Maroc

Omicron au Maroc : faut-il s’inquiéter ?

Malgré les mesures prises pour se protéger du variant Omicron, notamment la fermeture des frontières aériennes et maritimes, le Maroc a été touché par la souche tant redoutée. Faut-il en avoir peur ?  Deux spécialistes s’expriment sur le sujet. 

Au lendemain de l’apparition du variant Omicron, le Maroc a pris la décision ferme de se barricader en fermant ses frontières aériennes et maritimes. Depuis, celles-ci ont été rouvertes, partiellement, pour les vols commerciaux afin de permettre aux Marocains bloqués à l’étranger de rentrer au bercail. Une prudence dictée par la propagation rapide du virus tant redouté. Trop tard, le virus est déjà entré dans le vert. Le premier cas d’infection au variant Omicron du coronavirus a été détecté mercredi dans le royaume.

Dans le détail, il s’agit d’une citoyenne marocaine dont l’état de santé est stable et ne suscite pas d’inquiétude, a tenté de rassurer le ministère de la Santé dans la même foulée ajoutant que la patiente a été placée sous supervision médicale dans un hôpital de Casablanca. Il faut noter que le variant identifié est local. «Après investigation, nous avons découvert que ce variant n’est pas entrant, il est local. Il est le résultat d’une mutation dans la ville de Casablanca», a expliqué Khalid Aït Taleb. Est-ce qu’il faut en avoir peur ? La réponse est non, mais la prudence doit être de mise si l’on en croit le Professeur et le Chef de service des maladies infectieuses au CHU Ibn Rochd de Casablanca, Kamal Marhoum El Filali. Nous avons déjà des données parcellaires concernant ce nouveau variant. On sait qu’il se transmet facilement et beaucoup plus rapidement que le Delta.

«Cependant, les cas sont moins sévères», estime le spécialiste. Un constat que partage un autre expert, en l’occurrence le médecin, chercheur en politiques et systèmes de santé, Tayeb Hamdi. «Omicron est beaucoup plus transmissible que Delta, seul le degré de supériorité reste à déterminer. En à peine une semaine, le nombre de cas d’infection en Afrique du Sud a été multiplié par cinq et le taux de positivité est passé en deux semaines de 2% à 25%. En Norvège, lors d’un dîner, une seule personne de retour d’Afrique a contaminé la moitié des 120 invités. Au Royaume-Uni, le nombre de cas dus à Omicron double tous les deux ou trois jours», a-t-il expliqué. Toutefois, poursuit notre premier interlocuteur, s’il semble moins virulent, nous n’avons pas, à l’heure actuelle, suffisamment d’information pour en tirer des conclusions. Il en appelle à la vigilance des citoyens et plus de fermeté pour faire face à ce nouveau venu que le monde entier découvre à peine. En gros, il recommande le retour aux mesures barrières et l’accélération de la cadence de la vaccination. «Les personnes qui ne se sont pas encore vaccinées doivent le faire pour la première et la deuxième dose, et que celles et ceux qui doivent faire des rappels pour la troisième dose le fassent afin d’augmenter leur chance d’échapper au virus», insiste le professeur.

Le constat est là. Au lendemain de la mise en place du pass vaccinal, les centres de vaccination ont été pris d’assaut par les Marocains. Quelques semaines plus tard, plus personne ne se bouscule pour se faire piquer. Aujourd’hui, un total de 22,8 millions de Marocains ont reçu leur 2e dose (soit 62,5% de la population), 24,5 millions la 1ère dose (67%) et 2,1 millions la 3e. L’objectif est d’immuniser 80% de la population, soit 30 millions de personnes. On est encore loin du compte.

Pourtant, les résultats préliminaires d’une étude en Afrique du Sud, qui a confronté ce variant aux vaccins Pfizer, a démontré que le pouvoir de neutralisation des sérums issus de personnes doublement vaccinées a été réduit de 41 fois par rapport à la souche originale, indique Tayeb Hamdi. Mais, ajoute ce dernier, le sérum des personnes doublement vaccinées, et ayant déjà été infectées auparavant, fait remonter ce pouvoir de 35 fois. Ce qui laisse comprendre que trois doses garderaient un niveau de protection contre Omicron comparable à deux doses contre la souche classique. «En plus des anticorps, le corps se défend contre le virus par un autre type de défense, l’immunité cellulaire par les lymphocytes T qui ne semble pas être affectée par les mutations de ce variant. La vaccination à base de deux doses pourrait garder une certaine efficacité contre les formes graves et le décès mais amplement amoindrie par Omicron.

Les experts estiment qu’avec trois doses on serait aussi protégé face à Omicron qu’avec deux doses face à la souche classique», insiste Hamdi. La question que tout le monde se pose est de savoir que va-t-il se passer maintenant ? Quelles en seront les conséquences sur le quotidien des Marocains ? La tutelle a un début de réponse à cette question.

Les autorités ont annoncé, en effet, la décision de mettre fin, à partir du 23 décembre, au dispositif mis en place pour permettre aux Marocains bloqués à l’étranger de regagner le pays. Cette décision a été prise en raison de «la propagation fulgurante du variant Omicron au niveau planétaire et sa progression préoccupante dans le voisinage européen du Maroc», selon le comité interministériel de suivi du Covid. Annoncée lundi, la levée partielle de la fermeture des frontières aériennes du Maroc, effective depuis le 29 novembre, était destinée à permettre à titre exceptionnel aux Marocains coincés à l’étranger de rentrer dans leur pays via le Portugal, la Turquie et les Émirats Arabes Unis.

A partir du 23 décembre, les vols de passagers à destination du royaume seront de nouveau interdits, précise le comité de suivi de la pandémie. Les autorités qui «continueront à placer la préservation de l’intégrité physique et la santé des Marocains, avant toute autre considération», autorise cependant des vols spéciaux de rapatriement vers les pays étrangers, notamment vers l’Europe alors que le nombre de cas quotidiens de contamination est en augmentation depuis le 21 novembre au Maroc. Avec cette nouvelle donne, tout porte à croire qu’il y aura dans les jours à venir un durcissement des mesures anti-Covid-19 en vigueur. L’OMS a averti, mardi, que le variant Omicron se propageait à un rythme inédit et exhorté les pays à agir rapidement pour freiner sa transmission.

Tayeb Hamdi
Médecin, chercheur en politiques et systèmes de santé

“L’accélération de la vaccination sur la base d’un régime de trois doses nous permettra de faire face à Delta, à Omicron et d’accélérer le retour à la vie normale. Les mesures prises par l’État sont nécessaires, mais doivent être obligatoirement complétées par une action citoyenne en adoptant le plus rapidement possible une vaccination complète à trois doses et un respect rigoureux des mesures barrières”.

Khadim Mbaye / Les Inspirations ÉCO



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