Maroc

TPE-PME : Intelaka, l’espoir éphémère

Les crises se succèdent et la situation des TPE-PME continue de se détériorer. De la crise pandémique à l’inflation en passant par l’augmentation du taux directeur, ce tissu économique accumule les faillites. Certes, des programmes ont été lancés pour redresser la situation, mais ces derniers semblent inappropriés à cette catégorie d’entreprise. Décryptage.

La catégorie des petites et moyennes entreprises n’est pas sortie de l’auberge. Fragilisé, ce tissu économique, qui représente 95% de l’économie marocaine, pâtit de bon nombre de difficultés qui ne font que s’accentuer avec l’impact des faits conjoncturels. Pour Abdellah El Fergui, président de la Confédération marocaine des TPE-PME, le supplice de ces entreprises date d’avant même la crise pandémique.
«Ce type d’entreprise ne bénéficie pas à la base d’une assiette financière importante. Une situation qui empire avec les difficultés d’accès au financement, aux commandes publiques et au foncier. Le fardeau des retards de paiement est une autre paire de manches. La survenue de la crise sanitaire n’a fait qu’enfoncer le couteau dans la plaie», se désole El Fergui.
En effet, à en croire les dernières statistiques de la confédération, 83 % des TPE-PME, des autoentrepreneurs et des coopératives ont été à l’arrêt total durant la pandémie. Le pire est que cette catégorie n’a pas été concernée par les programmes de relance, contrairement aux grandes entreprises. Ce qui n’a guère favorisé la reprise, selon la confédération. Dans le même sillage, celle-ci reproche au gouvernement le manque d’engagement envers les TPE-PME, puisque aucun programme n’a été déployé. Certes, des programmes, tels que Forsa et Ana Moukawil, ont été initiés récemment, mais du point de vue du président de la confédération, ce sont des projets à petite dimension, eu égard au budget déployé qui demeure très faible. «Je dirais qu’il y a un manque d’équité dans ces programmes. Lorsqu’il s’agit de grandes entreprises, le gouvernement se bouscule au portillon, alors que pour cette catégorie, les choses n’avancent pas. Il n’y a pas meilleure preuve que la stratégie dédiée aux TPE, lancée en 2013, et qui est restée lettre morte depuis, alors que ces entreprises ont fortement besoin de soutien et d’aide. S’ajoute à cela la non-application de la loi 156 qui octroie un quota de 20% des commandes publiques aux TPME», insiste El Fergui.
Intelaka, le programme adapté
A noter que le programme Intelaka, initié sous l’impulsion de la plus haute instance du pays, était perçu telle une bouffée d’oxygène pour cette catégorie. Mais pour l’heure, c’est le statu quo, surtout que des irrégularités ont été constatées au lancement.
À ce sujet, le président de la confédération sollicite les pouvoirs publics pour évaluer ce programme de manière approfondie pour en tirer des conclusions et pouvoir ainsi le relancer car bien des espoirs sont fondés sur ce programme qui reste le plus approprié à cette catégorie d’entreprises. Mais, la démarche semble à l’arrêt bien avant le relèvement à trois reprises du taux directeur. Une question qui reste en suspens car, même du côté de la confédération, on n’a pas eu de retour. Toutefois, si les négociations ont été arrêtées avec le patronat, il n’en est pas de même avec le gouvernement.
D’ailleurs, une réunion est prévue dans les semaines qui viennent pour discuter de l’imposition appliquée aux TPE et aux autoentrepreneurs ainsi que du financement. D’un autre côté, le mouvement inflationniste et la sécheresse sévère qui ont frappé le pays n’ont fait qu’affaiblir cette tranche. Preuve en est le nombre d’entreprises qui ont mis la clé sous le paillasson en 2021 et 2022. Les statistiques de la confédération révèlent que plus de 20.000 TPE et PME ont fait faillite en 2021. Leur nombre est passé à 25.000 l’année suivante et 250.000 sont menacées. Et pour redresser la situation, la confédération suggère tout d’abord d’apporter une définition claire de la TPE pour dissiper la confusion. Elle propose également de créer une banque d’État, à l’instar d’autres pays, pour financer exclusivement les TPE.
En dehors de l’application des lois en vigueur concernant les commandes publiques, la confédération met l’accent sur la création d’une loi qui protège les sous-traitants contre les retards de paiement. Dans la même perspective, la confédération recommande d’assouplir les procédures de classement des TPE quant aux marchés des commandes des régions, car la circulaire du ministère de l’Intérieur de 2019 en exclut les TPE-PME non classées. L’autre recommandation concerne l’intégration de la confédération dans le dialogue social ainsi que la prise en compte de ses propositions dans le projet de loi de Finances.

Maryam Ouazani / Les Inspirations ÉCO



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