Musée Bank Al-Maghrib : Aghmat, à la recherche de la cité perdue…
Le Musée Bank Al-Maghrib a proposé une visite virtuelle et une e-conférence inspirante autour de la cité médiévale de Aghmat, jeudi 12 novembre. Coulisses d’un évènement culturel digital dans l’air du temps baptisé «Aghmat, passé rayonnant d’une cité marocaine».
Depuis les réseaux sociaux, jeudi soir, les amoureux de l’histoire du Maroc ont pu suivre une conférence remarquable sur une ville peu connue, chargée d’histoire et qui gagne à être sous les feux des projecteurs. Il s’agit de Aghmat, qui a marqué l’histoire du pays et dont l’empreinte sur l’évolution du Maroc médiéval a eu des influences et des conséquences jusqu’aux temps modernes. «Il s’agit de faire connaître l’évolution de la cité à travers sa présence dans la bibliographie, tout en ayant un aperçu sur les travaux archéologiques, les vestiges. C’est un tournant dans la recherche archéologique au Maroc», explique Youssef Khiara, directeur du patrimoine au ministère de la Culture. Il a inauguré cette conférence par un retour sur le passé archéologique du Maroc en rappelant que, depuis 1912, les premiers textes sur les monuments historiques montraient un intérêt archéologie islamique axé sur les monuments ; une logique de l’époque où l’on était orienté histoire de l’art. À ce moment-là, l’on mettait en avant les médinas, les mosquées, les ouvrages militaires. L’archéologie a tardé à venir au Maroc selon le spécialiste. «Ce patrimoine a un énorme potentiel qui n’est pas encore exploité sur le plan économique. L’intérêt est plus historique qu’autre chose. Ces centres d’intérêt pourraient drainer un public marocain ou des amoureux du Maroc venant du monde», continue Youssef Khiara.
Aghmat, un bijou oublié
Le site archéologique de Ghmate ou de Aghmat est une ancienne ville berbère, marocaine et un site archéologique caché au pied du Haut Atlas, à 30 km de Marrakech sur la route de la vallée de l’Ourika. Selon Abdellah Fili, commissaire de l’exposition, Aghmat a su imposer un urbanisme de grande envergure. «Nous disposons d’un programme urbain et hydraulique de la ville», informe le commissaire de l’exposition qui insiste sur la valeur inestimable de cette région. Il rappelle que la cité est antérieure à l’avènement de l’islam, qu’il y a eu des civilisations bien avant, que c’est une ville et un atelier monétaire idrissides conséquent. Aghmat a été la capitale de l’émirat des Maghrawa, fin 10e siècle -1057- et la première capitale almoravide avant la fondation de Marrakech (1057-1070). Elle a connu l’exil de rois andalous, Moutamid Ibn Abbâd et Abdellah Ibn Bouloukhin, et c’est un port du commerce transsaharien entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne. Cette cité, peu connue, dont l’histoire est incroyable a été un centre majeur du soufisme marocain, la plus ancienne zaouia marocaine que l’histoire ait connue. Elle est dotée d’une mosquée, d’un palais, d’un hammam et d’un espace habitat. Le hammam était un lieu privilégié et important à l’époque, il s’agit d’ailleurs du plus grand hammam de l’Occident musulman, dont la superficie est de 500 m2, datant du 10e/14e siècle. Le palais, quant à lui, en ruine aujourd’hui, date du 12e/14e siècle et la mosquée du 10e/14e siècle. Nombreux sont ses trésors cachés, Aghmat est également un atelier monétaire majeur. Dans le cadre de cette exposition, un ensemble de travaux de rénovation ont été mis en place. La restauration du système de chauffage du hammam et de la plateforme en verre a permis aux visiteurs de profiter de la beauté des lieux. Une opération de consolidation a pu redonner vie au palais qui était dans un piètre état, selon le commissaire de l’exposition. L’objectif est de préserver les vestiges, de valoriser et promouvoir le potentiel archéologique, afin d’en faire un levier de développement local, de permettre aux habitants de Aghmat de s’approprier le site et d’impliquer des acteurs locaux. Un plan d’action a été révélé, qui permet la sécurisation, l’équipement et la gestion du site pour en faire un lieu archéologique majeur à l’échelle continentale et internationale.
Jihane Bougrine / Les Inspirations Éco