Statistiques publiques : le HCP monte d’un cran
C’est une nouvelle ère qui commence pour le HCP, qui se veut plus pertinent dans ses analyses. Tous les référentiels de base seront revus de fond en comble. Des enquêtes approfondies sont dans le pipe. Une manière pour préserver l’indépendance de l’institution.
Un Haut Commissariat au Plan plus persuasif dont les études sont encore plus pertinentes. Telle est la nouvelle vision de Ahmed Lahlimi qui tient mordicus à l’indépendance et à la pérennité de son institution. Pour ce faire, le HCP s’est doté d’un arsenal de projets en vue de moderniser l’institution des statistiques nationales en se basant sur un nouveau référentiel stratégique.
Certes, la référence dans les évaluations des politiques publiques s’est inscrite depuis 2015, dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), mais, actuellement, l’évolution est telle qu’il s’avère crucial d’y greffer de nouvelles orientations. Il s’agit notamment du Nouveau modèle de développement. Et le programme d’activité 2022-2025 s’y appuie comme base de référence.
«Nous devons non seulement retrouver l’alignement et la convergence entre les deux modèles. Pour arriver à cadrer les travaux, il est impératif de revisiter les données de base. Le monde connaît un remaniement profond de ces données géostratégiques et le Maroc doit suivre les échéances qui sont imminentes.
Dans ce contexte, il faut revoir l’appareil de production», affirme Lahlimi. C’est ainsi qu’un programme d’activité pour la période 2022-2025 a vu le jour tout en préservant les enquêtes historiques.
Le tissu entrepreneurial, une mine d’or
En effet, cette refonte consiste à actualiser la connaissance des politiques économiques, sociales et environnementales à travers la réalisation d’enquêtes approfondies. Pour commencer, une enquête sera dédiée aux entreprises pour s’enquérir de leur environnement et de leur évolution. Elle sera baptisée «Enquête nationale des structures économiques».
Dans la même perspective, l’analyse requiert une connaissance approfondie de l’informel que Ahmed Lahlimi qualifie de sphère du moment qu’il touche tous les secteurs d’activité. D’où l’intérêt de lancer une enquête qui permettra, ainsi, de déterminer la source du problème. Une étude aussi importante s’impose du côté de la société civile ou ce que le Haut Commissaire au Plan appelle «Les unités sans but lucratif».
Selon lui, il est primordial d’apporter un éclairage sur le rôle qu’elles jouent, ainsi que sur les bases et les facteurs de leur existence, avec un focus sur les activités réelles et surtout leur contribution au PIB.
Familles/ménages, des enquêtes plus pointues
La version revisitée des enquêtes mettra la lumière sur les ménages et le mode de vie et de gestion de la famille marocaine. Les enquêtes sociales traiteront de manière approfondie le niveau de vie des ménages, leurs revenus, les sources de leurs revenus, leurs dépenses, dans le but d’avoir une idée plus précise des inégalités sociales et l’évolution de la pauvreté sur le plan national, mais également territorial et permettra par conséquent de réactualiser le modèle de consommation. Ces données serviront de base pour les enquêtes sur les prix. A noter que les études, réalisées à ce jour, se sont basées sur des données qui datent de 2014.
Or, le modèle a évolué et est devenu caduc. Cette enquête, qui fera office de référence, permettra d’avoir plus de visibilité sur la structure sociale. En ce qui concerne la famille, le travail a d’ores et déjà été initié. «L’enquête sur la famille a nécessité deux années de travail qui ont été interrompues par la crise pandémique.
Il s’agit d’une enquête d’une importance capitale puisqu’elle donne un aperçu sur l’évolution des générations, de genres, des valeurs. Elle renseigne également sur l’impact de la distribution réelle perçue à travers des études économiques. Cette enquête requiert un encadrement de haut niveau et du temps», insiste-t-il.
S’agissant du temps, comme en 2012, un travail d’investigation sera mené pour analyser l’emploi du temps des Marocains. Une étude fondamentale pour l’analyse du comportement et de la transmission des valeurs. Ces chantiers seront étoffés par la réalisation du recensement, prévu pour 2024.
Le statisticien du royaume a notamment préparé l’avènement de ce travail à travers la conception du modèle de digitalisation du process et de la cartographie relative à la diffusion des informations. Un dispositif qui garantit plus de précision et de célérité.
L’impact régional prévaut
Toutefois, cette revisite des références de base est accompagnée par la production de statistiques au niveau régional. Un travail de base a été lancé, mais il manque un cadre institutionnel qui fédère les efforts mutuels des représentants des activités économiques et sociales et des statisticiens du HCP pour créer des bases de données, lesquelles permettront de mener la réflexion pour réaliser les PDR.
Le pas a été franchi au niveau de la région de Tanger. Le projet est en cours de réalisation dans d’autres régions. Mais pour mener à bien cette mission, le développement des outils utilisés pour l’analyse s’avère impératif. En effet, l’institution envisage d’enrichir l’arsenal. Dans ce sens, une réforme profonde du modèle de gestion et du processus d’enquête a été entamée.
Le site du HCP a également été revu de fond en comble. Et comme l’institution ne fait pas dans la demi-mesure, elle compte disposer d’un centre de gestion des données qui permettra de stocker l’ensemble des données collectées pour devenir le cloud national de la statistique.
Maryam Ouazani / Les Inspirations ÉCO