Maroc

Samir Rachidi : «Les pays développés doivent assumer le coût de la neutralité carbone»

Samir Rachidi
Directeur général de l’IRESEN

Lors de la 5e édition du sommet Power to X, le Maroc a réaffirmé son ambition de devenir un acteur de premier plan de l’hydrogène vert. Une volonté affichée alors que la filière demeure au stade pré-industriel, et que sa crédibilité dépend encore de la concrétisation des projets annoncés. Cette édition intervient quelques semaines après la publication du rapport de l’Agence internationale de l’énergie, laquelle pointe le ralentissement des investissements mondiaux dans ce secteur.

Le Maroc réaffirme son ambition en matière d’hydrogène vert, mais les coûts de production demeurent élevés et les débouchés incertains. Quelle est votre appréciation du contexte actuel ?
L’histoire montre que toutes les formes d’énergie ont été subventionnées à leurs débuts, qu’il s’agisse du charbon, du pétrole ou du gaz.

Deux obstacles majeurs freinent aujourd’hui la percée de l’hydrogène vert. Le premier concerne les contrats de rachat à long terme, indispensables pour sécuriser les investisseurs, mais encore trop rares. Le second relève du cadre fiscal et réglementaire. Sans signal-prix, comme une taxe carbone ou une prime sur les molécules vertes, aucun marché ne pourrait émerger.

Vous soulignez la rigidité de la réglementation européenne. Quels ajustements seraient nécessaires pour faciliter l’émergence de la filière ?
L’Union européenne a accompli un travail important, mais ses règles manquent de souplesse. Un assouplissement dans l’application de la réglementation RFNBO (carburants renouvelables d’origine non biologique, dont fait partie l’hydrogène vert), et sur le volet CO₂, est nécessaire. Les premiers investisseurs portent un risque considérable, avec des capitaux massifs engagés. Leur accorder un avantage temporaire permettrait de lancer véritablement le marché.

L’Agence internationale de l’énergie a récemment alerté sur un ralentissement des investissements dans l’hydrogène. Quelle lecture en faites-vous ?
Cette alerte traduit une réalité mondiale, mais elle ne remet pas en cause l’approche marocaine. Le choix a été celui de la prudence et de la méthode, avec une gouvernance appuyée sur des comités interministériels qui assurent une coordination étroite. Les projets progressent, même si le marché international reste instable. Le dernier rapport du Hydrogen council recense 510 projets engagés ou en construction, pour un total de 110 milliards de dollars d’investissements. Le volume demeure inférieur aux ambitions initiales, mais il témoigne d’une dynamique réelle.

Lors d’une intervention devant le Parlement en janvier dernier, la ministre de la Transition énergétique a écarté l’idée d’une subvention publique. Qu’est ce qui sous-tend une telle posture ?
C’est normal, il n’a jamais été question de faire porter ce coût au citoyen. Les pays développés, responsables d’une large part des émissions passées, se sont engagés en faveur de la neutralité carbone. C’est à eux d’assumer cette responsabilité. Le Maroc propose une offre claire faite de foncier, de capital humain, d’infrastructures et d’un cadre fiscal adapté. Aux développeurs de bâtir leurs modèles économiques.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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