Retour des pluies au Maroc : quel impact sur l’agriculture ?
Malgré les récentes pluies qui ont remonté le moral des agriculteurs, ces derniers préfèrent temporiser puisque c’est de la régularité des précipitations dans les mois à venir que dépendra le sort de l’actuelle campagne céréalière.
Comme attendu, la pluie a été presque généralisée sur le territoire national selon le bulletin météorologique spécial de la Direction générale de la météorologie (DGM). Cette pluie espérée depuis un mois déjà par les agriculteurs sera-t-elle bénéfique pour l’actuelle campagne agricole, notamment céréalière ? De l’avis de Mohamed Alamouri, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader), «bien que ces pluies aient arrosé une bonne partie du territoire national avec de fortes précipitations, il faut attendre toutefois la fin de ce mois de janvier pour déterminer avec exactitude la situation de l’actuelle campagne en fonction des paramètres de la pluviométrie dans l’ensemble des périmètres agricoles». Ce retour des précipitations dans les régions agricoles devrait selon les professionnels s’installer dans la durée, puisque la pluviométrie au Maroc est généralement caractérisée par une répartition temporelle inégale. Par ailleurs, toutes les régions agricoles ne sont pas soumises au même niveau de pluviométrie. C’est cette variabilité spatiotemporelle qui conditionnera, à l’instar des autres saisons, le sort de l’actuelle campagne céréalière (bonne, moyenne ou mauvaise), y compris la croissance des trois principales céréales (blé tendre, blé dur et orge) et leur rendement.
L’impact sur les réserves d’eau
Mais au-delà du fait que la pluie a remonté le moral des agriculteurs au démarrage de cette campagne agricole, les répercussions selon Mohamed Alamouri devront être à même d’atténuer les effets de la crise de la Covid-19, de la succession des années de sécheresse et de la crise hydrique. En somme, il s’agit d’abord de l’impact positif attendu sur les réserves d’eau et le remplissage des barrages à usage agricole. La fonte des neiges ainsi que les écoulements devraient aussi contribuer à accroître leurs niveaux de remplissage. Ces ressources contribueront également à la reconstitution des nappes phréatiques. À cela s’ajoutent la réduction du déficit pluviométrique par rapport à la saison précédente et l’impact sur l’évolution du couvert végétal des parcours et de la production fourragère, en plus des répercussions sur les arbres fruitiers. En se référant à la situation journalière des principaux grands barrages du royaume, arrêtée le 6 janvier 2021, le taux de remplissage atteint à peine de 37,2 % au niveau national, avec une réserve de 5.802 Mm3 contre 49,3% durant la même période de l’année 2020, soit 7684 Mm3. Une situation qui continue d’exercer une pression sur l’eau d’irrigation mobilisée à partir des barrages dans les périmètres irrigués, en plus de la baisse des niveaux de la nappe phréatique. Résultat, en dehors des bassins de Loukkos, Sebou, Bouregrag-Chaouia, qui sont respectivement remplis à hauteur de 64,74%, 53,55% et 52,28%, les autres bassins affichent des taux de remplissages inférieurs à 35%. Le déficit des retenues les plus inquiétants sont enregistrés au niveau de la région du Souss-Massa, à hauteur de 14,29%, Oum Er Rbia à 15,62% et Guir Ziz Rheris à Errachidia à 17,10%. Ces bassins sont suivis par les périmètres de Moulouya à hauteur de 31,66%, Tensift à 34,59% et Drâa-Oued Noun à 28,10%. Pour rappel, la production céréalière au titre de l’année 2019-2020 a enregistré 32 millions de quintaux, soit une baisse de 39% par rapport à la campagne précédente qui a été considérée comme très moyenne (52 millions de quintaux). Le constat est le même pour la campagne 2018-2019 qui était moyenne, alors que celles de 2016-2017 et 2017-2018 avaient été considérées bonnes sur le plan de la production céréalière.
Yassine Saber / Les Inspirations Éco