariou n’est plus à présenter. Femme de théâtre, elle revient pendant le ramadan avec une des meilleures séries que propose la deuxième chaîne : Sir Al Marjane, co-écrite et jouée aux côtés de son amie et acolyte Nora Skalli. Parcours d’une battante, d’une comédienne viscérale.
À la voir jouer, on a du mal à s’imaginer Samia Akariou faire autre chose de sa vie. Elle qui ne se voyait pas du tout actrice de façon professionnelle, s’imaginait pharmacienne ou architecte comme tout le monde, mais elle se voit rattrapée par sa passion, son rêve. «Devenir actrice a toujours été un rêve mais inavoué. Je n’ai jamais pensé le devenir un jour. J’ai commencé toute petite à chanter et à faire du théâtre. Je ne pensais pas en faire ma vie. Je me suis imaginée architecte ou pharmacienne. Je me suis vu confrontée à la dure réalité de la vie où il est difficile de tracer son chemin, quand on n’a pas une grande moyenne pour intégrer la fac de médecine ou que financièrement on ne peut pas se permettre des choses, on se tourne vers son rêve, son talent… J’ai la chance de faire un métier qui me passionne, je suis consciente de ma chance !». Aujourd’hui, elle fait partie des actrices les plus appréciées du public et les plus convoités à l’écran. On se souviendra longtemps de la série «Houssein et Safia» et du film marocain «Lalla Hobbi» de Mohamed Abderrahman Tazi. Actrice mais pas seulement puisqu’elle est surtout scénariste, elle écrit ses propres rôles puisqu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même selon elle. Elle prouve l’étendue de son talent avec la série ramadanesque «Sir Al Morjane» qu’elle co-écrit avec Nora Skalli.
Ecrire pour jouer…
Pour la fleur de Chaouen, une chose est évidente : il est plus sûr de faire les choses par soi-même ! Et pour cause. Samia Akariou ne se sent pas motivée par les projets qu’elle voit passer ou qu’on lui propose. Alors elle décide d’agir au lieu d’attendre : elle apprend à écrire pour jouer ! Et cela lui réussit plutôt bien ! En témoigne le succès fulgurant de la pièce de théâtre «Bnat Lalla Mennana» en 2005, adaptation marocaine de «La maison de Bernarda Alba» de Federico García Lorca, ainsi que dans la série télévisée homonyme qu’elle a adaptée et dans laquelle elle interprète l’un des rôles principaux. Un exercice dans lequel elle se plait tout de suite. «Ce n’est que du plaisir ! Déjà écrire était presque une obligation pour nous puisque quand on ne reçoit pas de projets ou de propositions valables qui peuvent nous transporter en tant qu’actrices, on s’est vu contrainte à écrire nos propres rôles et notre propre histoire même si l’exercice est difficile ! On a appris à écrire, on ne voit pas de loin non plus puisqu’on vient d’instituts de théâtre ! On a commencé à 7 avec Lalla Manana ! On n’est jamais satisfaits que par soi-même. Et puis les bons scénaristes manquent au Maroc, tout le monde le sait ! Il fallait mettre la main à la pâte.
J’espère qu’on a réussi à apporter quelque chose de nouveau et de beau à cet état de crise d’écriture au Maroc !», confie la native de Chaouen avant d’ajouter : «c’est magnifique de pouvoir jouer des personnages qu’on a rêvé, qu’on a créé !». Et cela se ressent tout de suite. La comédienne, qui incarne un rôle comme elle incarnerait une autre vie, est toujours juste et sincère dans son jeu. Son naturel donne l’impression que jouer est facile et elle a prouvé qu’elle était capable de tout incarner. Dans sa nouvelle série, qui passe sur le deuxième chaîne pendant le Ramadan : «Sir Al Marjane», elle joue le rôle d’une institutrice qui essaie de se reconstruire après une rupture douloureuse.
Une série aussi belle sur le fond que la forme
C’est l’histoire de Housna et Nadia, deux institutrices citadines, qui arrivent dans un village de pêcheurs. Elles découvrent que ses habitants subissent la dictature d’un trafiquant de corail et de drogue. Les hommes, les femmes et mêmes les enfants doivent effectuer de longues journées de travail dans les salières du tyran. Les institutrices vont alors essayer de libérer les villageois des filets du braconnier marin… «L’idée de la série a commencé à germer il y a 2 ans. Depuis septembre 2014. On a vraiment pris notre temps pour la travailler.
Pour ce genre de séries, il faut attendre les appels d’offre que proposent la 2e chaîne.On s’est beaucoup imprégné de l’histoire, on a voulu poser les premières pierres, approfondir les personnages et repérer l’endroit où on va raconter notre histoire.On a choisi la région. Ensuite on a commencé à écrire. Cela dure depuis 2 ans». Le résultat est bluffant. L’histoire, la profondeur, l’intrigue et l’attachement au personnage, des ingrédients qui font de la série de Samia Akariou et Nora Skalli une réussite. Des acteurs bien choisis tels que l’excellent Omar Lotfi en jeune à problèmes un peu paumé, le charismatique Hicham Rostom venu tout droit de Tunisie, ou encore les talentueux Karima Gouit, Saadia Ladib, Amine Ennaji, Malika El Omari, Abdallah Didane, Mustapha Houari, Abdallah Chicha, le tout réalisé avec le regard plein d’humanité de Chaouki El Ofir. L’histoire nous embarque de suite. Puisqu’elle est pensée, écrite, rêvée, habitée. Ce n’est pas juste une question de sitcom alimentaire, c’est une vraie histoire à jouer ! «Il n’y a pas de recette miracle !
Le personnage t’habite déjà. Pendant l’écriture, nos personnages nous habitaient déjà, Nora et moi, mais quand le tournage arrive, le trac vient et on redevient débutant. Nos personnages viennent de nous, de notre entourage, du néant…Il a une part de nous-mêmes. Je joue le rôle d’une institutrice, j’ai beaucoup observé les institutrices travailler, j’ai puisé dans mes souvenirs d’école et dans ce métier que j’ai rêvé d’exercer, mais quand on est sur le plateau, et qu’on entend le mot «action», la magie vient, le personnage vient, on commence à le ressentir, à le camper petit à petit», confie Samia Akariou qui aime écrire des personnages drôles et décalés. «Les personnages décalés, qui ont de l’humour me touchent.
La portée dramatique également m’intéresse, mais dans l’écriture je prends beaucoup de plaisir à inventer des personnages drôles et décalés. Je les aime bien». Fan de Fayrouz depuis toujours, ce bout de femme à la joie de vivre débordante, cette comédienne aux yeux qui sourient et à la voix que les Marocains ont adoptée, continue ses projets et souhaite revenir au théâtre puisqu’elle «en a besoin». Elle revient avec un projet en septembre avec sa troupe de toujours, histoire de ressourcer, de recevoir pour mieux donner…