Perspectives de croissance : la dynamique du premier trimestre maintenue

La croissance de l’économie marocaine s’est accélérée depuis le début de l’année, atteignant 4,8% au premier trimestre. Elle devrait se poursuivre avec une estimation de 4,6% au deuxième trimestre et 4,4% au troisième. Cette performance est principalement tirée par une demande intérieure dynamique (consommation et investissement). Cependant, la demande extérieure ralentit nettement, pénalisant les exportations et constituant le principal risque en matière de perspectives. L’inflation reste contenue, témoignant d’une détente des coûts malgré le dynamisme interne observé.
Les perspectives pour les deuxième et troisième trimestres s’inscrivent dans une tendance de croissance positive, confirmée par le HCP pour le premier trimestre 2025. C’est ce qui ressort de l’arrêté des comptes nationaux, qui fait état d’une amélioration de la croissance à 4,8%, contre 3% à la même période en 2024.
Dans la continuité, la croissance économique aurait atteint 4,6% au deuxième trimestre, et ce, malgré un contexte international toujours marqué par de fortes incertitudes. Ce rebond est porté par la vigueur des activités non agricoles, notamment les services, qui affichent depuis 2022 un rythme bien supérieur à celui observé entre 2010 et 2019.
Le secteur extractif a également bénéficié d’une demande mondiale soutenue en phosphate brut, selon le HCP, ce qui a entraîné une hausse notable des exportations, sur fond de tensions persistantes sur les cours des fertilisants. En parallèle, l’activité de la construction aurait progressé de 6,8%, dopée par l’intensification des grands chantiers d’infrastructures.
«Le premier semestre 2025 confirme une relance notable de l’économie marocaine, tirée principalement par la vigueur de la demande intérieure ainsi que par les performances des secteurs productifs», affirme Ali Ghanbouri, président du Centre de la prospection économique et sociale.
Selon lui, «la croissance du PIB a atteint 4,8% au premier trimestre, avant de se maintenir à un niveau élevé de 4,6% au deuxième trimestre, traduisant une reprise robuste de l’activité, notamment dans les services, la construction et les industries extractives».
Une relance incomplète et fragile
«Ce dynamisme repose sur l’expansion des dépenses des ménages, soutenue par une amélioration du marché du travail et une accélération des investissements, en particulier dans les infrastructures stratégiques. L’agriculture a également contribué positivement, malgré les aléas climatiques, grâce à la résilience des zones irriguées et aux mesures de soutien ciblées mises en place par le gouvernement», ajoute Ghanbouri.
Mais il tempère cet optimisme : «Cette relance reste incomplète, voire fragile, dans un environnement extérieur peu porteur. La demande étrangère ralentit nettement, notamment en raison du fléchissement de la croissance chez nos principaux partenaires européens. Par ailleurs, le déficit de la balance commerciale s’est creusé, sous l’effet de la vigueur persistante des importations, alors que les exportations peinent à suivre. Ainsi, le modèle de croissance repose encore largement sur les moteurs domestiques. Cela révèle une forte dépendance à la conjoncture extérieure, en particulier aux débouchés à l’export, ce qui plaide pour une stratégie de diversification accrue afin de renforcer la résilience de notre économie face aux chocs exogènes», souligne-t-il.
Dans cette dynamique, les perspectives pour le troisième trimestre 2025 confirment une poursuite de la croissance, bien que sur un rythme légèrement plus modéré. Selon les premières estimations, le PIB national devrait croître de 4,4% au troisième trimestre. La demande extérieure adressée au Maroc resterait peu dynamique, sur fond d’un ralentissement plus marqué de la croissance mondiale.
En revanche, la demande intérieure continuerait à jouer un rôle moteur, contribuant à hauteur de +6,6 points à la croissance. Portés par la reprise entamée fin 2024, l’investissement et la consommation devraient rester soutenus, bien que légèrement en repli, permettant aux activités non agricoles de progresser de 4,2%, après +4,4% au trimestre précédent.
Une progression solide au deuxième trimestre
L’économie nationale aurait enregistré une progression de 4,6% au deuxième trimestre 2025 en glissement annuel, portée par la bonne tenue des services et les performances robustes de la construction, des industries extractives et de l’agriculture. Cette dynamique, soutenue par une demande intérieure résiliente, devrait se poursuivre au troisième trimestre, bien qu’avec un léger ralentissement (estimé à +4,4%). Le cadre macroéconomique demeure globalement favorable, caractérisé par une croissance soutenue et une maîtrise relative des tensions inflationnistes.
Néanmoins, les perspectives à court terme restent marquées par des incertitudes, principalement liées à l’évolution de la demande étrangère, dont la faiblesse pourrait affecter les secteurs tournés vers l’export.Les moteurs internes de la croissance se sont renforcés dès le premier trimestre 2025. Les dépenses de consommation des ménages ont progressé de 4,4% en glissement annuel, contre +3,7% au trimestre précédent. L’investissement a également connu un net regain, avec une hausse de 17,5%, après +12,3% fin 2024.
Cette performance masque toutefois des contrastes sectoriels. Si les dépenses d’équipement dans le secteur manufacturier ont peu évolué, les investissements dans les infrastructures sportives, routières et hydrauliques ont nettement progressé, portés par une amélioration des flux de crédits, notamment dans les secteurs de l’eau et du bâtiment.
Au total, la contribution de la demande intérieure à la croissance du PIB s’est élevée à 8,5 points au premier trimestre, un niveau inédit depuis le rebond post-Covid. À l’inverse, la demande extérieure a continué de ralentir, amputant la croissance de 3,8 points. La baisse de la demande des partenaires européens a freiné la progression des exportations de biens et services, limitée à +2,2% au premier trimestre, contre +9,8% un trimestre plus tôt. En parallèle, les importations ont poursuivi leur hausse (+9,8%), tirées par une demande intérieure soutenue en biens d’équipement et de consommation.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO