Textile : le “Made in Morocco” à la conquête des marchés germanophones

Dans un contexte où les chaînes d’approvisionnement mondiales se recentrent sur des partenaires plus proches, l’AMITH engagera une opération stratégique en partenariat avec Swisscontact pour positionner le textile marocain sur les marchés allemand et suisse. Ce projet, alliant accompagnement ciblé et montée en compétence, s’inscrit dans une volonté claire de faire du Maroc un acteur crédible de la mode durable et compétitive.

L’Association marocaine des industries du textile et de l’habillement (AMITH) s’associe à Swisscontact dans une opération stratégique visant à connecter les industriels marocains du textile aux acheteurs allemands et suisses. Une démarche ciblée, pensée pour renforcer la position du Maroc sur l’échiquier mondial de la mode responsable.

Une ambition tournée vers l’export durable
Dans un monde où les chaînes de valeur se recomposent au gré des tensions géopolitiques, des impératifs climatiques et des nouvelles exigences de transparence, le Maroc cherche à consolider sa position de plateforme industrielle de proximité.

Et dans ce mouvement, le textile-habillement, secteur historique et pilier de l’emploi manufacturier national, entend jouer pleinement sa partition. L’AMITH se verra ainsi soutenue, par le Swiss import promotion programme (SIPPO), initiative financée par le secrétariat d’État suisse à l’Économie (SECO) et mise en œuvre par la fondation Swisscontact.

L’objectif est d’élargir le réseau de l’association et renforcer ses liens commerciaux avec des acteurs clés du textile en Suisse et en Allemagne, deux marchés exigeants mais stratégiques.

Un partenariat opérationnel et ciblé
Concrètement, cette opération prend la forme d’une mission à durée déterminée, mobilisant une équipe de consultants, qui sera chargée d’assurer un ancrage local efficace.

Le travail conjoint vise à identifier, préparer et connecter des entreprises marocaines susceptibles de répondre aux attentes de donneurs d’ordre germanophones, notamment en matière de production éthique, de qualité, de réactivité logistique et de traçabilité.

En ligne de mire, faciliter les prises de contact, organiser les rendez-vous d’affaires, adapter les supports de communication à ces marchés exigeants, et établir un suivi rigoureux des opportunités commerciales identifiées.

Le textile face au défi de la montée en gamme
Le positionnement visé par l’AMITH dans ce projet n’est pas celui du «low cost» ni du simple façonnier. Il s’agit au contraire de promouvoir un textile marocain compétitif, capable de monter en gamme, de valoriser la proximité géographique avec l’Europe, tout en intégrant des standards internationaux de durabilité.

Ce virage s’inscrit dans une dynamique plus large amorcée ces dernières années et marquées par les relocalisations partielles, la pression réglementaire accrue en Europe (notamment via la directive CSRD sur le reporting de durabilité), et la quête d’approvisionnements plus sûrs. Autant de facteurs qui redessinent les contours des partenariats industriels.

L’Allemagne et la Suisse, des marchés exigeants mais accessibles
L’Allemagne, plus grand marché européen de consommation textile, et la Suisse, place forte du commerce et du design, partagent des attentes communes en matière de conformité sociale, d’innovation textile (matières recyclées, techniques d’impression, etc.) et de responsabilité environnementale.

Pour y pénétrer durablement, les entreprises marocaines doivent non seulement répondre à des critères de qualité stricts, mais aussi faire preuve d’une capacité à dialoguer avec des acheteurs souvent familiers des certifications, labels et audits qualité. C’est là que le rôle d’accompagnement de Swisscontact prend tout son sens, en tant qu’intermédiaire facilitateur et garant d’un cadre structurant.

L’AMITH, un acteur structurant dans l’écosystème exportateur
En s’inscrivant dans ce projet, l’AMITH confirme son rôle d’organisation pivot dans l’architecture exportatrice du pays. Déjà engagée dans divers chantiers de structuration du secteur comme la digitalisation, la formation et le développement durable, l’association mise ici sur un effet de levier commercial, susceptible de déboucher sur des partenariats industriels durables et sur une montée en compétences des membres.

L’initiative est aussi en cohérence avec les orientations stratégiques du Maroc, qui cherche à renforcer ses flux d’exportation hors France et Espagne, pays historiquement dominants mais aujourd’hui saturés.

Une coopération qui vise l’autonomisation
La démarche portée par Swisscontact ne s’inscrit pas dans une logique d’assistanat ponctuel, mais bien dans une perspective de renforcement de capacité des structures locales.

À terme, il s’agit de permettre à l’AMITH de piloter seule ses actions de promotion des exportations, enrichie par les compétences acquises durant le projet (gestion de réseau, ciblage de marchés, adaptation de l’offre, suivi partenarial…).

En ce sens, la collaboration s’étend au-delà de la mise en relation, elle structure une méthode, outille une organisation, professionnalise une démarche.

Une fenêtre d’opportunité à ne pas manquer
À l’heure où l’Europe reconfigure ses chaînes d’approvisionnement et cherche des partenaires plus proches et plus fiables, le Maroc dispose d’atouts à faire valoir. Le tissu industriel textile, bien que hétérogène, bénéficie d’un savoir-faire reconnu, d’une situation géographique avantageuse, et d’une volonté croissante d’investir dans l’innovation responsable.

Encore faut-il créer les ponts, parler les bons langages commerciaux, et adapter son offre aux attentes culturelles et réglementaires des marchés cibles. C’est tout l’enjeu de cette mission pilotée par l’AMITH et Swisscontact, qui pourrait bien ouvrir la voie à une nouvelle génération de partenariats euro-marocains dans le textile.

Le textile en chiffres et perspectives

Le secteur amorce 2025 sur une note positive, avec une hausse de 5 % des exportations en janvier, générant un surplus de 180 millions de dirhams, portée par une croissance de près de 8 % des vêtements confectionnés. Mais cette reprise masque une dépendance persistante à quelques marchés clés, comme la France et l’Espagne, ainsi qu’à de grands donneurs d’ordre.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO