Système fiscal: les défis de Fouzi Lekjaa
L’économie marocaine négocie sa transition vers un nouveau paradigme. Pour ce faire, de nombreux défis sont à relever. À commencer par une refonte en profondeur de son système fiscal.
Comment faire face au niveau d’incertitude qui marquera les prochaines années, exacerbé par la crise sanitaire ? Comment assurer plus de convergence et de fluidité afin de faire émerger des marges de développement exogènes de l’économie marocaine, étant donné que les marges endogènes sont épuisées, ou encore, comment assurer l’efficacité et efficience de la gestion des finances publiques ? Les économistes et spécialistes de la finance publique ont débattu sur le sujet, les 19 et 20 novembre, lors de la 14e édition du Colloque des finances publiques, organisé par la Trésorerie générale du royaumes (TGR) et la Fondafip (Association pour la fondation internationale de finances publiques.. Face à la nouvelle donne qu’impose la conjoncture, l’économie marocaine n’a pas d’autre choix que de dépasser la vision à court terme des budgets annuels, souligne Mohamed Tawfik Mouline, directeur général de l’IRES, pour planter le décor.
En effet, le financement de l’économie marocaine fait face à de nouvelles exigences. Le Nouveau modèle de développement a mis le cap sur les principaux chantiers de réforme à mener au cours des prochaines années. Autant de projets structurants qui nécessitent la mobilisation des financements nécessaires pour atteindre les objectifs fixés. L’un des principaux leviers pour répondre aux nouvelles exigences du financement de l’économie demeure la programmation pluriannuelle. Il s’agit de l’un des principaux mécanismes de réforme des finances publiques. Et un choix irréversible, selon Fouzi Lekjaa, ministre délégué chargé du Budget. L’idée est d’établir un lien entre les stratégies à moyen et long terme et le budget annuel. Cela permettra de renforcer la discipline budgétaire et de s’assurer que les ressources sont bien allouées. L’objectif est de gérer l’équilibre entre les besoins énormes et les ressources disponibles dans un contexte de crise sanitaire qui a accentué la détérioration des équilibres budgétaires.
«Aujourd’hui, nous avons atteint le seuil record d’endettement, avec plus de 76% du PIB», fait observer Lekjaa. Et même avec la nouvelle loi organique de finances, ayant introduit la programmation triannuelle, le ministre note, certes, une amélioration, mais déplore toujours la lenteur de la progression dont l’explication est apportée par des causes exogènes. De plus, la complexité de la période actuelle accentue la pression et exige une refonte totale des approches pour mener à bien ses grands chantiers du Nouveau modèle de développement. La feuille de route arrêtée identifie les objectifs précis avec des dépenses tout aussi précises, nécessitant la mobilisation des ressources dans le cadre d’une programmation pluriannuelle fiable. «Or, actuellement, nous disposons d’un budget où la flexibilité est inexistante», regrette le ministre délégué chargé du Budget. L’absence de marge au niveau des ressources rend compliquée la donne. Cela s’illustre par des charges du personnel, des intérêts de la dette, ainsi que des dépenses courantes et de compensation qui absorbent près de 100 % des recettes ordinaires. D’où la nécessité d’identifier de nouvelles marges. Le ministre délégué plaide pour une réforme de bout en bout du système fiscal, au-delà des aménagements conjoncturels. Un tel chantier devrait passer par un ajustement à opérer au niveau des fondamentaux culturels. L’objectif étant de faire de la fiscalité un levier majeur de développement économique. Le deuxième levier à activer est la modernisation des établissements et entreprises publiques. Autre levier, les financements provenant de nouveaux mécanismes tels le Fonds Mohammed VI pour l’investissement. Idem pour les partenariats public-privé qui permettraient à l’État de se concentrer sur d’autres priorités.
Les grands défis de la finance publique à notre ère
Ces défis concernent le développement, la mondialisation, l’urbanisation, le numérique et l’économie du savoir. Mais aussi l’éducation, la santé, le vieillissement de la population, le réchauffement climatique, les traitements des inégalités sociales, ou encore le chômage de masse.
Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO