Opinions

Économie mondiale : une année 2024 complexe

Par Jawad KERDOUDI
Président de l’IMRI

L’année 2024 s’est terminée dans un contexte international complexe, dominé par de multiples affrontements commerciaux, technologiques et militaires (Ukraine, Moyen-Orient…), générant des divergences entre les dimensions réelle et financière de l’économie, mais aussi entre les principales économies dans le monde.

Ce fut une nouvelle année des années 2020, caractérisée par l’énorme écart entre le discours et la réalité (y compris la perspective de transition vers une économie verte), la persistance de l’incertitude à un niveau élevé (compte tenu également du contexte électoral), la continuité de la tendance à la hausse du ratio dette publique/PIB et l’intensification de l’intégration économique entre économies émergentes et en développement.

D’une part, l’année 2024 s’est terminée de manière très positive pour ce qui est du côté financier de l’économie, avec des marchés boursiers qui ont atteint des niveaux record, l’indice MSCI All Country augmentant de plus de 15%, selon la plateforme Investing.com.

Cette évolution a été soutenue par plusieurs facteurs, parmi lesquels la résilience croissante des entreprises et des ménages face à la persistance des tensions géopolitiques, l’intégration du progrès technologique (révolutions numérique et digitale (IA) et la décélération des pressions inflationnistes (qui a déterminé les banques centrales à entamer un cycle de baisse des taux d’intérêt et à signaler la continuité de ce cycle dans les trimestres à venir). On peut relever la performance du marché boursier américain (avec le S&P 500 en hausse de plus de 23%), une évolution récemment soutenue par les résultats des élections présidentielles.

En revanche, le côté réel de l’économie mondiale a continué de croître à un rythme faible en 2024, une évolution déterminée par plusieurs facteurs, notamment le niveau élevé d’incertitude (déterminé par la persistance des tensions géopolitiques), la confrontation commerciale entre les plus grands blocs économiques et le niveau élevé des coûts de financement réels. Les chiffres récemment publiés par le Bureau néerlandais d’analyse de la politique économique (CPB) montrent l’augmentation du volume du commerce international de marchandises et de celui de la production industrielle mondiale à des rythmes annuels moyens faibles, de 1,5% et 1,6% de janvier à septembre 2024.

En conséquence, l’écart entre le climat des marchés boursiers et l’évolution de l’activité économique réelle s’est creusé en 2024. En outre, en 2024, on peut également constater la divergence entre les plus grands blocs économiques du monde, l’économie de l’Union européenne étant la plus perdante des courses mondiales, en raison de ses défis structurels, à savoir la compétitivité et la convergence. Par exemple, selon les statistiques du CPB, le volume de la production industrielle a augmenté à un rythme annuel moyen de 5,6% en Chine, tandis qu’il s’est contracté aux États-Unis et dans la zone euro avec une dynamique annuelle moyenne de 0,3% et 3,3%, respectivement, entre janvier et septembre 2024.

En ce qui concerne la dynamique du PIB, on constate une consolidation du rythme de croissance annuel aux États-Unis (la plus grande économie du monde, avec un PIB nominal de plus de 29.300 milliards de dollars au T3 – 2024) autour de son potentiel cette année (estimé à 2,9%). Ce qu’on appelle l’exceptionnalisme américain a été déterminé par la dynamique des investissements fixes (rythme annuel supérieur à celui de la consommation privée pour le 5e trimestre consécutif au T3 – 2024, selon les estimations du Bureau of economic analysis), compte tenu du climat positif sur les marchés financiers et de l’intégration du progrès technologique.

Dans le même temps, les perspectives de continuité du cycle de baisse des taux d’intérêt par la Réserve fédérale et les perspectives d’amélioration du revenu réel disponible au cours des prochains trimestres (dans un contexte de ralentissement des pressions inflationnistes) ont contribué à la consolidation du rythme de croissance annuel aux USA autour de son potentiel cette année.

En Chine (la deuxième économie du monde, avec une dimension nominale estimée à environ 18.000 milliards de dollars en 2024), l’activité économique a augmenté à un rythme annuel moyen de 4,8% au cours des trois premiers trimestres de l’année 2024 (proche de l’objectif de 5% fixé par les décideurs de la politique économique), une évolution soutenue par la dynamique des investissements (les investissements en immobilisations hors immobilier ayant augmenté à un rythme annuel moyen de 7,7% pour les neuf premiers mois de 2024, selon les estimations du Bureau national des statistiques de Chine).

D’autre part, l’économie de l’Union européenne a progressé à un rythme annuel moyen inférieur à 1% entre janvier et septembre 2024, selon les estimations d’Eurostat. Ce faible rythme de croissance de l’activité économique dans la région a été principalement déterminé par la baisse de la formation brute de capital fixe, pour le troisième trimestre consécutif au T3 – 2024.

Au terme de cette analyse, je souligne la légère amélioration de l’économie mondiale à la fin de 2024, comme en témoigne la hausse de l’indicateur composite PMI (Purchasing managers index) en novembre, au plus haut niveau depuis le mois d’août, selon les statistiques de S&P Global.

Cette évolution a été déterminée par le climat positif sur les marchés financiers internationaux et les perspectives de mix de politique économique dans les plus grands blocs économiques du monde au cours des prochains trimestres (l’accent étant mis sur les investissements et la productivité). Les risques, les défis et les divergences persistent à des niveaux élevés dans le monde à la fin de 2024, rendant plus que jamais nécessaire un nouvel élan de Bretton Woods, comme ce fut le cas à l’été 1944.



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