MarocTable ronde

Secteur privé : un levier à consolider

«L’inclusion numérique au Maroc : Comment réussir le pari ?». C’est le thème de la dernière table ronde organisée par Les Inspirations ÉCO. Pour débattre de cette thématique, plusieurs experts ont été conviés. Il s’agit de Hind Lfal, Secrétaire générale du groupe Orange Maroc, et Ghita Hannane, Country officer de la Société financière internationale (IFC), filiale de la Banque mondiale. Étaient également présents Ahmed Lkhaouja, expert de l’Union internationale des télécoms (UIT), Hassan Belkhayat, président de la Commission écosystème au sein de la CGEM, et Hamid Ben Elafdil, chef d’entreprise et président de la fondation Jadara. Le débat a porté sur plusieurs aspects inhérents à la situation actuelle de l’inclusion numérique dans le Royaume.

Le secteur privé constitue un élément clé dans le chantier de l’inclusion numérique. Opérateurs télécoms, start-ups, entreprises, autoentrepreneurs…, autant d’acteurs qui, chacun à son niveau, peuvent changer la donne pour réaliser plus rapidement les objectifs des diverses stratégies d’inclusion numérique adoptées à l’échelle nationale.

Le digital constitue un moyen efficace pour concrétiser l’inclusion économique et sociale. C’est la secrétaire générale d’Orange Maroc, Hind Lfal, qui le dit. Il faut préciser que l’opérateur télécoms a mis en place bon nombre de programmes et de dispositifs destinés à former les jeunes dans les divers métiers du digital.

Un opérateur actif
Les Orange Digital Centers (ODC) sont des centres de formation aux divers métiers du numérique (codage, développement web infographie…) qui ont permis l’accès au marché du travail de plus de 12.000 jeunes. Orange Maroc dispose également de Fab Lab solidaires destinés à l’accompagnement des jeunes en situation précaire afin de les initier aux divers métiers du numérique via des coachs experts. Hind Lfal précise que ces formations ont abouti à un taux d’emploi «extrêmement intéressant». «La dernière formation que nous avons organisée récemment consistait à apprendre à des jeunes novices ou en reconversion professionnelle comment réparer des iPhone, des télés, des iPad… Tous les formés ont pu trouver un emploi au terme de cette formation», a-t-elle indiqué.

Pour les femmes en milieu rural, Orange Maroc a déployé le programme «Maisons digitales», en partenariat avec des associations locales. Ce programme consiste dans l’installation de salles d’informatique dans leurs maisons ou lieux de vie pour leur apprendre à utiliser les smartphones ou les pc portables, le but étant de leur permettre de créer leur propre compte Facebook ou Instagram pour vendre leurs produits, en vue d’acquérir leur autonomie financière. «Le digital constitue, aujourd’hui, un tremplin efficace qui permet aux populations qui sont en dehors du circuit de trouver un emploi ou encore de réaliser leurs propres projets», affirme la secrétaire générale d’Orange Maroc.

Fondation Jadara : des programmes dédiés aux «meets»
Dans le même registre, Hamid Belafdil a indiqué que la fondation Jadara a récemment développé un programme baptisé «Wings by coding» qui a permis à un grand nombre de jeunes en situation de meet de suivre une formation dans le coding en leur accordant une bourse, ainsi qu’un accompagnement par un mentor en informatique. «Tous les lauréats ont pu décrocher des jobs extrêmement intéressants au Maroc ou à l’étranger, ou depuis le Maroc», a déclaré le président de la fondation Jadara.

«Nous avons aussi comme projet de former plus de 2.000 jeunes en situation de meet. On vient de signer plusieurs partenariats pour financer une partie de ce projet, notamment avec les régions Souss Massa-Drâa et Guelmim-Oued Noun. L’inclusion numérique doit se faire également en dehors de l’axe Casablanca-Rabat car il s’agit d’un enjeu majeur pour l’avenir économique du pays. Si on a l’infrastructure mais pas les talents, alors ce sera difficile de réaliser l’inclusion sociale», a-t-il indiqué.

Des projets qui ont pour vocation d’intégrer dans le marché de l’emploi des millions de jeunes en situation de meet. En effet, depuis 2019, la tranche des 15-25 ans représente 1.700.000 jeunes en dehors du travail ou de l’école. Quant à celle des 15-35 ans, elle compte quelque 4 millions qui sont dans la même situation.

Levée de fonds : un moyen efficace pour les start-ups
En ce qui concerne les start-ups, Hassan Belkhayat, président de la Commission écosystème au sein de la CGEM, a indiqué que la levée de fonds reste le moyen le plus utilisé pour le développement de l’écosystème des start-ups en Afrique. Au cours des dernières années, plus de 6 milliards de dollars ont été lévés au niveau des start-ups africaines. Au Maroc, le plafond ne dépasse pas les 20 millions de dirhams.

«Nous accusons un retard par rapport au développement de ce secteur mais, en même temps, cela dévoile le potentiel qu’on est condamné à réussir puisque c’est un secteur qui, de toutes les façons, va se développer. Il faut donc être présent à ce niveau- là», déclare Hassan Belkhayat.

Le responsable de la Commission écosystème au sein de la CGEM, attribue ce retard notamment au Code des marchés publics qui, selon lui, «n’est pas du tout favorable ou friendly pour les start-ups». Il estime que l’État est plutôt dans une logique d’internalisation qui fait que l’on trouve des «digital factories» dans tous les ministères. Une réalité qui va à l’encontre de la logique de développement d’un écosystème.

Afin de parer à cette déficience, Belkhayat préconise «un peu plus de courage politique et d’accepter de se tromper afin de développer des marchés ou des façons d’interagir avec des start-ups ou des entrepreneurs digitaux qui vont être utiles pour le citoyen, l’entreprise et le pays». Il considère inadmissible le fait que des entrepreneurs marocains dans le domaine de la santé puissent avoir accès à des marchés avec des gouvernements étrangers en Afrique, aux Émirats Arabes Unis, en Arabie Saoudite…, et pas chez eux, au Maroc !  Aussi appelle-t-il à réfléchir aux start-ups comme un véritable secteur de l’économie nationale, tout comme les secteurs industriel, agricole ou autres. Et d’ajouter que le Royaume possède «une véritable proposition en termes d’expertise et de benchmark, et le fait d’avoir un contrat avec le gouvernement marocain permettra aux start-ups de décrocher des contrats à l’international».

Ahmed Ibn Abdeljalil / Les Inspirations ÉCO



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