Tourisme. Marrakech et Essaouira: opération « séduction » pour attirer les Marocains d’Israël
Sur le million de juifs d’origine marocaine établis en Israël, seuls 50.000 à 70.000 se rendent au royaume pour le tourisme, le pèlerinage ou les fêtes religieuses. Un manque à gagner que les opérateurs nationaux cherchent à récupérer en lançant une vaste opération séduction autour des destinations Marrakech et Essaouira.
Les professionnels du tourisme, sous la coupole de la Confédération nationale du tourisme (CNT), veulent donner une impulsion aux villes de Marrakech et Essaouira. Et quoi de plus tentant que la communauté marocaine basée à l’étranger ? S’il y a un pays qui fait rêver les opérateurs marocains, c’est bien Israël qui regorge d’un énorme potentiel touristique pour le royaume, en particulier pour ces deux destinations. On estime qu’un million de juifs d’origine marocaine, notamment de ces deux villes, sont établis en Israël mais restent attachés à la terre de leurs ancêtres. Les manifestations de joie dans les rues israéliennes, suite à l’annonce du rétablissement des relations avec le Maroc, en sont autant de preuves. Une manne touristique très importante, certes, mais peu exploitée jusqu’ici, dit-on. Chaque année, seuls 50.000 à 70.000 juifs d’origine marocaine établis en Israël se rendent au Maroc pour le tourisme, mais surtout pour le pèlerinage et les fêtes religieuses.
Rencontre virtuelle entre opérateurs marocains et israéliens
C’est dans ce sens qu’une rencontre virtuelle est prévue, les 16 et 17 février, entre les opérateurs marocains et israéliens. Au menu, entre autres, figurent des échanges sur les meilleures options pour vendre la destination Maroc aux touristes israéliens. «La majorité des juifs marocains exilés en Israël ont toujours eu envie de revoir leur mère patrie, le Maroc», estime Faouzi Zemrani, vice-président de la CNT, convaincu que ces derniers sont «restés marocains». Si nombre d’entre eux sont morts, poursuit le responsable, les Israéliens d’origine marocaine de la troisième génération, originaires des campagnes du Sud notamment, entretiennent leur marocanité. «Ils mangent marocain et parlent arabe chez eux», explique Zemrani, avant d’ajouter que, néanmoins, «cela reste hors sol». Résultat, ceux-ci n’ont qu’une seule envie : revenir au Maroc en pèlerinage. Bien entendu, remarque Zemrani, la diaspora juive marocaine en Israël n’est pas l’unique cible de cette «opération de récupération». Toutes les diasporas juives sont concernées, que ce soit celles établies en France, au Canada ou ailleurs, dit-il. Il faut dire que la campagne a toutes les chances d’atteindre ses objectifs.
Le Maroc, une «terre promise» du judaïsme
Les juifs disposent au Maroc, en toute liberté et sécurité, des services nécessaires à la pratique de leur religion, avec entre autres un tribunal rabbinique composé de rabbins juges, fonctionnaires de l’État, qui se chargent d’affaires de statut personnel au nom du roi. La transmission de leurs traditions et l’éducation religieuse sont préservées, de même que le droit de rassemblement au sein de centres culturels. Mieux, depuis plusieurs années, et à l’initiative du souverain, une opération d’envergure a été lancée pour la rénovation et la sauvegarde du patrimoine et des lieux de culte juifs. La synagogue Slat El Fassyine (Fès) est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. De même, le Maroc est le seul pays arabe à restaurer ses synagogues, sanctuaires et cimetières juifs. Casablanca abrite le Musée du judaïsme marocain, unique musée juif dont la conservatrice est musulmane. Alors que le judaïsme au Moyen-Orient et en Afrique du Nord évoque souvent des images d’hostilité, le Maroc se présente comme une exception, compte tenu de la volonté institutionnelle de mettre en avant la composante juive de l’histoire du royaume.
Vols directs, exemption de formalités de visa…
Mieux, le royaume et l’État d’Israël ont signé, en décembre dernier à Rabat, quatre accords dans plusieurs domaines lors de la visite de la délégation américano-israélienne de haut niveau. Dans ce lot, figure un accord sur l’exemption de formalités de visa pour les détenteurs de passeports diplomatiques et de service, signé par le ministre délégué auprès du ministre des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Mohcine Jazouli, et Shlomo Mor-Yosef, directeur général de l’Agence de la population et de l’immigration. De même, un mémorandum d’entente dans le domaine de l’aviation civile a été signé par Zakaria Belghazi, directeur général de l’aviation civile au ministère du Tourisme, de l’artisanat, du transport aérien et de l’économie sociale, et Joel Feldschuh, directeur de l’Agence de l’aviation civile. En reconnaissant l’importance d’assurer des vols directs entre Israël et le Maroc, les deux parties s’engagent à mener des discussions pour la conclusion d’un accord sur les services aériens.
Marrakech et Essaouira, deux destinations, un choix réfléchi
Le choix de ces deux destinations très prisées par les juifs n’est pas anodin. En 2017, le quartier juif de Marrakech a été rénové et rebaptisé «El Mellah». Ses rues arborent de nouveau des plaques en hébreu pour accueillir des touristes dont la plupart viennent d’Israël. Essaouira est, elle, notamment connue pour la Hiloula du saint Rabbi Haïm Pinto, personnalité emblématique du judaïsme marocain ayant marqué l’histoire de la ville, qui rassemble chaque année entre 2.000 et 3.000 personnes. Les juifs sont également très présents dans la capitale économique. Auprès des dirigeants de la communauté, on indique que le nombre de juifs se situe autour de 4.000, la plupart résidant à Casablanca.
Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco