Simplification des procédures administratives : pourquoi faut-il croire au changement ?
Lancé mercredi dernier, le Portail national des procédures et des formalités administratives «Idarati.ma» devrait révolutionner les relations entre l’administration et l’usager. Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ?
Le changement au sein de l’administration publique est visiblement en marche. Il faut dire que certains indicateurs incitent à y croire, cette fois-ci. En tout cas, le secrétaire général du département de la Réforme de l’administration, Ahmed Laamouri, est intimement convaincu que le changement escompté sera au rendez-vous grâce à l’ambitieux chantier de la simplification des procédures. La mise en œuvre de ce projet d’envergure, si elle est menée à bon port, permettra de changer l’image écornée de l’administration auprès de l’usager, qu’il soit citoyen résidant au Maroc, étranger, MRE ou investisseur. Connue pour une bureaucratie rigide, l’administration marocaine est en passe d’être transformée, grâce à l’application des nouvelles mesures visant la simplification des procédures administratives. Pour rappel, le texte 55-19 relatif à ce chantier, adopté il y a un an, est entré en vigueur le 28 septembre 2020. L’ensemble des administrations concernées ont recensé, transcrit et documenté leurs actes administratifs qu’elles ont soumis à une commission technique. Cette dernière, à son tour, les a examinés et filtrés avant de les transférer à la Commission ministérielle présidée par le Chef de gouvernement pour validation. La première fournée des procédures et formalités ayant reçu le feu vert de cette instance vient d’être publiée sur le portail national «Idarati.ma» qui a été officiellement lancé mercredi dernier.
Cette plateforme sera enrichie progressivement par de nouvelles procédures, après leur approbation par la Commission nationale. Pourquoi cette plateforme est-elle importante et comment sera-t-elle un levier pour la concrétisation de la simplification des procédures?
Il faut souligner que le portail national des procédures et formalités administratives représente désormais la seule référence en la matière au niveau national. Les administrations sont tenues de n’exiger que les documents publiés sur le site «Idarati» et de respecter les délais impartis en matière de délivrance des actes administratifs, ce qui signe donc la fin des improvisations et des abus de pouvoir des fonctionnaires. Néanmoins, mieux informer les citoyens de leurs droits et leurs devoirs permettra de renforcer la transparence au sein de l’administration publique et de lutter contre la corruption. Le grand défi à relever est celui de l’implémentation des nouvelles dispositions qui sont opposables aux administrations concernées. Ainsi, les objectifs fixés ne peuvent aboutir sans l’adhésion des fonctionnaires. C’est d’ailleurs dans ce cadre que s’inscrivent les sessions de formation organisées par le département de la Réforme de l’administration et le ministère de l’Intérieur.
Les fonctionnaires sont en effet appelés à s’approprier les objectifs de la simplification des procédures et à respecter les nouvelles règles en vigueur. Pour sa part, l’usager doit faire prévaloir ses droits auprès de l’administration pour contribuer aux efforts du changement, d’autant plus que le processus de demande des actes administratifs est dorénavant on ne peut plus clair et même les voies de recours bien définies. La loi, qui exige la motivation par l’administration de ses décisions négatives et l’information des usagers concernés, a instauré le droit de recours en cas de réponse défavorable de l’administration concernant les demandes d’actes administratifs ou lorsque celle-ci dépasse les délais prévus pour leur traitement.
Pour certains actes administratifs, le silence gardé par l’administration à l’expiration des délais prévus, sur une demande de l’usager, vaut acceptation. Le processus irréversible est désormais enclenché. Le lancement du portail national n’est qu’un début en matière de simplification des procédures administratives. À moyen terme, «Idarati» permettra l’interopérabilité et l’échange des informations et des données entre administrations, y compris les collectivités territoriales. Les citoyens et les entreprises s’adresseront bientôt uniquement à l’administration responsable du service demandé, qui a pour mission de demander aux autres administrations les informations nécessaires à l’accomplissement de ce service. Mais on n’est pas encore à la phase de la digitalisation des demandes en ligne des papiers administratifs. En effet, toutes les administrations doivent basculer, dans moins de quatre ans et demi, vers la dématérialisation des procédures administratives. À cet égard, de grands efforts restent à déployer pour les administrations qui sont à la traîne.
Les changements phares
Les nouvelles mesures apportent une batterie de nouveautés pour simplifier les procédures administratives. Il s’agit, entre autres, de l’interdiction de demander à l’usager de fournir plus d’un seul exemplaire des documents et pièces constituant le dossier de demande d’un acte administratif, de l’abolition des demandes de légalisation de signature des documents composant le dossier de demande de l’acte administratif, de l’interdiction de demander à l’usager de fournir des documents à caractère public ne le concernant pas personnellement, de la suppression de la certification des copies conformes des documents composant le dossier de demande de l’acte administratif, etc. À cela s’ajoute une nouvelle mesure pour les citoyens : la substitution de certaines pièces ou informations requises pour l’accomplissement d’un acte administratif par une déclaration sur l’honneur produite par l’usager concerné. Certains documents ont, par contre, été supprimés, comme le certificat de vie collective et l’attestation de célibat. L’administration est désormais tenue de délivrer un récépissé à l’usager suite au dépôt de sa demande.
Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco