L’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption : quel rôle à jouer ?
Le Conseil de gouvernement, réuni jeudi à Rabat sous la présidence du chef du gouvernement, Saâdeddine El Otmani, a approuvé, le projet de loi n° 46.19, relatif à l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption (INPPLC).
Ce projet de loi s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions de la Constitution, notamment l’article 167, en renforçant la place de l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption en tant qu’institution nationale de gouvernance, qui exerce ses fonctions, dans un cadre de coopération, de complémentarité et de coordination institutionnelle et fonctionnelle avec les autorités, les institutions et les autres instances du système national de lutte contre la corruption, a indiqué le ministre de l’Éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, porte-parole du gouvernement, Saaid Amzazi, dans un communiqué lu à l’issue de cette réunion.
Cette approbation vient suite à un long périple. En effet,le projet de loi n° 46.19 a été proposé en 2015. Pour activer cette instance, la révision de la loi s’était imposée en vue de passer à l’étape de la nomination des membres. Le texte de loi a été conçu afin qu’il soit conforme aux dispositions constitutionnelles de manière à ce que l’instance puisse jouer pleinement son rôle de supervision et de coordination des politiques publiques mais aussi d’investigation. «La révision devrait s’effectuer rapidement. La question du temps est en effet un élément important pour la crédibilité de l’action; d’autant plus que les choix sont tranchés et l’on sait quels sont les éléments sur lesquels il faut agir», avait précédemment déclaré le président de l’INPPLC, Mohamed Bachir Rachdi à LesEco.
Objectifs du projet
Les objectifs de ce projet portent sur l’élargissement du concept de corruption, en reformulant les dispositions liées à la définition du concept de corruption et en distinguant deux types d’actes de corruption définissant le domaine d’intervention de l’Instance, a-t-il relevé, précisant qu’il s’agit de faits constituant des crimes de par leur nature, leurs éléments constitutifs étant clairs, lesquels sont renvoyés par l’Instance devant le ministère public compétent.
Il s’agit, de même, d’actes qui constituent des violations administratives et financières revêtant un caractère particulier, mais qui ne sont pas élevés au rang de crimes à part entière, tout en permettant à l’instance de mener des recherches et des enquêtes et de préparer des rapports qui seront transmis aux autorités et instances compétentes pour le lancement des procédures disciplinaires ou pénales selon les cas.
Les objectifs du projet consistent également à l’élargissement des missions et des domaines d’intervention de l’instance, à travers le réexamen de ses tâches à la lumière des dispositions de la Constitution, qui reposent sur trois dimensions fondamentales, en l’occurrence les dimensions éthiques et préventives de l’Instance, en lui conférant la prérogative de proposer des orientations stratégiques de la politique de l’État dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la corruption et les mécanismes, mesures et procédures pour la mettre en œuvre de manière optimale, en conduisant une stratégie nationale intégrée de formation éducative et sociale sur les valeurs d’intégrité, en particulier dans les domaines de l’éducation et de la formation, outre la dimension d’intervention à travers la contribution à la lutte contre la corruption, en conférant à l’instance un ensemble de nouvelles prérogatives en raison de l’élargissement du concept de corruption.
L’instance va camper le rôle de superviseur en matière d’implémentation de cette stratégie ainsi que de coordination des politiques publiques y afférentes. L’instance de la probité va en effet travailler en étroite collaboration avec plusieurs acteurs dont le gouvernement, le Parlement et l’autorité judiciaire, pour pouvoir venir à bout du fléau de la corruption et l’extirper de ses racines. Elle devra jouer un rôle de catalyseur de l’action de lutte contre la corruption.
Malgré les efforts consentis au cours des dernières années, la corruption entrave toujours le développement du pays. Ce constat sonne, à chaque fois, comme une sonnette d’alarme pour l’ensemble des acteurs concernés. L’INPPLC vise à renforcer la transparence et améliorer le score en matière de perception de la corruption afin d’attirer les IDE et booster les investissements nationaux. La concrétisation de cet objectif passe par le traitement de toutes les faiblesses détectées à ce niveau.
Rôle pénal
Le projet prévoit également l’application de sanctions disciplinaires et pénales à l’endroit des personnes qui entravent les travaux de l’instance en s’abstenant de répondre à ses demandes sans justification légale.
En outre, le projet de loi porte sur la révision des attributions des organes de l’instance, en stipulant la nomination de trois vice-présidents, la création d’un comité permanent auprès du conseil de l’instance, composé du président et de trois vice-présidents, nommés par son conseil, et chargés d’étudier les dossiers des affaires liées à la corruption y afférentes, et de prendre des décisions les concernant au nom du conseil, en renvoyant leurs conclusions et recommandations aux autorités concernées par le lancement de la procédure administrative ou pénale, en infirmant le président de l’instance de l’ensemble des données relatives à tous les dossiers présentés devant l’instance ou renvoyés au comité permanent.
En vertu du projet, le président de l’instance prépare tous les mécanismes nécessaires pour permettre à l’instance d’exercer ses attributions, comme c’est le cas en ce qui concerne l’élaboration de tous les projets de décisions à présenter au conseil de l’instance et à préparer des projets de règlement interne de l’instance, le système des transactions, le statut des ressources humaines, son rapport annuel et autres textes, pour autant que ces textes soient soumis à l’approbation du Conseil d’administration de l’instance pour délibération.
Le chef de gouvernement a plaidé pour la pleine coopération durant les prochaines étapes en vue de l’adoption de ce texte au Parlement, puisqu' »il permettra à l’Instance de devenir un outil plus puissant qu’elle ne l’était dans la lutte contre la corruption ».