Français du Maroc/Législatives. Élisabeth Moreno : “Le non-vote ne profite à personne”
Élisabeth Moreno
Candidate de la majorité présidentielle
Candidate désignée pour assurer une majorité présidentielle à l’Assemblée nationale, Élisabeth Moreno a multiplié les meetings dans la 9e circonscription en vue des élections législatives prévues les 5 et 19 juin. Pour l’ex-ministre en charge de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances, il est important que les Français de l’étranger participent à ce scrutin. C’est le seul moyen pour eux de faire entendre leurs voix à Paris.
Vous avez été investie par la majorité présidentielle pour défendre ses couleurs lors de ces législatives dans la 9e circonscription des Français de l’étranger. Est-ce votre choix personnel ou une demande de la présidence ?
Vous le savez peut-être, j’ai, avant tout, un attachement personnel à cette circonscription. Je suis née au Cap Vert et j’y ai grandi. Puis, j’ai travaillé de nombreuses années à Casablanca au tout début de ma carrière professionnelle. Je me sens donc naturellement impliquée face aux enjeux auxquels font face nos concitoyens installés dans ces territoires. Cette circonscription incarne une des priorités diplomatiques du Président de la République, à savoir dynamiser et repenser les liens entre l’Afrique et la France. Il a souhaité qu’une ministre puisse porter son projet de coopération entre les deux rives de la Méditerranée jusqu’à l’Assemblée nationale, au service de ces Françaises et Français de l’étranger.
Quels sont les enjeux de ce rendez-vous électoral pour le président Macron ?
Je souhaite d’abord mettre toute mon énergie au service du rayonnement de la France au Maghreb et en Afrique de l’Ouest, aux côtés des Français établis dans ces territoires, afin que, collectivement, nous puissions contribuer à repenser la relation entre l’Afrique et la France. Cette circonscription est au cœur de cette équation et de tous les enjeux diplomatiques présentés par Emmanuel Macron à Ouagadougou. Il en va de ma responsabilité de donner une majorité au Président de la République afin que ces projets puissent se concrétiser.
Les préoccupations des Français de cette circonscription sont nombreuses. Si vous êtes élue, quels seront les sujets que vous défendrez ?
Ces préoccupations sont, non seulement nombreuses mais cruciales, afin que ces Françaises et Français, ainsi que les binationaux, puissent être fiers et conscients du rôle qu’ils jouent dans le rapprochement et la coopération entre les deux continents. J’ai eu la chance de pouvoir échanger à plusieurs reprises avec mes compatriotes établis dans ces territoires. Ils me font part des difficultés, voire des inégalités auxquelles ils font face au quotidien.
Ces problématiques, je les ai moi-même vécues. Cela doit changer. Parmi les chantiers prioritaires de mon programme, figurent l’accès à une éducation de qualité à un coût raisonnable, l’amélioration de la prise en charge et le droit de bénéficier des soins, ainsi que la promotion de l’entrepreneuriat. Sur l’éducation et la formation, les frais de scolarité demeurent encore trop élevés pour de nombreuses familles, qui renoncent ainsi à offrir un enseignement de qualité à leurs enfants.
Afin d’accompagner ces familles, le président de la république souhaite, par exemple, qu’elles bénéficient de chèques-éducation. Concernant la santé de nos concitoyens, je pense qu’il est primordial de faire évoluer le système de Caisse des Français de l’étranger vers un élargissement du champ d’accessibilité et de couverture, en particulier pour les plus vulnérables. Notre système manque de lisibilité. Je souhaite mettre fin à cette complexité afin que ces Français aient accès à un système de santé de qualité, au même titre que nos concitoyens en France. Enfin, je souhaite favoriser durablement une diplomatie économique entre les deux rives de la Méditerranée. La coopération économique régionale est une richesse pour nos deux continents..
Le Maroc est le pays où se concentre la plus forte communauté française. Que peut-elle attendre de vous ?
De toute évidence, il existe une relation historique et profonde entre le Maroc et la France. Pour y avoir vécu et travaillé durant de nombreuses années, j’ai pleinement conscience de ce lien qui unit nos deux pays et des opportunités que représente cette coopération. La France est, d’ailleurs, un partenaire économique majeur du Royaume. En témoigne l’ouverture récente du bureau de la BPI à Casablanca, par exemple. Le Maroc accueille aussi près de 800 filiales d’entreprises françaises dont 34 du CAC 40 ! Vous l’avez dit, il concentre la plus dense communauté de Françaises et de Français. Je mesure l’immense responsabilité qui est la mienne de pouvoir porter leur voix au sein de l’Assemblée nationale. Je souhaite avant tout qu’ils se sentent comme des citoyens à part entière, des acteurs d’une relation franco-marocaine renouvelée.
Toutefois, les relations France-Maroc sont ternies par la problématique des visas. La difficulté pour des chefs d’entreprises, des étudiants, des touristes et même des conjoints de ressortissants français d’obtenir le sésame pour l’Hexagone passe mal. En agissant ainsi, la France risque de perdre de son aura auprès des Marocains. Si vous êtes élue, comment traiterez-vous ce dossier épineux ?
Je veux d’abord que s’établisse un dialogue qui prenne en considération les points de vue et les attentes de chaque pays. C’est, en effet, un sujet éminemment important, et j’y suis très attentive puisqu’il s’agit, avant tout, d’un problème humain qui touche la vie de nombreux Franco-Marocains et de leurs proches. Ce sont des réalités du quotidien dont il s’agit. Ne pas pouvoir assister à un mariage ou reprendre son cursus universitaire à cause du visa, c’est dur, humiliant. Il y a urgence à agir, et j’en ferai l’un de mes premiers dossiers si je suis élue dans cette circonscription.
On peut craindre un fort taux d’abstention. À qui peut profiter le non-vote des électeurs de cette circonscription ?
Il est vrai que le taux d’abstention dans les circonscriptions des Français de l’étranger a atteint des records, entre 77% et 88%, lors des dernières élections législatives en 2017. Le non-vote ne profite à personne. Je voudrais même dire que les principales victimes seront la démocratie et les valeurs républicaines. Je voudrais aussi que mes concitoyens sachent que leurs voix comptent autant que les autres. Leur mobilisation est essentielle afin que les choses puissent changer dans le but d’améliorer leur quotidien. Ils sont les ambassadeurs du savoir-faire français. Leur implication dans la vie politique nationale est une chance pour la diplomatie économique et culturelle des deux pays.
Est-ce que vous craignez la Nupes dans cette bataille électorale ? Rappelons que le parti de Jean-Luc Mélenchon a réalisé un bon score au premier tour de l’élection présidentielle dans la 9e circonscription.
Ma seule préoccupation est de convaincre les Françaises et les Français installés dans ces territoires. Je souhaite leur présenter mon projet politique, celui du Président de la République, et leur prouver qu’il s’agit du projet le plus abouti, celui qui correspond le mieux, et de façon concrète, à leurs besoins. Il s’agit de ma première campagne. Naturellement, qu’il s’agisse de la Nupes ou de toutes autre formation politique, ce sont des candidats sérieux.
Vous êtes une cheffe d’entreprise, qu’est-ce qui vous a poussé à vous engager en politique ?
Il y a deux ans, lorsque j’ai pris mes fonctions de ministre déléguée auprès du Premier ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l’égalité des chances, je me suis rendu compte que je faisais de la politique depuis déjà plus de trente ans. Depuis mes 18 ans, je suis engagée et investie au service de l’intérêt général et de combats qui me tiennent à cœur, notamment au sein d’associations. Toutes celles et ceux qui mettent leur énergie au service des autres, font de la politique. Aujourd’hui, je mesure la chance qui m’a été donnée de représenter la France, en tant que ministre, et ainsi pouvoir défendre ces causes qui me sont chères au niveau le plus élevé qui soit dans un pays.
Fatima El Ouafi / Les Inspirations ÉCO