Impôts : le fisc à l’assaut des fausses factures

Pour le Trésor, l’automne ne devrait pas être une saison tendue. Aux deux tiers de l’exercice budgétaire, la levée de l’impôt domestique n’a jamais rapporté autant d’argent. Les rentrées fiscales à fin août bondissent de 21%, portées par un dynamisme sans précédent de l’IS (64 milliards DH), la TVA (46,8 milliards) et l’impôt sur le revenu (46,8 milliards). À la DGI, on relève l’effet de dissuasion de la retenue à la source sur la TVA collectée et l’engagement de la responsabilité personnelle des dirigeants en cas de défaut de déclaration et de paiement de la TVA. En un an, les volumes des fausses factures ont fondu de 75% !
Alors que l’architecture du dernier projet de Loi de finances de la législature sera présentée au Parlement d’ici le 20 octobre prochain, le budget en cours bénéficie d’une éclaircie jamais vue en matière de collecte d’impôts. Non seulement les recettes (brutes) de la fiscalité domestique affichent une progression de 21% à fin août, mais les trois piliers du système, à savoir l’impôt sur les sociétés (IS), la TVA et l’impôt sur le revenu (IR) progressent trois fois plus vite que le PIB.
Avec 64 milliards de dirhams (MMDH) de janvier à août, l’impôt sur les sociétés aura rapporté 16 milliards de plus au Trésor que durant la même période en 2024 !
C’est la première fois que les recettes de l’IS dépassent celles de l’IR, fait remarquer une source à la Direction générale des impôts (DGI).
Du jamais vu depuis l’introduction des acomptes provisionnels dans les modalités de liquidation de l’IS. Il ne fait pas de doute que le record de 2024 réalisé sur les recettes de cet impôt (72,75 MMDH) sera pulvérisé car durant le mois de décembre, le fisc encaisse jusqu’à 33% des recettes annuelles de l’I.S.
Selon une tradition bien installée, les entreprises ayant conclu un accord transactionnel à la suite d’un contrôle fiscal règlent la dernière tranche prévue dans le protocole convenu avec l’administration en décembre.
L’une des tendances majeures qui se dégagent de la cartographie des recettes d’impôts tient au fait que le dynamisme de la TVA est désormais porté par la TVA à l’intérieur, avec 46,8 MMDH à fin août. Il s’agit d’un basculement, car les produits pétroliers et énergétiques à l’import ont longtemps été le lubrifiant du rendement de la TVA.
Par ailleurs, les mesures de lutte contre «l’industrie de la fraude» à la TVA commencent à porter leurs fruits et leurs effets sont visibles dans les recettes, insiste notre interlocuteur à la DGI. Au passage, ce dernier révèle que les volumes des fausses factures ont fondu de 75%, et que la retenue à la source de la TVA collectée a permis d’engranger 4 MMDH.
Import de biens d’équipement exonérés de TVA : un business frauduleux démantelé
Le fisc confirme par ailleurs avoir porté l’estocade à la fraude à l’importation des biens d’équipement en franchise de TVA. En profitant de cette exonération, beaucoup d’«experts» ont généré tout un business frauduleux en créant des sociétés «rebond» ayant pour seul objectif de récupérer indûment une TVA déductible au Trésor.
Désormais, toute importation de biens d’équipement en exonération de TVA est soumise à une caution ou une garantie au profit du Trésor. Le fait de responsabiliser personnellement le dirigeant d’un défaut de déclaration de la TVA a fait peur. L’institution du principe de la solidarité en cas d’infraction aux obligations de déclaration et/ou de paiement en matière de TVA aura été l’arme nucléaire contre la fraude à la TVA, même si la guerre n’est pas encore tout à fait gagnée.
De leur côté, à 46,8 MMDH, dont 3,8 milliards rapportés par l’amnistie sur le cash l’année dernière, les recettes de l’IR bondissent de 18,3% malgré un marché de l’emploi en petite forme.
En revanche, le rendement de l’IR bénéficie de l’effet de revalorisation des salaires des fonctionnaires et de l’explosion des transactions immobilières qui ont fait tomber 4,07 milliards d’impôt sur les profits immobiliers dans les caisses de l’État. L’autre effet collatéral de la très grande forme qu’affiche le marché immobilier se traduit dans l’envolée des recettes de droits d’enregistrement qui explosent les compteurs pour s’établir à 19 MMDH à fin août.
Dividendes : l’État-actionnaire touche le jackpot
Les recettes des monopoles et participations ont été de 11,8 milliards de dirhams à fin août , en hausse de 41,8%. Sans surprise, les plus gros contributeurs sont OCP avec 4,4 milliards, Bank Al-Maghrib (4 milliards) et l’Agence de la Conservation foncière (2,5 milliards).
Avec une caisse bien garnie, l’État-employeur a du mal à contenir sa masse salariale. Les salaires des fonctionnaires servis par la Trésorerie générale du Royaume se sont en effet établis à 118,9 MMDH, en hausse de 11,6%.
Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO