Maroc

Subvention du blé : le coût du pain bon marché

Jusqu’où ira-t-il ? Le cours de la tonne de blé tendre, celui qui sert à la fabrication du pain, s’élevait hier après-midi à 430 euros tandis que le blé dur, utilisé pour produire les pâtes et le couscous, cotait 510 euros. Dans les deux cas, le Maroc est un gros importateur, encore plus cette année au vu de la chute de la récolte céréalière.   

Par rapport au mois de mars, les prix du blé ont augmenté en moyenne de 30 euros la tonne. Et cet emballement devrait se poursuivre selon les pronostics des traders des marchés céréaliers. C’est beaucoup pour les finances publiques, l’État assurant un amortisseur via la subvention de la farine de manière à préserver le pouvoir d’achat des ménages, surtout les plus modestes, ceux qui consacrent une grosse part de leurs revenus au budget alimentaire.

Pour ne pas toucher au prix du pain, les droits d’importation sur le blé sont suspendus tandis que la subvention au quintal à l’import a été doublée depuis le mois d’avril, passant à 140 dirhams.

Entre le gaz qui s’embrase et la farine et le sucre, les dépenses de soutien des prix ont atteint 10 milliards de dirhams (MMDH) à fin avril (source : Trésorerie Générale du Royaume). Après seulement 1/3 de l’année, le Trésor a déjà déboursée cette somme considérable au titre de la compensation, soit près de 60% des crédits prévus dans la loi de Finances.

À moins d’un retournement hypothétique de la situation en Ukraine, le pétrole, le gaz et le blé devraient poursuivre leur course folle. Car aux facteurs géopolitiques, la forte demande émanant des pays émergents et de Chine (malgré le confinement des métropoles) exercent une pression à la hausse sur tous les marchés des comodities.

Même s’il s’en défend, on ne voit pas comment le gouvernement pourrait se passer d’une loi de Finances rectificative. Sauf à orienter les énormes dividendes que le Trésor a reçus de l’OCP aux charges de compensation et se permettre au passage une petite entrave au principe de non-affectation des recettes. À date, il n’y a aucune inquiétude sur la disponibilité du blé au Maroc. Rabat a largement sécurisé ses approvisionnements en ajustant ses commandes auprès d’autres fournisseurs, dont la France et l’Argentine.

Les autorités assurent disposer d’un stock de sécurité équivalent à cinq mois de consommation, un niveau largement suffisant. Cette politique de précaution n’est pas seulement due aux conséquences de la guerre en Ukraine, mais elle fait partie de la politique de sécurisation des produits stratégiques résultant de la crise sanitaire de la Covid-19.

La Russie et l’Ukraine pesant 30% des exportations mondiales de blé, la substitution par d’autres pays n’était pas si évidente, les ports exportateurs d’Ukraine ou du moins ce qu’il en reste, Marioupol et Odessa, étant fermés.

La Russie et l’Ukraine sont des acteurs importants sur les marchés mondiaux des produits et les incertitudes qui entourent le conflit ont provoqué une flambée des prix, notamment du blé, du maïs et des graines oléagineuses, ainsi que des engrais.

Ces augmentations viennent rehausser des cours déjà élevés, soutenus par une forte demande et l’élévation des coûts des intrants provoquée par la pandémie de covid-19. L’indice FAO des prix des produits alimentaires a atteint en mars dernier son plus haut niveau (160 points) depuis sa création en 1990, et n’a connu qu’un léger fléchissement en avril.

Et cette inflation ne diminuera pas car les prévisions concernant les exportations de blé, tant pour la Russie que pour l’Ukraine, ont été drastiquement revues à la baisse depuis le début de la guerre. Et malgré l’accroissement de l’offre chez d’autres acteurs du marché, tels que l’Inde et l’Union européenne, celle-ci reste limitée et les prix demeureront vraisemblablement élevés au cours des prochains mois, prédisent les experts du FAO.

Parmi les pays qui sont fortement tributaires des importations de blé, figurent l’Égypte et la Turquie, mais aussi un certain nombre de pays subsahariens comme le Congo, l’Érythrée, Madagascar, la Namibie, la Tanzanie et la Somalie. Pour ces derniers, et en y ajoutant les pays du Sahel, la FAO a déjà prévenu qu’au moins 35 millions de personnes seraient exposées à l’insécurité alimentaire. Ça craint !

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO


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