Mohamed Bahlaoui : “L’IA générative menace d’amputer jusqu’à 64% du trafic organique des plateformes en ligne”

Mohamed Bahlaoui
Co-founder & Senior Online Marketeer – New Amsterdam AI
Avec la montée en puissance de l’IA générative, le référencement classique atteint ses limites. Pour vendre, conquérir de nouveaux clients ou simplement rester visibles, les entreprises doivent désormais se tourner vers une nouvelle discipline, la Generative engine optimization, qui tend à positionner les marques au cœur des réponses façonnées par l’intelligence artificielle.
Quelles sont, selon vous, les conséquences immédiates auxquelles les entreprises doivent se préparer avec l’essor de l’IA générative dans la recherche en ligne ?
Toutes les prévisions tablent sur le fait que l’IA générative est appelée à transformer radicalement l’ensemble du parcours client en ligne. Des navigateurs désormais conçus pour l’intelligence artificielle, tels que Perplexity Comet, OpenAI Aura ou l’extension Chrome de Claude, aux bouleversements induits par les nouveaux moteurs de recherche comme ChatGPT, Perplexity ou Google AI Overviews, jusqu’à la transformation des interactions entre humains et agents intelligents sur les sites et applications, l’impact cumulé s’annonce de nature à redéfinir en profondeur la relation entre marques et consommateurs.
La première conséquence se mesure déjà dans la baisse du trafic organique. Certaines plateformes voient leur audience s’éroder, à l’image de Monday.com dont le titre a chuté en bourse après un premier recul lié à l’intégration de l’IA de recherche chez Google.
D’après Forbes, les synthèses générées par l’IA de Google —AI Overviews— peuvent provoquer une diminution de 15% à 64% du trafic, selon les secteurs et les requêtes. Une telle contraction se traduit mécaniquement par une perte de revenus pour les entreprises dépendantes du canal numérique.
La Generative engine optimization promet de placer les marques au cœur des réponses générées par l’IA. En quoi diffère-t-elle réellement du SEO traditionnel ?
Il ne s’agit pas d’une rupture totale, car les marques resteront tributaires d’un site techniquement fiable, soutenues par un contenu de qualité. La différence réside dans le comportement des modèles de langage, qui n’opèrent pas comme les moteurs de recherche classiques. Ils s’appuient sur d’autres sources de données, des algorithmes différents et des outils encore récents.
Il s’agit là d’un domaine en pleine recomposition, où l’ensemble du secteur avance par tâtonnements. Ceci dit, ces transformations s’accompagnent d’un changement radical de comportement des internautes, qui effectuent désormais leurs recherches sous une forme conversationnelle plutôt qu’à travers des mots-clés.
De plus en plus, ils délègueront certaines tâches à leurs agents d’IA. Pour le marketing en ligne, c’est une mutation brutale qui impose aux professionnels de rester en alerte et d’adapter en permanence leurs stratégies.
Quels secteurs seront les premiers touchés au Maroc, et comment les petites structures peuvent-elles s’y préparer malgré leurs moyens limités ?
Les secteurs les plus exposés sont ceux qui reposent fortement sur le trafic en ligne. Le commerce et la distribution, d’abord, où les ventes, l’acquisition de clients et la notoriété des marques dépendent directement du flux digital. Viennent ensuite les médias et les enseignes de divertissement, journaux, éditeurs et plateformes de contenus, qui ont longtemps bâti leur audience sur le référencement et la visibilité organique.
Enfin, le voyage et l’hôtellerie, des agences aux chaînes hôtelières en passant par les plateformes de réservation, puisent l’essentiel de leur clientèle dans les moteurs de recherche et les sites d’avis. Afin de rester compétitives, les entreprises, peu importe leur taille, doivent avant tout comprendre ces mutations et en mesurer l’impact sur leur modèle digital, en vue d’élaborer une stratégie marketing adaptée.
Au-delà de la visibilité, cette mutation traduit-elle une transformation plus profonde du rapport entre marques et consommateurs à l’ère des interfaces conversationnelles ?
C’est le début d’une nouvelle étape dans l’évolution des interfaces. Après les sites web puis les applications mobiles, les interfaces conversationnelles prennent le relais. Les internautes en avaient déjà eu un aperçu avec les premiers chatbots ou assistants vocaux comme Alexa, mais cette fois, la technologie atteint une plus grande maturité grâce aux avancées de l’IA. Ce déplacement recompose le parcours client et, avec lui, la manière dont les marques dialoguent avec leurs consommateurs en ligne.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO