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Quel avenir pour Crédit du Maroc après la prise de contrôle d’Holmarcom ?

Le groupe Holmarcom aura sa propre banque. L’annonce officielle en a été faite mercredi. Il prendra le contrôle de 78,7% du capital de Crédit du Maroc cédés par Crédit Agricole S.A. Quelles seront les prochaines étapes pour entériner cette opération ? Les experts répondent. 

C’est acté ! Le groupe Holmarcom prend le contrôle de Crédit du Maroc (CDM), filiale marocaine de Crédit Agricole S.A. Les deux parties (Holmarcom et Crédit Agricole S.A) ont annoncé avoir signé un contrat de cession totale de la participation de 78,7% du groupe bancaire français, dans le capital de Crédit du Maroc, au profit du groupe appartenant à la famille Bensalah.

À présent que le deal est signé, quelles sont les étapes à venir ? La réponse d’Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al-Maghrib, a été précise, lors du conseil d’octobre dernier. «La loi est claire et nous appliquerons ses dispositions : tout changement de contrôle nécessite un nouvel agrément», avait-il annoncé au sujet du retrait envisagé du Crédit Agricole France de la banque de détail au Maroc.

Il avait aussi noté que «des hauts responsables du groupe bancaire français l’avaient contacté à ce sujet lors de la période estivale» et qu’«il appartient à la banque centrale d’examiner le dossier dans toutes ses composantes pour définir les conditions de la cession par le Comité des établissements de crédit à la banque centrale».

Un nouvel agrément bancaire


Chose dite, désormais, la procédure devrait suivre son cours, avec le dépôt d’une nouvelle demande d’agrément auprès de la banque centrale. Il faut dire que ce type de procédure n’a pas été fait auprès de l’institution depuis plusieurs années, en tout cas pas après 2006.

«D’habitude dans ce type d’opération, il est procédé à un transfert d’agrément bancaire entre l’acteur sortant et le nouvel acteur, sous supervision et accord de la banque centrale», nous explique un directeur opérant dans le secteur bancaire.

Toutefois, selon les termes du Dahir n ° 1-05-178 du 15 Moharrem 1427 portant promulgation de la loi n ° 34-03 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, et publié dans le Bulletin officiel n° 5400 du 2 mars 2006, «les changements qui affectent la nationalité, le contrôle d’un établissement de crédit ou la nature des opérations qu’il effectue habituellement sont subordonnés à l’octroi d’un nouvel agrément demandé et délivré dans les formes et conditions prévues à l’article 27».

Lequel énumère les prérequis pour la demande d’agrément ainsi que les conditions d’exercice bancaire en cas d’accord de Bank Al-Maghrib. «L’étude de la demande de l’agrément par la banque centrale ne devrait pas prendre beaucoup de temps. Il reste à savoir si la procédure au niveau de la Bourse de Casablanca se ferait avant ou après l’obtention du nouvel agrément bancaire par Holmarcom», estime un expert en banque.

Une OPA devrait suivre
En effet, quoiqu’il en soit, une procédure d’Offre publique d’achat (OPA) représente une des étapes qui découlent du deal Crédit du Maroc. Justement, la banque étant cotée à la Bourse de Casablanca est conditionnée par une offre émise par Holmarcom.

«La transaction doit donc passer au niveau de la Bourse, c’est à ce moment qu’on découvrira le prix de l’acquisition, qui devrait être proche du prix transactionnel actuel du marché. A priori, il y aurait certainement une décote», note un analyste de la place financière. Il faudra aussi connaître le prix du rachat du reliquat du capital qui se fera dans les 18 mois qui suivent.

À ce niveau, l’analyste explique qu’«il faudrait savoir s’il se fera aux mêmes conditions décidées pour la première opération. Ou, y aura-t-il d’autres conditions annexées aux réalisations de la banque ou encore son cours sur le marché boursier». Une fois le coût total de l’opération connu, les analystes pourront donc déduire les niveaux de valorisation sur lesquels la transaction s’est faite.

Rappelons que, selon l’annonce d’Holmarcom et Crédit Agricole S.A, la réalisation de cette opération interviendrait en deux temps. En premier, le rachat d’une tranche de 63,7% (50,9% par Holmarcom Finance Company (HFC) et 12,8% par AtlantaSanad) d’ici la fin de l’année, puis une seconde tranche portant sur le rachat des 15% restants du capital de Crédit du Maroc, dix-huit mois après la clôture de la transaction.

Une fois ces conditions détaillées et annoncées, Holmarcom et AtlantaSanad doivent donc lancer une OPA sur le marché, conformément à la réglementation en vigueur. Et puisqu’elles prennent le contrôle de plus de 40% du capital de Crédit du Maroc, elle devrait se faire en principe au même prix d’achat.

Rappelons que selon les récentes valorisations du marché, CDM pèse entre 5 et 6 MMDH, mais tout dépendra des détails des négociations entre Holmarcom et Crédit Agricole S.A.  Il est aussi question d’observer les participations d’Holmarcom dans d’autres banques de la place.

En effet, il faudra suivre de près s’il y aura des allégements ou encore des retraits de l’opérateur du capital desdites banques. Faut-il le rappeler, le groupe piloté par la famille Bensalah détient des participations minoritaires dans CIH Bank (en direct) et BMCI (à travers AtlantaSanad).

« Holmarcom n’est pas présent dans les conseils d’administration de ces banques, donc on peut dire que ce sont des participations dormantes. Tout dépendra de l’appréciation de la banque centrale», laisse entendre notre expert en banque.

Les répercussions de l’opération
Suite à cette prise de participation majoritaire de son capital, CDM sortirait gagnante et verrait son périmètre d’activité élargi. La banque était plutôt fiscalisée sur le marché domestique, et ne pouvait pas s’ouvrir à de nouveaux métiers bancaires, voire à une expansion en Afrique, puisque sa maison mère y est déjà présente. L’expert en banque note dans cette logique que «dorénavant, CDM aura facilement la possibilité de se déployer en Afrique, notamment pour accompagner l’expansion déjà lancée par AtlantaSanad dans le continent.

Ceci pourrait notamment se faire soit à travers des acquisitions ou encore des créations». De plus, et à partir de 2026, date d’échéance de son contrat de bancassurance avec Saham, CDM pourrait profiter de plus de synergies avec AtlantaSanad. «Ceci dit, rien n’empêche la banque de procéder à des synergies avec la filiale d’Holmarcom, dès la concrétisation de l’acquisition.

Ceci représente en effet, un couloir de croissance en matière de bancassurance pour les deux opérateurs», affirme notre interlocuteur. Dans les années à venir, CDM pourrait donc se transformer en véhicule de rayonnement économique du Maroc sur l’Afrique, piloté par Holmarcom. Cette acquisition ouvre de nouvelles voies de croissance pour Holmarcom. Le projet d’acquisition s’inscrit dans le cadre de sa vision stratégique visant à construire un pôle financier intégré avec une vocation panafricaine.

Le groupe avait, à cet effet, opéré, en 2019, une réorganisation structurelle de ce pôle dans l’objectif d’accompagner ses ambitions de développement qui s’articulent autour du renforcement de sa position dans le secteur des assurances, la diversification de ses métiers financiers et l’accélération de son expansion en Afrique subsaharienne.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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