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Impératif climatique au Maroc : trouver les fonds pour sauver demain (VIDEOS)

Pour bâtir une économie durable, le Maroc mise sur une approche intégrée où l’eau, l’énergie renouvelable et la sécurité alimentaire forment un tout indissociable. Mais cet équilibre, sans cesse fragilisé par les enjeux climatiques, reste tributaire de financements encore insuffisants. Lors du Sustainable Finance Forum, organisé par la BMCI, décideurs, dirigeants de PME locales et experts internationaux en environnement ont l’accent sur cet impératif.

Décarboner, verdir, s’adapter… Depuis des années, l’économie mondiale joue l’équilibriste entre ambitions ESG et limites physiques bien réelles. Si, en l’état actuel, sobriété et efficacité énergétique s’imposent en tant que leviers incontournables pour baisser l’intensité carbone, la route reste sinueuse, en particulier sous l’ère Trump2, où les États-Unis (deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre après la Chine) «retournent leur veste» sur les engagements climatiques, en actant le retrait du Green deal. Mais aucune inquiétude manifeste parmi les acteurs de la chaîne de valeur du climat, réunis mardi à Casablanca, lors du Sustainable Finance Forumorganisé par la BMCI, où décideurs, dirigeants de PME locales et experts internationaux en environnement partagent à l’unanimité l’impératif climatique.

«La finance durable ne peut réussir sans une vision partagée et un engagement collectif», fait valoir Hicham Seffa, président du directoire de la BMCI devant un parterre réunissant, notamment, Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du Commerce et Nizar Baraka, ministre de l’Équipement et de l’Eau, en insistant sur l’urgence de conjuguer efforts publics et privés pour accélérer cette transition tant attendue.

Retombées économiques
La filiale du groupe BNP, qui inscrit le développement durable au cœur de son ADN, met en avant une série de réalisations concrètes. Première au Maroc à introduire, dès 2002, un crédit durable indexé sur des critères environnementaux, la BMCI a également marqué son engagement en lançant récemment un financement inclusif destiné aux associations de microfinance. En 2024, son Green tech roadshow a contribué à mettre en lumière des startups locales et à promouvoir des solutions technologiques en faveur de la transition énergétique.

«Nous avons l’ambition d’aller encore plus loin pour accompagner les entreprises dans leur transformation durable», a déclaré Seffa.

Au-delà des initiatives sectorielles, le forum a permis de souligner la nécessité d’intégrer pleinement les critères ESG pour maximiser les retombées économiques et sociales de la finance durable dans une économie profondément affectée par un stress hydrique aigu. En cela, la gestion de l’eau constitue un enjeu clé pour la résilience du Royaume face aux défis climatiques.

Avec l’objectif de porter sa capacité de stockage à 25 milliards de mètres cubes d’ici 2030, le pays déploie une politique ambitieuse, soutenue par la construction de 154 barrages d’envergure et 127 petits barrages. Ces infrastructures visent à sécuriser l’approvisionnement en eau potable tout en répondant aux besoins croissants d’irrigation, qui représentent 80% de la demande nationale. Le recours à des ressources non conventionnelles marque également une évolution majeure.

Le but est de produire 1,5 milliard de mètres cubes d’eau dessalée d’ici 2030, soit une multiplication par plus de cinq des capacités actuelles. Il s’inscrit dans une stratégie visant à diversifier les approvisionnements, notamment pour l’agriculture.

L’intégration des eaux usées traitées dans le cycle hydrique reflète une volonté d’optimisation maximale de chaque goutte d’eau disponible. Une ambition résumée par Nizar Baraka, ministre de l’Équipement et de l’Eau: «Nous devons réinventer notre rapport à l’eau», a-t-il affirmé, soulignant l’urgence d’adopter des pratiques responsables à tous les niveaux.

Des financements à la hauteur des ambitions
Pour soutenir cette stratégie, le budget du programme 2020-2027 a été porté de 115 à 145 milliards de dirhams. Le ministre a mis en avant le rôle du partenariat public-privé (PPP) pour mobiliser des fonds, notamment dans les projets de dessalement et de verdissement des ports. Il a également évoqué l’introduction possible d’«obligations vertes ou bleues» visant à diversifier les sources de financement.

En matière portuaire, des initiatives novatrices telles que les plaques solaires flottantes à Tanger Méditerranée contribuent à produire de l’énergie renouvelable tout en réduisant l’évaporation. Ces efforts visent à aligner les infrastructures sur les normes internationales et à favoriser l’exportation d’hydrogène vert. Les ambitions du Maroc ne s’arrêtent pas là.

«Le Maroc se positionne comme un réservoir énergétique unique pour la région et le monde, tout en ouvrant la voie à une nouvelle ère industrielle pour le pays», martèle Mezzour.

L’accès à une énergie compétitive permet au Royaume de mieux se positionner sur les marchés internationaux. Le ministre a insisté sur l’importance de la finance verte pour accompagner la transition industrielle. Il a toutefois dénoncé des blocages dans le processus de financement, en particulier concernant les crédits relais nécessaires pour compléter les investissements. La Charte de l’investissement prévoit un soutien public progressif, allant jusqu’à 30% du coût des projets, conditionné à la création d’emplois pérennes.

Cependant, les crédits relais, qui couvrent le reste des besoins, ne sont accordés que dans 10% des cas, selon Mezzour. Qualifiant cette impasse de «cercle vicieux», il a exhorté les acteurs à repenser leur approche du risque, soulignant qu’un financement plus audacieux est indispensable pour relever les défis pressants de l’urgence climatique.

Nizar Baraka
Ministre de l’Équipement et de l’Eau

«Avec un programme ambitieux de 145 milliards de dirhams, près de 154 barrages déjà en activité mobilisant 20 milliards de mètres cubes, et l’objectif de porter la capacité de dessalement à 1,5 milliard de mètres cubes d’ici 2030, le Maroc renforce sa vision d’une gestion durable
et équitable de l’eau.»

Ryad Mezzour
Ministre de l’Industrie et du Commerce

«Grâce à ses ressources renouvelables compétitives et à une stratégie industrielle claire, le Royaume s’impose comme un réservoir énergétique pour le monde, tout en ouvrant la voie à une nouvelle ère industrielle durable.»

Deux accords pour booster la transition durable

Lors de la deuxième édition du Sustainable finance forum, organisé à Casablanca, la BMCI a dévoilé deux alliances stratégiques visant à structurer la finance verte au Maroc. En partenariat avec la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la BMCI bénéficiera de la ligne GEFF III, dotée d’un financement vert de 35 millions d’euros.

Ce dispositif soutiendra les entreprises dans leurs efforts de décarbonation, de gestion durable de l’eau et de réduction des déchets. Un second accord, signé avec EcoVadis, introduit un mécanisme de financement indexé sur la performance RSE des entreprises.

Cette démarche encourage des pratiques responsables tout en offrant des conditions financières avantageuses. Deux initiatives qui traduisent la volonté accrue de faire de la finance durable un levier structurant pour accompagner les mutations environnementales et sociales du tissu économique.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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