Éco-Business

Industrie solaire photovoltaïque au Sahel : un potentiel énorme à deux pas du Maroc

Confronté aux défis du changement climatique et de la dépendance aux combustibles fossiles, le Sahel abrite un potentiel solaire exceptionnel qui pourrait transformer durablement son paysage énergétique et économique.

Selon le rapport de la Banque Africaine de Développement (BAD), les pays du Sahel disposent d’un potentiel solaire exceptionnel qui pourrait être mis à profit pour diversifier leurs économies, attirer les investissements et réduire les risques climatiques. Le rapport souligne qu’une industrie solaire photovoltaïque prospère dans la région pourrait générer entre 5.000 et 8.000 emplois pour une capacité installée de 2 GW supplémentaires au Burkina Faso, en Éthiopie, au Nigéria et au Sénégal.

Comme l’explique la BAD, «neuf pays africains ont fixé des objectifs de plus de 1 GW pour le solaire photovoltaïque d’ici 2030, soit plus de 20 GW de capacité solaire annoncée».

Cela représente une opportunité de marché potentielle de 2 à 7 GW pour les pays du Sahel examinés. Le rapport indique que le Ghana offre la plus grande opportunité pour le Burkina Faso, tandis que l’Éthiopie pourrait viser un marché jusqu’à 7 GW en 2030 en fournissant des pays comme le Soudan, le Kenya et la République démocratique du Congo.

Cependant, le développement d’une industrie locale de fabrication de panneaux solaires fait face à des défis majeurs. Comme le souligne le rapport, «sous les conditions actuelles, la production locale coûte 12% de plus que les coûts débarqués chinois au Burkina Faso, 11% de plus en Éthiopie et 10% de plus au Sénégal». Seul le Nigéria présente actuellement un avantage de coûts de 4% par rapport aux importations chinoises, grâce à des incitations fiscales et à la production locale de certains composants clés.

Une approche en trois étapes
Pour surmonter ces obstacles, le rapport préconise une approche en trois étapes : stimuler la demande solaire, renforcer la faisabilité bancaire des projets et localiser la fabrication des panneaux et des composants. Cela nécessitera des actions politiques, financières et techniques concertées des gouvernements, des institutions financières de développement, du secteur privé et d’autres parties prenantes. Sur le plan financier, le rapport insiste sur le fait que l’afflux actuel d’investissements pour les infrastructures vitales dans le Sahel est largement insuffisant pour permettre la construction d’une capacité de fabrication de panneaux solaires. Les gouvernements, les institutions financières de développement (IFD) et les écosystèmes de financement locaux devront donc conjuguer leurs efforts et déployer différents outils financiers.

Premièrement, pour stimuler la demande solaire photovoltaïque, les gouvernements et les services publics pourraient envoyer des signaux clairs au marché en lançant des appels d’offres pour des contrats d’achat d’électricité. Les IFD pourraient de leur côté fournir des capitaux aux développeurs solaires sous forme de prêts à faible coût, de subventions ou de garanties de prêt, afin de rendre ces projets bancables.

Deuxièmement, pour développer les infrastructures industrielles et logistiques nécessaires, les gouvernements, IFD et banques locales devraient mettre en place des mécanismes de financement structuré. Cela pourrait passer par l’émission d’obligations vertes, la mobilisation de fonds publics ou l’attraction d’investissements privés. Le rapport préconise également que les gouvernements et IFD financent des programmes de recherche et de développement, ainsi que des projets de démonstration pour présenter les nouvelles technologies solaires. Cela permettrait de favoriser l’innovation et le transfert de technologies.

Enfin, une collaboration financière renforcée entre acteurs régionaux et internationaux sera indispensable. Les pays du Sahel devront s’appuyer sur l’expertise et les ressources des IFD, des fonds souverains, des banques commerciales et des investisseurs institutionnels pour mobiliser les capitaux colossaux nécessaires à la mise en place de chaînes de valeur solaires viables.

En bref, stimuler une industrie solaire photovoltaïque compétitive au Sahel nécessitera un large éventail d’instruments financiers innovants, associant fonds publics et privés, capitaux étrangers et domestiques. Une coordination étroite entre gouvernements, IFD, banques et investisseurs sera la clé pour surmonter le manque criant d’investissements dans les infrastructures de la région.

Actions techniques, transfert de technologies, assistance
Enfin, des actions techniques comme le développement des compétences, le transfert de technologies et l’assistance en matière de politiques énergétiques seront cruciales. «Des programmes de formation pourraient être développés avec des agences de développement et des entreprises solaires de premier plan», suggère le rapport.

En renforçant l’intégration régionale et les partenariats stratégiques, les pays du Sahel pourraient tirer parti des complémentarités existantes au sein du continent. Par exemple, le Burkina Faso pourrait importer de l’aluminium du Ghana et du verre du Nigéria, tandis que le Sénégal pourrait s’approvisionner en aluminium et en verre au Maroc. Le rapport souligne que «l’intégration régionale permettrait de renforcer les chaînes d’approvisionnement, d’améliorer la compétitivité et d’accroître la création de valeur locale».

Des bénéfices sociaux et environnementaux significatifs

Au-delà des avantages économiques, une industrie solaire photovoltaïque alignée sur les normes internationales de qualité et de gouvernance environnementale, sociale et économique (ESG) pourrait apporter des bénéfices sociaux et environnementaux significatifs aux pays du Sahel.

Le rapport souligne que «Diversifier les économies largement dépendantes de l’agriculture et de l’extraction des ressources pourrait créer de la stabilité économique, réduire la dépendance aux marchés volatils et limiter les risques climatiques.»

En somme, le rapport de la BAD met en lumière le potentiel considérable d’une industrie solaire photovoltaïque régionale dans le Sahel pour stimuler le développement économique durable, créer des emplois et renforcer la résilience face aux changements climatiques. Cependant, sa concrétisation nécessitera une volonté politique forte, des investissements massifs et une coopération renforcée entre les pays de la région. Les prochaines années seront cruciales pour jeter les bases d’une transition énergétique réussie au Sahel.

Bilal Cherraji / Les Inspirations ÉCO



Taux directeur : le marché réclame une baisse !


Recevez les actualités économiques récentes sur votre WhatsApp Suivez les dernières actualités de LESECO.ma sur Google Actualités

Rejoignez LesEco.ma et recevez nos newsletters




Bouton retour en haut de la page